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Il faut croire en soi

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Bientôt les jeux olympiques. Comment s’y prépare-t-on ? Le bressaud Daniel Claudon témoigne de son expérience de champion et d’entraîneur de biathlon. Pour lui, le sport doit rester un plaisir.

Cet article a été publié dans le magazine « Église dans les Vosges ». En vous abonnant , vous êtes informé-e et vous soutenez l’information et le dialogue dans le diocèse.

Fusil au dos, ils filent comme des flèches. Puis ils s’allongent sur la neige, visent, appuient, puis reprennent leur course. “Comment font-ils pour tirer et skier ?”, s’émerveille le profane. “Rien de dur”, réplique Daniel. “Si l’on a un bon état physique, on peut tirer en biathlon tout en étant essoufflé. A trop réfléchir, la concentration diminue !” Pour tenir le choc, “Il faut s’oxygéner en prenant de grandes inspirations puis expirations !”

Voilà. A entendre le vétéran, le biathlon, c’est simple comme bonjour. Une simple question de travail, d’entraînement, de connaissance et de maîtrise de soi. De plaisir aussi. Le ski, pour le jeune paysan de La Bresse, c’était l’opportunité d’une sortie : “Je vivais dans une ferme retirée.” Ni télé, ni internet dans les années 50 : “Nos parents ont eu une vie très dure : l’usine à douze ans, un double travail.” On s’entraidait : “Tout le monde participait à la vie de la famille.” L’éducation de l’enfance compte beaucoup : “On n’attachait pas beaucoup d’importance à la souffrance physique : on sait que ça passe.” De quoi favoriser l’éclosion de la graine de champion.

Tireur le plus rapide

Le sport, c’est une fenêtre sur le monde. C’est aussi une scène où l’on peut s’exprimer. Moyennant pas mal de répétitions. Adolescent, Daniel s’exerce au tir en solitaire, “dans un coin de sa maison”. Histoire de progresser dans la maîtrise de sa technique : “J’étais passionné par le tir. J’y passais beaucoup de temps. J’avais un chronomètre, je m’entraînais pour être le meilleur. Si on n’a pas le mental en matière d’effort à l’entraînement, on n’y arrive pas en compétition.”

En 1964, Daniel se lance pour de bon : “Je suis entré dans la brigade spéciale des Douanes ; ainsi, je pouvais faire de la compétition”. Devenu le tireur le plus rapide du circuit, il livre volontiers ses secrets à ses coéquipiers du relais, passant outre les inévitables jalousies et rivalités. Les résultats suivent. Individuels et collectifs. En 1968, le Vosgien retrouve son “jumeau” Jean-Claude Killy aux Jeux Olympiques de Grenoble : “Il est né le même jour et la même année que moi ! Lui était sélectionné pour l’alpin, moi pour le biathlon.” Le relais décroche la dixième place au classement général.

Un message de plaisir

En 1970, Daniel, classé meilleur tireur, arrache une 5e place au championnat du monde individuel, et l’équipe de relais vosgienne remporte le championnat de France. L’année suivante, l’athlète Bressaud se hisse à la 4e place aux championnats du monde : une profonde satisfaction. En 1973, il arrête la compétition pour raison de santé. Il devient entraîneur de l’équipe nationale des juniors. Son message auprès des jeunes ? “Le plaisir ! Pour accéder au haut niveau, il faut beaucoup de travail, des années de préparation – et beaucoup de temps, mais un temps ludique, dans un esprit de jeu, d’émulation entre athlètes, sans chercher la performance immédiate.”
Avec ses ouailles, l’entraîneur insiste sur la technique, la nécessité de bien se connaître pour savoir ses limites : “Il faut croire en soi. Certains athlètes gèrent très bien l’effort dans la course, entre tir et vitesse de ski. En compétition, on oublie le championnat ou la coupe du monde : on vit dans sa bulle. On fait son schéma de tir, on est dans son tir.”

Accepter la vie

Près de 40 ans après, Daniel vibre encore de la passion qui l’a si longtemps animé au service des jeunes et de ses complices du relais. Le temps a passé. Le sélectionné des JO de Grenoble a vu partir, non sans déchirement, ses compagnons de la grande aventure du ski vosgien au cours des années 70 : les fondeurs Luc Colin, de Bussang, Michel Didierlaurent, de Rochesson, et Philippe Baradel, de Gérardmer. Disparus également, son complice de l’équipe de biathlon, Jean-Claude Viry, les frères Gervais Poirot et tout récemment le rayonnant Gilbert Poirot, auquel il restait très lié. Autant de Vosgiens foncièrement dévoués à la cause des jeunes et du sport. De quoi méditer sur les valeurs authentiques de la vie : la culture des vertus sportives a généré de nombreux fruits.
Contrairement à certains athlètes, issus d’Europe de l’Est, les skieurs français ont toujours rejeté le recours aux produits dopants. Une pépinière de champions, à l’instar d’Yvon Mougel, de Rochesson, a éclos sur la trace des pionniers vosgiens. Toujours moniteur de ski à Gérardmer, Daniel Claudon continue à communiquer sa flamme avec passion. Animateur de l’équipe pastorale de la Bresse, il souligne que le sport aide à accepter les aléas de la vie : “Je suis dans l’acceptation de la vie comme elle est, dans l’acceptation de la difficulté ou de bonnes choses. La vie est quand même quelque chose d’extraordinaire !”

La foi est-elle un soutien quand on est sportif ? Désormais, on voit couramment des joueurs de tennis et de football faire le signe de croix avant de se lancer dans l’arène : “À mon époque, je voyais rarement des athlètes se signer ! Que des sportifs osent afficher leur foi, c’est quand même une nouveauté”, observe Daniel Claudon : “Aujourd’hui, on affirme plus sa foi, on en parle plus, ce n’est plus tabou”.

Cet article a été publié dans le magazine « Eglise dans les Vosges ». En vous abonnant , vous soutenez et favorisez la circulation de l’information et le dialogue dans le diocèse.

Publié le 01/03/2012 par Alice.