Le chemin de l’unité
La période est peu propice au débat sur l’unité entre chrétiens. Pourtant, des militants continuent de veiller au rapprochement entre catholiques, protestants et orthodoxes.
Œcuménisme. Parfois, le mot paraît abstrait, vide de sens. Ensemble, terre habitée. Tous un avec le Christ, comme le Père en Lui et Lui avec le Père. Un appel impérieux à l’unité s’il en est. Alors que les chrétiens n’ont guère cessé de se disputer au cours des siècles, dans le feu et le sang. Toutes les religions prônent l’amour du prochain, relève Montaigne, en observant que “c’est une belle harmonie quand le dire et le faire vont ensemble.” C’est ainsi qu’il y a peu, on a encore vu une guerre anachronique ravager l’Irlande – même si le conflit s’est nourri d’autres causes que religieuses.
L’amitié, ajoute l’auteur des “Essais”, se nourrit de communication. En matière d’œcuménisme, le groupe des Dombes a montré l’exemple. Paul Couturier (1881-1953) prône le consensus différencié : “Chacun expose sa foi dans un souci de spécificité pour entrer dans le point de vue de son frère, pour le mieux comprendre dans sa cohérence et pour s’en enrichir.” Objectif : promouvoir des actions communes, entre catholiques, protestants, anglicans et orthodoxes, en dépit des différences doctrinales, et pour une unité visible de l’Église. C’est ainsi qu’au conseil presbytéral du diocèse, le pasteur Agnès Schaeffer est toujours invité.
Augsbourg à la trappe
Sur le chemin de l’unité, les progrès sont lents mais réguliers. Pour Pie XII, le désir de l’unité relève d’une “inspiration de la grâce du Saint-Esprit”. Jean XXIII invite des observateurs non catholiques au concile Vatican II. Paul VI rencontre le patriarche Athënagoras en 1964, puis lève l’excommunication du XI° siècle à l’encontre des orthodoxes. Pour Jean- Paul II, la recherche œcuménique est irréversible. Autant d’avancées confirmées par l’adoption d’une version œcuménique du “Notre Père” (1966), par le COE (Conseil Œcuménique des Eglises) et par la traduction œcuménique de la Bible (1975).
En 1999, les églises catholiques et luthériennes, ainsi que les associées de cette dernière, signent la déclaration d’Augsbourg. Un accord très important, souligne le Père Michel Lambert : “Ces textes traitent de la liberté de la foi et de la gratuité du salut. Mais comment le prendre en compte localement ?” s’interroge le prêtre chargé des questions œcuméniques dans les Vosges. La réponse n’est pas simple. Aux prises avec les difficiles questions de l’Annonce de l’Évangile dans le monde actuel, de la formation et de la réorganisation pastorale, comment les Églises locales, conseils presbytéraux, conseils pastoraux, paroisses, services... prennent-ils en compte ces textes dans leur vie quotidienne ?
Pas fusion, mais reconnaissance
État des lieux. Dans les Vosges, les orthodoxes sont présents au monastère de Godoncourt, à travers une communauté de moniales serbes : “Elles sont peu nombreuses, mais le symbole est important, car c’est là que l’église serbe orthodoxe se retrouve une ou plusieurs fois par an”, explique l’abbé Lambert.
Les protestants sont nombreux dans les Vosges. Ils sont les héritiers des familles qui ont fait le choix de la France après l’annexion de l’Alsace-Lorraine en 1870, pour beaucoup issus de familles d’industriels rappelle Michel Lambert. Deux pasteurs veillent sur cinq paroisses, à Épinal, Remiremont et Thaon d’une part, Raon-l’Étape et Saint-Dié d’autre part. Ils appartiennent à l’église réformée, une partie de ces réformés étant d’origine luthérienne. En ce qui concerne les évangélistes, “une réflexion très importante est menée depuis cinq six ans à l’intérieur du protestantisme pour savoir qui est membre de l’église, dit Michel Lambert. Au départ, 80% sont des catholiques. Il s’agit d’une question très importante pour les catholiques et les protestants, car les évangéliques font référence à la façon dont la Réforme a déclaré l’autonomie du peuple rassemblé, le peuple des croyants. Pour eux, l’église, c’est le peuple des croyants rassemblés, qui peut reconnaître ou révoquer un pasteur autoproclamé.”
Souvent, le rôle et le sens de la fonction papale, la hiérarchie chez les catholiques, sont présentés comme l’obstacle majeur au rapprochement entre les confessions chrétiennes. L’abbé Lambert note à cet égard la place éminente des clercs - des intellectuels fervents et respectés - dans les synodes de l’église réformée de France : “Ils ont des responsabilités pastorales ou assimilées. Au niveau de la pratique, on est assez proches des protestants, pas au niveau de l’institution.”
Pour l’abbé Lambert, on va “vers une reconnaissance, et non une fusion des églises”. Jusqu’où ira-t-on ? Dans une société en recherche d’humanité où les signes d’individualisme pointent, les églises chrétiennes vivent la nécessité de s’unir. Pour proposer ensemble ce qui est véritablement “utile et nécessaire.”
Jean-Paul VANNSON
Journée mondiale de Prière, emblème de l’œcuménisme
Œcuménisme : rendez-vous au temple le vendredi 5 mars 2010 à 18h30 pour découvrir la Journée mondiale de Prière (J.M.P)
Cette journée est organisée par un mouvement œcuménique de femmes chrétiennes avec pour devise : “S’informer pour prier, prier pour agir” 24 heures de prière autour de la terre, le 1er vendredi de Mars.
Cette année, les femmes Camerounaises nous invitent à prier avec elles sur le thème : “Que tout ce qui respire loue le Seigneur”
La Journée Mondiale de Prière est un mouvement universel de femmes chrétiennes de toutes traditions, qui, chaque année, se réunissent localement pour observer une journée commune de prière et de solidarité.
Dans de nombreux pays, ce lien est maintenu tout au long de l’année. Ce mouvement est lancé par des femmes monde. Tous, hommes et femmes, y sont invités.
Chaque année, un pays d’un continent différent prépare la célébration sur un thème choisi par le comité international. En cette année 2010, c’est le Cameroun qui a été choisi.
Les origines de cette Journée Mondiale de Prière remontent au 19e siècle, prenant naissance aux États-Unis et au Canada, quand quelques femmes chrétiennes se sont regroupées pour créer des actions de coopération visant à soutenir les femmes engagées dans une mission sur place ou dans d’autres régions du monde.
Ce mouvement rassemble des femmes de civilisations, de cultures et de traditions différentes dans la solidarité, la compréhension mutuelle et l’action tout au long de l’année. Par la J.M.P, les femmes tout autour de la terre confessent leur foi en Jésus-Christ. Elles découvrent un nouveau pays, une nouvelle manière de célébrer, elles vivent l’universalité de l’Église. Elles partagent leur espérance et leurs peurs, leurs joies et leurs peines, leurs richesses et leurs besoins. Ce mouvement permet aux femmes de découvrir le monde entier et de sortir de leur isolement de s’enrichir au contact de la foi chrétienne d’autres pays et d’autres cultures, de partager le poids des fardeaux des autres et de prier avec et pour elles. Et par leur offrande, collectée au cours de la célébration, elles agissent pour une société meilleure, en choisissant des projets éducatifs, sociaux, sanitaires et économiques en faveur des femmes et des enfants.
Ce mouvement permet aussi aux femmes de prendre conscience de leurs propres talents et de les mettre au service de la société, pour un monde toujours plus fraternel.
A Épinal, un groupe de femmes, de tradition protestante réformée, évangélique et catholique, se retrouvent pour préparer cette célébration, depuis 2007. Une première célébration a eu lieu au temple, en mars 2008, puis à l’église de la Sainte-Famille en 2009. En 2010, ce sera de nouveau au temple. Ces femmes partagent joies et peines, elles témoignent que la prière est force de changement, elles s’enrichissent au contact de la culture et de la foi d’autres chrétiennes, elles vivent la solidarité entre elles. Venez les rejoindre !
A venir
Journée Mondiale de Prière des femmes
rendez-vous vendredi 5 mars 2010 à 18h30 au temple 28 rue de la Préfecture à Épinal.
Évènement proposé par un groupe de femmes œcuméniques du Cameroun, sur le thème : “Que tout ce qui respire loue le Seigneur”.
Pour préparer la célébration du 5 mars 2010, deux rendez-vous :
- lundi 11 janvier 19 h / à la Fraternité, soirée introductive à la célébration et dégustation de recettes camerounaises.
- lundi 8 février 20h30 / à la Fraternité, soirée étude biblique sur le thème de la célébration : “Que tout ce qui respire loue le Seigneur”
Pour tout renseignement :
Claudine Jacquey : XX.XX.XX.XX.XX
Agnès Schaeffer : XX.XX.XX.XX.XX
- samedi 16 janvier 18h / messe à l’Abbatiale de Remiremont, avec message du pasteur Agnès Schaeffer.
- mercredi 20 janvier 17 h / célébration œcuménique avec les enfants des différents catéchismes, à l’église de la Sainte-Famille au Saut le Cerf.
- vendredi 22 janvier 20h30 / veillée de prières pour l’unité chrétienne, à l’église de la Sainte-Famille, message du pasteur Agnès Schaeffer.
- lundi 25 janvier 20h30 / partage œcuménique dans la paroisse “La croix de Virine”, Maison paroissiale de Lamerey : abbé Jean Pierre Vuillemin et pasteur Agnès Schaeffer.
- dimanche 7 février 10h30 / culte au temple de Remiremont, avec message du père Paul Thomas.
Michel Lambert et Agnès Schaeffer
Alain et Viviane Hazemann dans l’unité
Lui est protestant, elle est catholique. Dans quel culte élever leurs enfants ? Comment travailler au rapprochement entre confessions ? Ils témoignent.
Leur intérieur respire le calme, la sérénité. Il est orné d’aquarelles d’Alain, peintre inspiré de la colline de Sion. Côte à côte, les époux évoquent leur parcours initié en 1974. Un prêtre catholique, l’abbé Toubbhans, et un pasteur protestant, Hervé Missmer, ont célébré en commun leur mariage en l’église de Thaon. Alain avait refusé tout net une cérémonie derrière l’autel, proposé par un premier curé : “Je voulais un engagement commun et solennel devant l’assemblée des fidèles !”
Deux ans et demi après la naissance de Cyrille, premier enfant du couple, le baptême a été célébré à l’église. “C’était dans la continuité du mariage”, observe Alain. Le deuxième garçon, Lilian, a suivi le même chemin, sans que cela pose problème. Les deux enfants ont fréquenté le catéchisme. Viviane, qui apprécie la chaleur, la fraternité, la vitalité qui animent la communauté protestante, n’aurait pas été hostile à une formation venue de cette communauté.
Entre les époux, le respect des croyances de l’autre est mutuel. Tous deux œuvrent d’ailleurs au rapprochement entre catholiques et protestants, au sein du groupement des foyers mixtes des Vosges : “L’abbé Michel Lambert nous a toujours accompagnés”, apprécie le couple.
Combat rapproché
Chaque mois, depuis trente-deux ans, cinq couples formés d’un(e) catholique et d’un(e) protestant(e) se réunissent “chez l’un, chez l’autre” : “Ce sont devenus des amis. Au début, on parlait des différences entre les religions. On veut montrer qu’on peut très bien vivre, cohabiter entre chrétiens de différentes confessions. Et qu’au contraire, la différence renforce, enrichit, nourrit un esprit d’ouverture et de tolérance”. _ Concrètement, sur quoi cette action débouche-t-elle ? “On fait des études de textes de la Bible, on planche sur les thèmes annuels choisis par le diocèse. On participe à des réunions publiques lors de la semaine de l’unité en janvier à Épinal. On célèbre Noël ensemble.”
Thaon, fief protestant, a longtemps été à la pointe de l’oecuménisme. Jusqu’en 2007, sous l’impulsion du pasteur Eric Demange, qui cultivait de bonnes relations avec l’abbé Grandvallet, pasteur et prêtre participaient une fois par an à la célébration et à l’animation des offices à l’église et au temple. Membre du conseil presbytéral, Alain regrette le départ de ce pasteur : “Il n’y a pas assez de pas franchis, de passerelles, entre religions”, s’impatiente-t-il. Viviane approuve. Beaucoup de chemin a déjà été fait, mais entretemps la donne a changé. La société se montre de plus en plus matérialiste, mais
Alain et Viviane continuent à croire en d’autres valeurs. Et à pratiquer le rapprochement entre croyants attachés aux mêmes valeurs.
Recueilli par Jean-Paul VANNSON
Culture et foi dans l’unité
A Épinal, l’œcuménisme se cultive sur le terrain intellectuel. Dans des rencontres cinématographiques, littéraires, des conférences. Témoignage d’Alain Cuny.
Le samedi 9 janvier, à 17h, l’association Culture et Foi organise avec Scènes Vosges une rencontre à la Maison diocésaine autour de l’auteur dramatique Novarina : conférences et buffet en apéritif au spectacle du soir. L’abbé Alain Cuny prépare aussi le cycle de conférences et de débats cinématographiques 2010 avec le pasteur Agnès Schaeffer. Et il se plaît à souligner une autre avancée : la mise en place de la bibliothèque œcuménique à la Fraternité, 28 rue de la Préfecture.
Lancée en 1991 à l’initiative du pasteur Malcom White, Culture et Foi maintient la flamme de l’unité entre catholiques et réformés : “Il a repris l’initiative d’un festival du film biblique menée à Ivry. Elle a connu le même succès à Épinal. On visionne et on débat ensemble de films projetés.
Avec l’abbé Philippe Baldacini, Alain Cuny a initié avec le même succès les cycles de conférence de Culture et Foi, avec des conférenciers prestigieux et pointus des deux confessions : “C’était nouveau. Les journaux, la télé Images Plus, nous ont suivis. Qu’on ait un débat religieux dans un espace public est intéressant. La conférence sur Calvin, à l’occasion du 500e anniversaire, a attiré de nombreux catholiques.”
De même, le pasteur Agnès Schaeffer s’est profondément impliqué dans une collaboration féconde et concrète. La fidèle affluence à ces manifestations culturelles exigeantes et variées témoigne d’une réelle attente de l’unité entre les chrétiens.
J-P.V