Ainsi, reçue, en octobre 39, au collège de Remiremont, vite occupé par les Allemands ainsi que les moyens de transport, nous y allions à bicyclette : 10 km aller et 10 le soir, par tous les temps, neige, vent, pluie… et cela pendant quatre ans, jusqu’au brevet. (…)
Après le bac (sciences) à l’École Normale, une année de formation et de stages nous permettait de nous lancer dans la vie et le métier d’institutrice. (…)
Ayant connu le frère instit d’une de mes camarades, je me suis mariée à 26 ans. Nous avons cherché un poste double et été nommés à Dompaire-Lavieville. : 2 classes de 30 élèves chacune, 4 à 8 et 8 à 14 ans.
La vieille école était une grande bâtisse, datant de 1930 environ, avec 2 classes au rez-dechaussée et le logement en haut. Comme confort, ce n’était pas merveilleux : une grande cuisine difficile à chauffer, l’eau à peine installée et j’attendais ma première fille. Je croyais partir à la fin de la 1ère année et nous y sommes restés 17 ans.
C’était assez loin du centre de Dompaire et des commerces, mais nous avons été vite adoptés. Le maître et la maîtresse étaient encore respectés et moi, avec mes petits, j’étais comme une seconde maman.
Je n’avais aucun matériel pour occuper les petits de 4 ans. Avec de la cartoline, je faisais le soir des étiquettes avec voyelles et consonnes et en faisant les leçons d’histoire, géographie, grammaire, je faisais montrer aux petits des syllabes et ainsi en 2ème année, ils savaient bien les associer de sorte que beaucoup savaient lire à 5 ans. Mais je ne les forçais pas.
L’histoire de Roland à Roncevaux avec son épée Durandal, les châteaux de la Loire, les serfs et les seigneurs et Jeanne-d’Arc… tout cela les ravissait. Je leur préparais aussi avec de la cartoline des dessins stylisés qu’ils piquaient avec une aiguille (quel danger) ou un poinçon !
Le soir en fin d’après-midi, je leur racontais une histoire ou un compte de Perrault ou de Grimm ou de Mme Loie. Ils étaient ravis.