Repères encyclique :
S'exprimer en quelques lignes sur un texte qui traduit la pensée "officielle" de l'Église n'est pas chose facile.
D'abord parce que chacun va le lire à partir de ce qu'il est, son histoire, ses préoccupations, sa sensibilité.
C'est donc à partir de ces "a priori" que j'ai essayé de décrypter ce qui est dit à travers un condensé souvent synthétique récupéré sur le site de la Conférence des Évêques de France :
Raison de plus pour que chacun s'approprie ce texte. Daniel HUG
Sur l'amour…
Le terme "amour", un des mots le plus utilisé et le plus souvent abusivement dans le monde d'aujourd'hui, possède un vaste champ sémantique. Cependant l'archétype de l'amour par excellence, celui entre l'homme et la femme, domine la multiplicité de ces sens, et il était appelé Éros dans la Grèce antique. Dans la Bible, et surtout dans le Nouveau Testament, le concept d' " amour " est approfondi, évolution qui s'exprime par l'abandon du mot Éros en faveur du mot Agapé qui exprime un amour oblatif.
La foi chrétienne a toujours considéré l'homme comme l'être dans lequel l'esprit et la matière s'interpénètrent, lui conférant une nouvelle noblesse. On peut considérer le défis de l'Éros vaincu quand le corps et l'âme de l'homme se retrouvent en parfaite harmonie. L'amour devient alors, 'extase', mais pas dans le sens d'un moment d'ébriété passagère mais comme exode permanent du moi fermé sur soi vers sa libération dans le don de soi, et donc vers la redécouverte de soi, ou plutôt vers la découverte de Dieu: de cette façon l'Eros peut conduire l'être humain 'en extase' vers le divin.
Sur l'organisation sociale…
A partir du XIX siècle, une objection fondamentale s'est levée contre l'activité caritative de l'Église car elle serait en opposition, disait-on, avec la justice et qu'elle finirait par agir comme système de maintient du statu quo. L'Église favoriserait le maintien du système injuste en vigueur par l'accomplissement d'œuvre caritative individuelle, le rendant supportable et freinant ainsi la rébellion et le potentiel changement vers un monde meilleur.
C'est dans ce sens que le marxisme a indiqué dans la révolution mondiale et dans sa préparation la panacée pour le problème social -un rêve qui s'est évanouit avec le temps. Le magistère pontifical, en commençant par l'encyclique de Léon XIII: Rerum Novarum (1891), jusqu'à la trilogie d'encycliques sociales de Jean-Paul II: laborem, Exercens (1981), Sollicitudo Rei Socialis (1987) Centesimus Annus (1991), a affronté avec toujours plus d'insistance le problème social, et s'est confronté avec les situations problématiques toujours nouvelles, et il a développé une doctrine sociale très articulée qui propose des orientations valables bien au-delà des frontières de l'Église.
Sur l'exercice du pouvoir
Toutefois, la création d'un ordre juste de la société et de l'État est le principal devoir de la politique, et ne peut donc être une responsabilité immédiate de l'Église. la doctrine sociale catholique ne veut pas conférer à l'Église un pouvoir sur l'État, mais souhaite seulement purifier et illuminer la raison, en offrant la propre contribution à la formation des consciences, afin que les authentiques exigences de justice soient perçues,
Sur l'expression de la solidarité…
Un effet positif collatéral de la globalisation se manifeste de nos temps dans la sollicitude envers le prochain, dépassant les frontières des communautés nationales et qui tend à élargir son horizon au monde entier. Les structures de l'État et des associations humanitaires développent de différentes façons la solidarité exprimée pour la société civile: ainsi de très nombreuses organisations à but caritatif et philanthropique sont nées. De plus, au sein de l'Église catholique et dans d'autres communautés ecclésiales de nouvelles activités caritatives ont pris forme. Il est fort souhaitable qu'une collaboration fructueuse s'instaure entre toutes ces instances. Naturellement il est important que l'activité caritative de l'Église ne perde pas sa propre identité en se dissolvant dans l'organisation commune d'assistance, en devenant une simple variante, mais qu'elle conserve toute la splendeur de l'essence de la charité chrétienne et ecclésiale.
Sur le particularisme chrétien…
L'activité caritative chrétienne doit être indépendante de partis et d'idéologies. Le programme du chrétien -le programme du bon samaritain, le programme de Jésus- est 'un cœur qui voit'. Ce cœur voit là où il y a besoin d'amour et agit en conséquence. L'activité caritative chrétienne, en outre, ne doit pas être un moyen en fonction de ce qui est appelé aujourd'hui le prosélytisme. L'amour est gratuit; il n'est pas exercé pour atteindre d'autres objectifs. Mais cela ne signifie pas que l'action caritative doive, pour ainsi dire, laisser de côté Dieu et le Christ. Le chrétien connaît le moment opportun pour parler de Dieu et quand il ne faut pas en parler, mais seulement laisser parler l'amour. L'hymne de la charité de Saint Paul doit être la Magna Carta de tout le service ecclésial.
Sur la place de la prière…
Dans ce contexte, et face aux dangers du sécularisme qui peut conditionner également de nombreux chrétiens engagés dans le travail caritatif, il faut réaffirmer l'importance de la prière. Le contact vivant avec le Christ évite que l'expérience des considérables nécessités et des propres limites peuvent d'un côté pousser l'opérateur dans l'idéologie qui prétend de faire maintenant ce que Dieu, semble-t-il, ne réussit pas à faire et de l'autre côté, peuvent avoir la tentation de céder à l'inertie et à la résignation. Qui prie ne perd pas son temps, même si la situation semble ne pousser qu'à l'action, et sans prétendre de changer ou de corriger les plans de Dieu, mais il cherche -sur l'exemple de Marie et des saints- à puiser en Dieu la lumière et la force de l'amour qui vainc chaque obscurité et égoïsme présents dans le monde.