Le Pape Benoit XVI a publié ce mardi 7 juillet 2009 l'encyclique "Caritas in Veritate" (La charité dans la Vérité). Ce document constitue une référence pour l'Eglise, enrichissant sa doctrine sociale. Premiers éclairages du Père Jean-Paul Mathieu, évêque de Saint-Dié.
La charité dans la vérité
Voici la nouvelle mise à jour de la position de l'Église sur la grande question sociale du développement. Un document profond et exigeant.
Après le Concile Vatican II et la réflexion des papes qui ont suivi, Benoît XVI revient sur l'apport de Paul VI sur le développement. Le contexte a beaucoup changé : au lendemain du Concile, à la fin des années 60, on parlait du « progrès »... Mais dès les années 70, la crise du pétrole a donné le départ des remises en question... , jusqu'à la crise financière actuelle. La mondialisation a rendu évidente l'interdépendance planétaire et nous engage sur des chemins de solidarité qui vont loin. Dès lors la question du développement n'est plus un problème à résoudre parmi tant d'autres : elle s'élargit pour devenir « développement humain intégral », et concerne toutes les dimensions de l'homme : conditions de vie et de travail, liberté personnelle et démocratique, capacité spirituelle... Le développement : les questions économiques ne se règlent pas toutes seules. Bien sûr, il y a l'économie de marché et ses règles, qui ne sont pas sans danger. Il y a la régulation apportée par le politique, avec ses lois, et ses moyens de redistribution (l'impôt) : le politique a aussi ses limites. Selon Benoît XVI, il faut compter sur la responsabilité de l'homme, sur sa capacité à vivre la gratuité et à faire place au don dans les relations économiques. L'horizon du « bien commun » n'est plus envisagé dans les limites familières d'une région ou d'un pays, mais à l'échelle planétaire. Car tout homme est un frère. Il est vaste, le champ de la charité. Adressée à tous les « hommes de bonne volonté », cette lettre se fonde en effet sur « la charité dans la vérité ». La vérité, car il faut mettre la raison au service de l'amour aussi bien chez les chercheurs, les financiers, les politiques...
Et il faut éclairer notre vision de l'homme à la lumière de l'Évangile. Benoît XVI invoque le « sens » de l'homme. Réduit à soi-même, à son habileté technique, à sa capacité à vivre un consensus politique, l'homme s'étiole. Tandis que s'il se perçoit comme « don de Dieu », sa capacité humaine prend toute sa dimension de liberté personnelle, et au sein de la famille humaine. Nous sommes dans la ligne de la première encyclique de Benoît XVI, « Dieu est amour », qui développait cette conception de l'homme cohérente avec la foi au Christ. Nous sommes dans la ligne de la recherche permanente du Cardinal Ratzinger et du pape qu'il est devenu, le lien entre foi et raison.
Cette encyclique nous apporte de quoi nourrir nos dialogues et nos rencontres avec « les hommes de bonne volonté », nos partenaires dans l'action. Elle aborde de nombreuses questions concrètes, pour le développement humain intégral. On évoque ainsi toutes les questions du développement, du travail et des délocalisations, de l'interaction des cultures, de la situation des pays pauvres confrontés à la faim, au problème de l'eau, du respect de la vie, de la liberté religieuse, du développement scientifique, du progrès, de l'écologie, de la mondialisation... Cette encyclique ouvre ainsi un large chantier qui envisage l'avenir sans défaitisme. À tous de s'y mettre, les politiques, les acteurs associatifs, chaque citoyen, chaque chrétien. Bonne lecture.
+Jean-Paul Mathieu, évêque de Saint-Dié
Pour ceux qui veulent une lecture rapide : voir le dossier spécial de la Conférence des Evêques de France ou de La Croix
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