Le cinéma a toujours été un art précieux pour ouvrir le débat. « Culture et Foi » pour son édition 2010 a retenu cinq films du mercredi 17 au mardi 30 mars 2010, au cinéma Palace à Epinal, les projections seront suivies de débats autour de 5 films :
L'Edito d'Alain Cuny
Paix aux hommes de bonne volonté
Le concert suppose l'harmonie, sans nier la différence. Mais dans "D'une seule voix" (film avec 5 récompenses internationales), l'espérance utopique la plus ancrée au cœur de l'homme, celle de la paix, est illustrée dans ce film où palestiniens et israéliens, des juifs, des musulmans, des chrétiens, un prêtre arménien sont capables de porter cette espérance toujours à renaître.
Certes, des murs demeurent, mais depuis que le grand metteur en scène Ken Loach laboure inlassablement la pauvreté, la précarité, le chômage, la dépression en Angleterre ("Raining Stones", "Lady Bird” et aussi "Just a Kiss"), qu'il montre aussi qu'il n'y a pas que des impasses, l'espérance et des réconciliations s'opèrent, des catholiques irlandais, et musulmans pakistanais peuvent dépasser les préjugés culturels et religieux, et nous pouvons encore le suivre dans cette parabole en quelque sorte ("Looking for Eric") où un Eric va se confier à un autre Eric (Eric Cantona). Et Cantona est alors un "bon génie" médiateur de solidarité, aidant notre premier Eric à avoir le courage d'affronter plusieurs situations difficiles, dans cette comédie tendre et positive.
Les deux autres films que Culture et Foi vous propose jouent plus individuel : Dans "Slumdog millionaire", ce jeune indien qui joue va décrocher le gros lot, mais l'intérêt du film est de faire défiler à travers lui la pauvreté de l'Inde sous plusieurs angles et c'est d'ailleurs sa propre connaissance du milieu qui va le faire gagner. En temps de crise, le rêve de pouvoir gagner le gros lot fait se multiplier les jeux d'argent. Avec illusion sans doute, mais il n'est pas inutile d'en débattre, et ce film permettra aussi l'approche contrastée de l'Inde, où des situations de richesse côtoient l'extrême pauvreté.
Nous sommes sans doute un peu redescendus sur terre : c'est aussi l'expérience de l'héroïne de "Hadewijch" (Prix de la critique internationale de Toronto), Céline qui dans sa quête spirituelle va passer du mysticisme exaltant, voire exalté, au couvent, à un retour sur terre et dans le monde charnel. Bruno Dumont montre ici, non pas le Nord de la France dans la violence et la pauvreté en banlieue défavorisée, mais l'itinéraire d'une jeune fille de bonne famille désemparée, avec sa soif de transcendance, puis son errance et ses dérives.
Du couvent, puis en côtoyant l'islamisme radical et le passage au Liban, finalement Céline retrouvera le couvent des Flandres. Cet itinéraire lui servira de thérapie, voire d'exorcisme. Elle doit aussi se réconcilier avec elle-même et le Christ, par le passage au réel et aux autres. De plus, mais sans débat particulier, laissez-vous "séduire" par le film "Goodbye Solo" dans la rencontre atypique de Solo et William dans l'amitié, la bonté et la promesse d'avenir.
Bonne quinzaine ''Culture et Foi"
Abbé Alain Cuny
Au programme
- D’une seule voix de Xavier De Lauzanne
- Goodbye Solo de Ramin Bahrani
- Looking for Eric de Ken Loach
- Slumdog millionaire de Danny Boyle
- Hadewijch de Bruno Dumont
D’une seule voix
Lundi 22 mars à 20h15
Documentaire de Xavier DE LAUZANNE avec Jean-Yves Labat de Rossi…
Israéliens et Palestiniens, juifs, chrétiens et musulmans, ils sont avant tout musiciens. Partant du constat qu'il est maintenant impossible pour eux de se rencontrer en Israël ou dans les Territoires Palestiniens, Jean-Yves Labat de Rossi, vieux routard de la musique, va les chercher chez eux, de part et d'autre du mur, pour les inviter à une tournée surprenante qui les réunira en France pendant trois semaines. Un pari audacieux qui se révèle rapidement risqué.
Dès le début de la tournée, les rivalités apparaissent inévitablement. Sur scène, c'est un triomphe alors que dans les coulisses, le ton monte. Mais cette promiscuité à laquelle ils ne peuvent échapper les contraint, malgré tout, à communiquer. L'exaspération liée à la fatigue de la tournée et aux antagonismes politiques se transforme progressivement en liens qui se tissent et dont la musique est le fil de trame…
C'est avec eux tous que l'on aimerait chanter, pour Noël. Avec cette chorale de Gaza, avec ce chœur d'enfants d'Israël, avec ce couple de chanteurs, elle israélienne, lui arabe d'Israël, avec ce prêtre arménien, avec ces Palestiniens, ces juifs, ces musulmans, ces chrétiens, ces joueurs de guitare, de percussions. Ils portèrent, il y a quelques années, l'espérance utopique la plus ancrée au cœur de l'homme, celle de la paix.
De ville en ville, en France, un ancien rocker complètement naïf, un vrai fêlé déraisonnable comme le sont les prophètes, un "woodstockien" revenu des seventies, les avait rassemblés pour se produire ensemble sur nos scènes. Et son énergie, son entregent, sa force de persuasion, cela avait donné un film, " D'une seule voix ".
Et ce film, à son tour, se promène chez nous de ville en ville dans une discrétion excessive. Elle mérite d'être rompue. Le silence relatif autour de ce film, il faut que chacun de nous contribue à le briser. Ce n'est pas un sacrifice, pas une "BA ", mais une évidence doublée d'un vrai plaisir. On en sort bouleversé d'amour et de crainte. Beau film d'espérance, en effet, et de difficultés.
Énervement, interminables trajets en autobus, incompréhension parfois quand un chanteur palestinien, pour répondre à une provocation de la salle, fait le signe de la victoire qui, pour un Israélien, paraît un défi odieux, signe de reconnaissance du terrorisme.
Explications orageuses. Dialogues esquissés, avec traduction (ils vivent là-bas à quelques kilomètres les uns des autres mais bien des murs les séparent, à commencer par celui de la langue). Moments de grâce aussi quand, en coulisses, des jeunes Israéliennes esquissent des pas de danse tandis que sur la scène des Palestiniens rythment leur chant… " (La Croix)
France – 2009 – 1h23
Goodbye Solo
Comédie, drame de Ramin BAHRANI avec Souleymane Sy Savane, Red West…
Winston Salem, Caroline du Nord. Solo, jeune chauffeur de taxi d'origine sénégalaise, est engagé pour une course très spéciale: William, vieil homme sombre et taciturne, lui demande de le conduire deux semaines plus tard au sommet de la montagne "Blowing Rock". Sans retour. Bien décidé à lui faire changer d'avis, Solo décide d'entrer dans la vie de William en devenant son chauffeur attitré. Il espère ainsi garder un œil sur lui et découvrir ses secrets. Pour William, le vieux rocker sudiste, le Rêve américain n'est plus qu'un passé amer, pour Solo c'est encore une promesse d'avenir. _Malgré leurs différences les deux hommes vont apprendre à s'apprécier. Cette amitié inattendue sauvera-t-elle William ? “Se laisser conduire dans cette histoire magnifique entre un septuagénaire blessé par la vie et ce jeune chauffeur de taxi. "Goodbye Solo" est peut être un des plus beaux films sur les secrets de famille, sur la bonté, enfin sur l'amitié." (Le Figaroscope) "Après "Chop Shop", (...) le réalisateur Ramin Bahrani réalise un film plus abouti, à l'intrigue originale et aux personnages dessinés avec force et subtilité, incarnés par des acteurs atypiques et habités.” (La Croix) USA - 2008 - 1h31 En version originale (américaine) sous-titrée
Looking for Eric
Mercredi 17 mars 19h30
Comédie dramatique de Ken LOACH avec Eric Cantona, Steve Evets…
“Eric Bishop, postier à Manchester, file un mauvais coton. Tournant autour d'un rond point, il finit par avoir un accident. Après un passage à l'hôpital, il retrouve sa maison, où règnent le désordre et Ryan et Jess, ses deux beaux-fils adolescents, qui ne lui accordent aucune autorité.
La journée, il traîne sa dépression au centre de tri. Ses copains essaient de le faire rire et de l'aider, en vain. Un soir où il fume de l'herbe, volée à Ryan, Eric voit apparaître dans sa chambre son idole : Éric Cantona. Il se confie à lui : il y a quelque temps sa fille, Sam, leur a demandé à lui et son ex-femme, Lily, de garder à tour de rôle son bébé pendant qu'elle prépare un examen. C'est ainsi qu'Eric a été amené à revoir Lily, qu'il ne se pardonne pas d'avoir quittée.
Cantona donne à Eric le courage d'affronter cette situation. Eric et Lily réussissent à se revoir, à se parler, à s'expliquer sur le passé... Apparaissant comme un génie dans la fumée d'un joint, Éric Cantona devient le coach d'un post dépressif de Manchester, Une idée drôle, bien exploitée dans cette comédie tendre et positive…” (Les fiches du cinéma)
France, Grande-Bretagne, Belgique, Italie - 2008 - 1h59
Version originale (anglaise) sous-titrée
Slumdog millionaire
Mercredi 24 mars 19h
Comédie dramatique, romance de Danny BOYLE avec Dev Patel, Mia Drake...
Jamal Malik, 18 ans, orphelin vivant dans les taudis de Mumbai, est sur le point de remporter la somme colossale de 20 millions de roupies lors de la version indienne de l'émission Qui veut gagner des millions ? Il n'est plus qu'à une question de la victoire lorsque la police l'arrête sur un soupçon de tricherie. Sommé de justifier ses bonnes réponses, Jamal explique d'où lui viennent ses connaissances et raconte sa vie dans la rue, ses histoires de famille et même celle de cette fille dont il est tombé amoureux et qu'il a perdue.
Mais comment ce jeune homme est-il parvenu en finale d'une émission de télévision ? La réponse ne fait pas partie du jeu, mais elle est passionnante... Adaptée du roman indien de Vikas Swarup "les fabuleuses aventures d'un indien malchanceux qui devint milliardaire", cette épopée débordante de rythme et de grands sentiments (comme à Bollywood), nous fait plonger dans une Inde d'aujourd'hui vue par des blancs : pas vraiment une carte postale, mais une plongée dans le monde coloré et cru des gangs, des affrontements religieux, de la corruption immobilière et du trafic d'enfants. "Un grand film populaire, attachant et bourré d'énergie" (Le canard enchainé). "Le premier chef d'œuvre mondialisé du monde cinématographique" (Wall Street journal). "Un récit invraisemblable qui souligne, involontairement, la cruauté d'une réalité très peu glamour" (Télérama).
Grande-Bretagne, USA - 2008 - 2h
Version originale (anglaise) sous-titrée
Hadewijch
Vendredi 26 mars 20h15
Drame de Bruno DUMONT avec Julie Sokolowski, Karl Sarafidis...
“C'est quoi, un film qui a la grâce ? Un film à la fois grave et aérien, simple et profond. _ Un film qui vous transporte. Ainsi est "Hadewijch" qui épouse le parcours de Céline, jeune fille éprise d'absolu et amoureuse du Christ. Retraitante dans un couvent, elle tente de trouver Dieu dans la mortification. Les sœurs l'invitent plutôt à le rencontrer en allant à travers le monde.
De retour à Paris, Céline va croiser un jeune beur de banlieue dont le frère professe un islamisme radical: "Dieu est justice et nous sommes son glaive. " La route de Céline passera alors par le Liban, avant de se clore par un retour dans le couvent des Flandres.
Le temps d'une brève scène se produit bien une explosion. Un attentat... Mais il faut se garder de toute lecture littérale : "Hadewijch" n'est pas un film politique. Il parle de l'humain en empruntant le langage de la poésie et de la métaphysique. Et dit avec une merveilleuse acuité la souffrance liée à l'absence de l'être aimé, mais invite aussi à la découverte d'un sacré qui s'incarne en toute vie. Une œuvre ouverte à l'interprétation, réceptacle émouvant de nos interrogations, profanes ou religieuses.” (La vie) "Hadewijch" marque sans doute un tournant dans la carrière de Bruno Dumont, auteur d'une œuvre exigeante, austère, de loin l'une des plus stimulantes du cinéma français de ces dernières années." (Charlie Hebdo)
France - 2009 - 1h45