Bien que le Saint-Mont, « Maison-mère » du chapitre de Remiremont qui l'a prolongé au-delà d'un millénaire, soit essentiellement un monastère féminin, nous n'avons encore parlé d'aucune Sainte y ayant vécu. De fait le Martyrologe Romain, qui a accueilli si largement Saint Romary et Saint Amé, s'est montré bien chiche à l'égard des religieuses du Saint-Mont, comme nous allons le voir.
Auparavant toutefois serait-il possible d'expliquer une pareille anomalie ? Alors que la plupart de ces Messieurs ont eu leur chroniqueur, trop souvent d'ailleurs un panégyriste du XIe siècle ! Aucune de ces Dames n'a fait l'objet d'une « Vie » spécialement écrite à sa mémoire. On ne les voit apparaître qu'à la dérobée et de façon occasionnelle à travers la « Vie » de ces hommes qui furent au départ du Saint-Mont.
Si ces derniers sont ainsi passé officiellement à la postérité, ce pourrait bien être en raison de leur attache très étroite avec l'abbaye de Luxeuil. Celle-ci, nous le savons, fut une des plus importantes des temps mérovingiens et se doublait d'un centre intellectuel fort attentif à recueillir les fastes de l'abbaye.
Par contre les pauvres moniales du Saint-Mont, perdues dans la forêt des Vosges, ne semblent guère avoir attiré du monde, sans être pour autant inférieures en sainteté, vouées qu'elles étaient à la pénitence, à la « laus perennis ». Et leur prière chantante et continue, clairement perçue de Dieu, nous en sommes convaincus, n'a guère trouvé d'écho auprès de ceux qui préparaient l'histoire.
Faut-il tenter aussi une autre explication, par analogie ? Il n'y a pas, que nous sachions, beaucoup de femmes au Panthéon, à Paris. L'inscription du fronton nous en prévient d'ailleurs ingénument : « Aux grands hommes la Patrie reconnaissante ! »
Raison de plus pour combler cette lacune et faire œuvre de réparation, en ménageant à quelques-unes d'entre elles une petite place parmi « les Saints de chez nous ». Il s'agit de sept Religieuses — la Pléiade du Saint-Mont ! — qui n'y ont pas résidé longtemps ou sur lesquelles nous n'avons que des données sporadiques : les Saintes Gébétrude, Claire, Macteflède, Perpétue, Modeste, Salaberge et Sabine.
Précisons tout de suite que le titre même de Sainte n'est attribué pour telle ou telle que par certains calendriers, colombanistes ou bénédictins, à l'exception toutefois de Sainte Modeste et Sainte Salaberge qui figurent au Martyrologe Romain.
Les courtes notices qui vont suivre n'entendent donc les « canoniser » aucunement. Elles visent seulement à refléter le culte populaire qui, durant des siècles, s'est attaché à leur mémoire, suppléant ainsi en quelque sorte à l'austérité de l'Histoire. Ces pieuses Moniales sont, pour tout dire, de petites étoiles lointaines et intermittentes de la constellation du Saint-Mont !