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Etre pèlerin aujourd'hui

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La Terre Sainte, Rome, Saint-Jacques de Compostelle restent les destinations les plus prisées des pèlerins catholiques. En France, Lourdes et Lisieux constituent les lieux saints les plus fréquentés. Les nombreux pèlerinages locaux de naguère tendent à s’estomper. Les Vosges représentent le département qui envoie le plus de participants à Lourdes à travers le fameux train blanc.
Cependant, la mobilisation de bénévoles, prêts à payer leur voyage pour s’occuper des malades, pose le défi du recrutement à la direction diocésaine des pèlerinages. Quant aux déplacements à l’étranger, ils sont freinés par la crise économique.
Mais en l’abbé Pierre Carillon, les Vosgiens disposent d’un guide chevronné : il témoigne que l’apport spirituel d’un pèlerinage en Terre Sainte ou en Turquie sur les traces de saint Paul demeure irremplaçable.

Partir pour se trouver

Les pèlerinages connaissent un regain d’intérêt. Non seulement des chrétiens, mais aussi des personnes en quête spirituelle se mettent en route vers les lieux saints. Dans les Vosges, les pèlerins pour Lourdes restent nombreux.

Les pèlerinages relèvent d’une longue tradition. Par un étrange paradoxe, ils ont connu une première faveur au Ive siècle, alors que les premiers chrétiens se sont sédentarisés. Si fort est chez l’homme le besoin de découvrir, de se remettre en cause, de se dépasser. Soif de liberté, volonté d’affermir sa foi dans des lieux de mémoire, aspiration au dépouillement vers l’essentiel.
Étymologiquement, pèlerinage signifie pérégrination, voyage à l’étranger : la Terre sainte reste le premier but de déplacement religieux des chrétiens. En Europe, Rome et le Vatican restent la destination privilégiée. Saint-Jacques-de-Compostelle garde une dimension initiatique, bien au-delà de la vénération ancestrale des catholiques. Le romancier mystique à succès Paulo Coelo et, plus récemment, la cinéaste et sociologue Coline Serreau s’en sont fait les chantres. Alors que l’homme ne sait plus très bien où il va, les chemins balisés de Saint-Jacques sont jalonnés de paysages d’humanité : ils offrent « des ponts, des repères, des gîtes d’étape et des lieux d’accueil ».
Ils favorisent une recherche spirituelle visant à se recueillir sur soi-même, loin de l’abondance et des plaisirs factices. Pour les chrétiens, le pèlerinage reflète la condition même de l’homme en route vers le Royaume : « Les croyants, dit saint Paul, sont des étrangers et des voyageurs sur la terre ». L’Église est elle-même en pèlerinage : le Christ dirige et oriente le peuple de Dieu vers la béatitude éternelle.

Relever les bénévoles de lourdes

En France, Lourdes reste le premier pôle d’attraction devant Lisieux : on y dénombre six millions de pèlerins par an. Directeur des pèlerinages et président de l’hospitalité Notre-Dame de Lourdes, Guy Merkel souligne que 500 Vosgiens sont allés se recueillir l’an dernier devant la grotte de Massabielle.
Parmi eux, 250 hospitaliers et hospitalières ont soigné et étroitement accompagné quelque 160 malades, offrant temps et argent pendant une semaine de temps libre : « J’ai été enthousiasmé par l’élan de ces bénévoles très actifs, par leur dévouement constant pour les malades : ils sont aux petits soins, leur donnent à manger, font le ménage, le linge. Pour les malades, Lourdes, c’est la semaine de l’année. Ils sont choyés pendant huit jours. Il suffit de voir leur visage avant et après pour mesurer les bienfaits de ce pèlerinage. » Et Guy Merkel de soulever la question de la relève des ces bénévoles animés par une véritable vocation. Ils sont fidèles depuis 30 ans, mais leur moyenne d’âge grandit.
A Lourdes comme dans tous les lieux de pèlerinage, l’afflux de pèlerins a développé commerce et hôtellerie. Les chrétiens de terre sainte, parmi lesquels beaucoup d’Arabes, appellent de leur vœux la fréquentation touristique indispensable à leur vie, témoigne l’abbé Pierre Carillon. La vente de souvenirs du saint Sépulcre à Jérusalem, comme les fioles d’huile en contact avec le tombeau de Jésus, est appréciée des pèlerins. Tout comme celles des Vierges de Lourdes, et des Jeanne d’Arc de toutes formes et couleurs à Domremy. Même si Pascal disait que “soutenir la piété jusqu’à la superstition, c’est la détruire”, le commerce des objets pieux ne mérite sans doute pas les foudres dont on l’accable !

Jean-Paul Vannson



Un peu d’histoire

« L’âge d’or des pèlerinages a sans doute été le XIXe siècle. Le site de Lourdes, déjà très fréquenté, a favorisé l’éclosion de grottes derrière l’église de nombreux villages de France », sourit Bernard Houot. Et l’historien de préciser que la naissance du magazine Le Pèlerin remonte au début de la IIIe République : le journal servait de bulletin de liaison entre des lieux de pèlerinage désormais desservis par le train, ce qui stimulait leur fréquentation. L’ancien conservateur du patrimoine des Vosges insiste sur le caractère populaire des pèlerinages de jadis, évoqués dans le livre « Ils sont nos aïeux » (1980) du chanoine André Laurent. L’installation d’ermites suscitait des pèlerinages locaux.
Dans les années 50, Mgr Brault a mis le holà à certaines dérives : le culte de saint Del s’était fourvoyé, passant de la dévotion à la superstition. De même, Rome s’est élevée contre l’apposition incontrôlée d’ex-votos sur les lieux de culte. On allait demander aide aux saints de nombreux villages, « contre la famine ou pour la protection de la récolte ». La procession de la fête Dieu en juin s’apparentait à un pèlerinage dans de nombreuses communes. Le cortège partait de Saint Michel ou de la fontaine Goëry à Épinal, ou du Mont Saint Oger à Deyvillers.
On venait en foule prier Jeanne d’Arc à Domremy, le train s’arrêtant alors en gare de Coussey. Toujours dans la plaine, Saint Élophe à Soulosse, Sainte Libaire à Grand et Saint Pierre Fourrier à Mattaincourt étaient objets de dévotion : pendant la guerre de Trente Ans, le “bon père” avait soigné les miséreux ; inventeur du tableau noir, il avait contribué à donner une instruction aux filles. Les Vosgiens se rendaient aussi à Sion. A Remiremont, Saint Romary, envoyé par saint Colomban, avait fondé le plus gros monastère de la région. A l’instar de la forêt de Tannières ou du vallon du Void d’Escles, certains lieux de culte se sont implantés sur d’anciens sites païens ou druidiques.






Cloîtrées et accueillantes

C’est dans la tradition bénédictine et cistercienne : l’abbaye d’Ubexy offre régulièrement l’hospitalité à des personnes en recherche et à des pèlerins. Rencontre.

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Ubexy n’est pas un lieu de pèlerinage. Mais la communauté de 17 moniales, fondée en 1841, reçoit les visiteurs qui ont besoin de faire un retour sur soi, dans un lieu où le silence “coupe le souffle”, ainsi que le souligne la mère abbesse : “Tous les hôtes qui se présentent seront reçus comme le Christ en personne, si bien qu’il puisse nous dire un jour : j’ai demandé l’hospitalité et vous m’avez accueilli”, résume la brochure de l’abbaye Notre-Dame de Saint-Joseph : “Le Christ attire, ceux qui viennent ici sont attirés par le Christ à travers le monastère, par ce qui se passe à travers ce qu’on vit, à travers la liturgie”, éclaire la mère abbesse.
Depuis onze ans, c’est la sœur hôtelière Bernadette-Marie, auparavant infirmière pendant dix-sept ans, qui assure l’accueil des visiteurs à l’abbaye. Sa mission est délicate : “Il ne faut pas rabrouer les gens, faire le lien avec la communauté”, confie-t-elle en souriant. Certes, les soeurs obéissent à la règle de saint Benoît et sont cloîtrées. Les visiteurs ne rentrent pas, mais peuvent regarder un diaporama montrant la vie monastique. Et sur demande, une soeur peut répondre aux questions des visiteurs.

Pain d’autel et magasin

Établie sur le site d’un ancien château féodal de 1290, l’abbaye reçoit parfois des pèlerins en route pour Saint-Jacques de Compostelle. Une fois par an, trente Belges venus avec le père Libert en pèlerinage à Mattaincourt, font escale ici et sont hébergés à Portieux. La petite communauté d’Ubexy dispose de 18 chambres et 28 lits, et propose aussi des repas : “Le dimanche, comme il y a plus de monde en raison de l’office de 10h30, nous faisons appel à un traiteur.” Chacun donne ce qui lui sied. Pour assurer leur subsistance, les soeurs fabriquent du pain d’autel. Elles tiennent aussi un magasin où l’on peut trouver des spécialités fabriquées dans les monastères et abbayes cisterciennes : spécialités gourmandes, comme le miel ou les liqueurs, layettes, cartes, CD de chants par les moniales d’Ubexy et DVD de l’abbaye : “Il fait connaître notre vie de prière, de travail, de vie fraternelle et d’histoire”, observe la mère abbesse. Mais l’essentiel de la nourriture offerte est bien sûr spirituelle : “On reçoit des gens en recherche. On ne demande pas quelle est leur confession. En même temps, on vient prier.”

Besoin de calme

Qui sont les visiteurs demandant l’hospitalité ? Leur milieu social est varié. Un chauffeur de bus mosellan, un demandeur d’emploi de la Plaine vosgienne, une soeur carmélite suisse, une maman de la montagne vosgienne avec son enfant handicapé… tous sont accueillis : “Ils ont besoin de calme. On propose des textes à la méditation avec la prière, on aide les gens à se poser”, dit soeur Bernadette- Marie. Ils apprécient le silence d’un site où le téléphone portable ne passe pas. Tout favorise en ces lieux la vie de l’esprit : “La bibliothèque est mise à leur disposition, et on est très vite à la campagne.”
Présidée par François Baudin, l’association Ubexy-Amitié, qui compte 350 adhérents, venus de France, mais aussi d’Allemagne et du Bénélux, fait connaître la vie cistercienne et aide financièrement l’abbaye. Elle organise tous les ans une journée de spiritualité, un voyage dans un lieu lié à la tradition cistercienne et monastique - comme Orval ou Cîteaux - à travers une récollection. Cette année, ce sera à Benoîte-Vaux et Saint-Mihiel. L’an dernier, l’abbaye d’Ubexy a reçu le chœur d’hommes de Nancy. Commentaire des visiteurs à l’issue de ces journées : “Vous êtes ouvertes, accueillantes, vous nous faites du bien !”

Jean-Paul Vannson






Les 57 pèlerinages de l’abbé Carillon

De 1970 à 2010, l’abbé Pierre Carillon aura conduit plus de mille pèlerins vosgiens en Terre Sainte. Aucun n’est revenu déçu. Témoignage.

Secrétaire de l’association diocésaine, ancien économe du diocèse, l’abbé Carillon garde de la familiarité avec les chiffres un certain sens de la rigueur. Pour lui, “on ne va pas en pèlerinage pour prouver des choses, mais pour décaper des préjugés issus de l’imaginaire”. Un exemple ? La grotte de Bethléem : “Loger dans une grotte était habituel pour les premiers habitants de Palestine”. Si on a pu identifier la grotte de Bethléem comme étant celle de la naissance du Christ, c’est en raison même du contre-feu allumé par les Romains : l’empereur a fait construire un temple païen pour empêcher les chrétiens d’y aller. Il a fait édifier un bâtiment analogue à Jérusalem pour interdire l’accès au Calvaire. Nulle part, on ne trouvera de “traces des pieds” de Jésus, mais à Nazareth, à Capharnaüm, au Mont Sion à Jérusalem, on découvrira des graffitis, des gribouillis, des inscriptions tracés par les premiers chrétiens : “Des gens qui auraient pu connaître Jésus vivant, qui connaissaient des apôtres, qui laissaient des traces dans leur lieu de réunion qui n’étaient pas encore des églises”. Des traces historiques qui datent de la 2e partie du 1er siècle de notre ère.
Une certitude : après la découverte de la Terre Sainte, les pèlerins ne sont plus jamais les mêmes : “Moi-même, je ne reviens pas comme je suis parti. Chaque fois que je débarque, je suis heureux et ému. Quand je reviens, je suis transformé ; malgré mon expérience, je ne m’y suis pas habitué. J’ai conduit plus de mille pèlerins, certains sont venus plusieurs fois. Entre les participants, qui se vouvoient au départ, il se forme une communauté, une petite Église. Tout le monde est heureux, on s’embrasse en se quittant”.

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L’abbé Carillon a découvert le pèlerinage en le fréquentant : “C’est une aventure. Être chrétien, c’est s’ouvrir au monde, rencontrer les autres. Certains partent pour faire du tourisme, mais s’accrochent dès lors qu’on leur présente les choses de façon historique. Bible en main, on lit les textes sur les lieux. Quand ils entendent après les textes dans leur église, ils entendent cela tout à fait autrement. A Noël, ils ferment les yeux comme s’ils étaient à Bethléem”. Il n’est de bon pèlerinage que bien préparé et accompagné. Guide chevronné, historien cultivé, animateu spirituel passionné, le père Carillon connaît parfaitement le terrain : “En Terre Sainte, il est chez lui”, témoigne un ancien participant. Avec la même ferveur, il prépare le déplacement en Turquie sur les traces de saint Paul et de l’Apocalypse : “Là-bas, on s’appuie sur les textes et non sur les traces archéologiques. On va visiter Myre, le pays de saint Nicolas, saint auquel les musulmans sont attachés. En Cappadoce, les paysages sont extraordinaires”.
Cette prochaine expérience est proposée en mai : “Pérégriner, cela veut dire avancer, marcher. C’est accepter d’évoluer et de progresser dans sa vie chrétienne. Il y a d’autres moyens que le pèlerinage, mais ça peut être un bon moyen de fortifier sa foi”.

Jean-Paul Vannson


Le service diocésain des pèlerinages vous propose ses pèlerinages 2010

- 6 avril : Mont Sainte-Odile en Alsace au départ d’Épinal et Saint-Dié, sous la conduite de Mr l’Abbé Thomas
- 26 avril au 4 mai : Sur les pas de Saint Paul au départ d’Épinal et Saint-Dié, sous la conduite de Mr l’Abbé Carillon. Au programme : Tarse, la Cappadoce, Antioche de Pisidie, Antalya, Perge, Myre
- 9 mai : Domremy, fête de sainte Jeanne d’Arc
- du 1er juin au 4 juin : La Salette, Notre-Dame du Laus et Ars au départ d’Épinal et Saint-Dié, sous la conduite de Mr l’Abbé Thomas
- 4 juillet : Mattaincourt, Saint-Pierre Fourier
- du 10 au 16 juillet : Lourdes, Pèlerinage diocésain sous la présidence de Monseigneur Mathieu, par train spécial au départ d’Épinal
- du 23 au 27 août : Banneux au départ de Nancy, organisé par le Diocèse de Nancy-Toul
- 30 août : Notre-Dame de Sion, Pèlerinage des Vosgiens. Bus au départ d’Épinal et Saint-Dié
- du 15 au 20 septembre : Lisieux-Pontmain- Mont Saint-Michel au départ de Nancy, organisé par le Diocèse de Nancy-Toul
- 17 octobre : Rome, cérémonie de béatification de Jean Paul II
- du 25 octobre au 3 novembre : Terre Sainte, au départ d’Épinal et Saint- Dié, sous la conduite de Mr l’Abbé Carillon. Au programme : Désert du Neguev, Nazareth, Bethleem, Jérusalem, etc…

Renseignements et inscriptions auprès du service diocésain des Pèlerinages :
Marie-France Georgel
Maison diocésaine
29 rue François de Neufchâteau
88000 Épinal
Tél : XX.XX.XX.XX.XX tous les jours de 16h à 18h
Courriel
Publié le 02/02/2010 par Alice.