La Déclaration sur les migrations du Conseil d’Eglises Chrétiennes de France rappelle des principes fondamentaux sur cette question difficile. Elle souligne que le phénomène des migrations est révélateur des inégalités persistantes entre Nord et Sud ; elle rappelle que les personnes sans papiers ne sont pas sans droit, concernant la vie en famille, l’accès aux soins et la scolarisation des enfants ; elle attire l’attention sur des mesures d’arrestation, de rétention et d’expulsion, choquantes surtout quand elles touchent des familles, des enfants.
Certes, il est de la responsabilité des Etats et des responsables politiques, de définir une politique de l’immigration, car l’accueil des étrangers ne peut être sans limite, si on veut que cet accueil soit convenable et respectueux des personnes et de leur culture.
Tout récemment, l’Europe a été amenée à définir une politique commune plus contraignante par exemple en ce qui concerne la durée de rétention administrative ; notre pays, comme l’Europe ne risquent-ils pas de s’écarter des valeurs de respect de la dignité de chaque personne, en se concentrant d’abord sur l’économique ?
Depuis longtemps, les Eglises tirent le signal d’alerte sur ce phénomène central de la mondialisation. L’Église catholique a publié en mai 2004 un document approuvé par Jean-Paul II , «La Charité du Christ envers les Migrants». Le Conseil Pontifical pour les migrants a tenu une séance en mai dernier, où il évoque les conséquences des migrations sur les familles : à commencer par le risque de désagrégation de la cellule familiale. «Nous ne soulignerons jamais assez le fait que les migrants sont des personnes qui jouissent d’une dignité humaine inaliénable». Et il appelle à la formation des chrétiens sur ce sujet (*).
Une communauté franciscaine de Toulouse a développé des «Cercles de Silence», manifestations de silence et de prière, pour dénoncer la condition des personnes étrangères en situation irrégulière. Parce que la question des sans-papiers et de leur expulsion se pose aussi dans les Vosges, un tel Cercle est né voici quelques semaines à Epinal dans le but de protester contre les conséquences humaines de démarches d’expulsion. À ce Cercle participaient chrétiens et non-chrétiens. Ne faut-il pas prêter l’oreille à ces signaux d’alerte, à une époque où les difficultés socio-économiques demeurent et risquent de nous faire oublier les difficultés propres aux sans-papiers ?
Je conclurai avec Mgr Vingt-Trois, à l’ouverture de l’Assemblée de Lourdes du 1er avril : « Une personne qui ne réunit pas les conditions d’accueil sur notre territoire ne cesse pas pour autant d’être une personne humaine, un homme, une femme, un enfant, que l’on doit respecter et traiter avec dignité. Une personne ne peut pas être détenue dans des conditions inhumaines. L’Église se félicite que de nombreux catholiques soient engagés sur ce front de la solidarité. Elle encourage les fonctionnaires et membres des forces de l’ordre qui exécutent leur mission en respectant les personnes concernées. Elle appelle les communautés locales à réfléchir et à agir pour venir en aide à ceux qui ont mis leur espoir, leur ultime espoir, dans le risque de l’immigration. Elle soutient les femmes et les hommes politiques dans leur implication pour cette cause, même si elle n’est pas très rentable électoralement. »
+ Jean-Paul MATHIEU
(*) Parmi les organismes de formation, les Jésuites du CERAS annoncent pour les 9 à 12 janvier 2009 : « Migrants dans la mondialisation ».