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Jean Belambo : "Allons vers ce jour nouveau !"

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De République Démocratique du Congo où il y a vu le jour au sein d’une fratrie de 6 frères et soeurs, Jean Belambo a conservé dans son sourire toute la chaleur d’un soleil ardent.

Issu d’une famille très chrétienne, il confie que la vocation germa naturellement. “J’ai été enfant de choeur, puis j’ai intégré la pastorale “Les Jeunes de Lumière”. Avec des engagements progressifs, ces activités vous plongent dans le bain... À la maison, l’ambiance m’a permis d’évoluer dans une pratique de la foi qui me stimulait. Nous côtoyions des prêtres, nous avions envie de suivre leur exemple... J’ai fait le choix de cette aventure avec joie, mais il me fallait quitter les miens et partir loin. Mes parents ne s’y sont pas opposés, ils m’ont soutenu par la prière…”

Sa propédeutique terminée, le jeune homme entre au séminaire pour y étudier trois ans la philosophie, puis quatre ans la théologie. Le religieux garde en mémoire avec émotion la prise de sa soutane blanche. “En Afrique, dans nos villages, les habitants apprécient ceux qui portent le vêtement. Sans être accro, j’aime la revêtir.” Un an de stage conclut cette période, mais la guerre contre le président Mobutu retarda l’évènement tant attendu. Ordonné diacre, Jean Belambo devint prêtre le 3 août 1997. “Ce jour-là, six diacres furent ordonnés, j’étais l’unique prêtre et le seul enfant de mon village à l’être devenu, autour de moi les gens étaient fiers et heureux…” La cérémonie terminée, Jean Belambo rentra à Kolé, siège de son diocèse de rattachement. Nommé vicaire de la paroisse Saint- Paul et prêtre référent de celle de Saint- Joseph, il trouva vite ses marques. Les rebelles progressaient à l’intérieur des terres et commettaient toutes sortes d’exactions envers la population, ils pillaient en semant la terreur sur leur pas- sage. “En 1999, il fallut se résoudre à nous cacher, notre évêque a sollicité la présence de deux prêtres volontaires dans notre évêché. Un collègue et moi avons été candidats. Presque toute la population se cachait dans la forêt… La Force Armée Congolaise était en débandade, ils ont tout mis à sac… Une nuit, j’ai dû sortir en pyjama… Un mois plus tard, les rebelles du Rassemblement Congolais pour la Démocratie sont entrés dans la ville… En fait, il s’agissait d’une invasion étrangère hétéroclite… Ils ont trompé leur monde en arrivant tout doux, une semaine plus tard, c’était l’horreur ! Nos vies étaient en danger... Nous ne dormions jamais à la même place… Des chrétiens nous donnaient l’asile, nous nous réfugiions dans des salles de classe vides… Des cauchemars me hantaient … Il arrivait que des gens collaborent avec les insurgés. Nous étions pris en otage, dans un endroit entouré d’eau… Finalement, je me suis échappé, j’ai rejoint un village allié où un homme possédait une barque… il a accepté de me transporter, quelqu’un m’attendait de l’autre côté avec une bicyclette, j’ai pédalé, pédalé…jusqu’à rejoindre mon village natal…”

Démuni de papiers d’identité, sans aucun document et sans argent, Jean Belambo prit contact avec un prêtre allemand. Ce dernier lui apporta de l’aide pour obtenir une feuille de route jusqu’à Kinshasa. En décembre 1999, le prêtre atteint la capitale. “Là c’était le calme, pas de troubles…” La paix fut rétablie en l’an 2000 et douze mois après, le Père Belambo fut désigné responsable diocésain des établissements scolaires. Une lourde charge qu’il accepta en prenant sous sa houlette 172 écoles maternelles, primaires et secondaires conventionnées catholiques. Jean Belambo est de ces hommes qui veulent progresser. En 2005, il quitte sa fonction pour rejoindre l’Europe afin de s’y spécialiser dans les études. Ce sera Burgos en Espagne, où il retrouve un camarade et réalise un Master de théologie, Licence canonique. Il accède au Doctorat et vient à l’Université catholique de Rennes en 2007, il prend ensuite la direction de l’Alsace où il soutiendra en 2013 sa thèse intitulée “La réception de la théorie de l’évolution dans la théologie catholique du 20e siècle” autrement dit, comment articuler les acquis scientifiques avec l’évolution de la théologie et comment parler de Dieu avec la théorie de l’évolution et ce que nous dit la science.

Ne pas tomber dans le piège

Le diocèse de Saint-Dié est apparu à Jean comme un endroit opportun à son installation. “J’ai eu contact avec le vicaire général Claude Durupt, puis j’ai rencontré Mgr Mathieu. Ce jour-là j’ai été invité à sa table avec l’ami qui m’accompagnait. C’est un geste qui m’a marqué.” La paroisse de Saulxures-Thiefosse sera confiée au prêtre. L’accueil qui lui fut réservé lui est allé droit au coeur. Toute l’équipe paroissiale réunie autour de l’abbé Arnauld Meyer l’attendait. “J’ai été très touché… Je suis entouré par une équipe paroissiale dévouée et je crois que la population m’a bien accepté… Bien sûr les miens, mon village, mes habitudes de vie me manquent, il faut accepter… Je ne veux pas tomber dans le piège de tenter d’importer l’Afrique en Europe. Si le fondement est identique, le rituel, la gestuelle de l’expression religieuse sont très différents…” Dans le grand presbytère où il vit, le prêtre passe beaucoup de temps à peaufiner sa soutenance qu’il souhaite publier dans une version accessible au plus grand nombre. Jean refuse les lieux communs. D’une grande culture, il mûrit sa réflexion en se nourrissant des Écrits et de son expérience du monde. “La perfection est devant nous. Nous avons à construire notre histoire au quotidien, nous avons à construire le Royaume de Dieu au travers des actes d’amour et d’amitié...”

Josée Tomasi-Houillon

Tous ces articles ont été publiés dans le magazine « Eglise dans les Vosges ». En vous abonnant , vous soutenez l’information et le dialogue dans le diocèse.

Publié le 29/01/2015 par josee.