DOMREMY
Domremy ! Jeanne d’Arc ! Comment évoquer l’un sans murmurer l’autre ?
Berceau de Jeanne placé dans un des plus charmants sites de la vallée où serpente une Meuse encore enfant, le village de Domremy est ancien et remonte probablement à l’époque mérovingienne. De domnus : domaine, maison et remigius : Remy, Reims, Domnus Remigius, Donremei, Dompremi, ou encore Dom-Remy, est évoqué dans la fondation du prieuré de Châtenois dès 1069, par Hadwide de Namur, épouse de Gérard d’Alsace (dénommé aussi Gérard de Châtenois), qui y possédait un château où ladite princesse eut sa sépulture retrouvée en 1812. Ruiné au XIIème siècle lors des guerres du duc de Lorraine Charles IV, le village est également cité en 1235 et 1248 par Geoffroy de Bourlémont lorsqu’il donne à l’abbaye de Mureau ce qu’il possède dans les dîmes et les arages de Domremy. En 1420, il est question dans un titre de la maison forte de Domremy, château de l’Isle appartenant aux sires de Bourlémont.
Au XVème siècle, Domremy constituait une paroisse dont le curé figure parmi les témoins qui déposeront à l’enquête de 1456. Le village s’étendait alors au midi, à la gauche de la Meuse, vers le “ Vieux Foulon ”, attestant que le moulin et le foulon se trouvaient bien là. A cette époque, le ruisseau des Trois Fontaines partageait le village avec au sud une partie appartenant aux sires de Bourlémont, dont les serfs et hommes de main morte constituaient 35 “ conduits ” (ou foyers) soumis aux corvées et redevances prévues en 1398. Ils y possédaient aussi une maison forte dans une île formée par deux bras de Meuse, constituée d’une cour avec ouvrages de défense, d’un grand jardin entouré de profonds et larges fossés, et, d’après le testament de Jean de Bourlémont daté de 1399, d’une chapelle dédiée à Notre Dame appelée chapelle de l’île de Domremy. La partie nord du village dépendait de la châtellenie de Vaucouleurs, rattachée au domaine royal par Charles V. L’église relevait de cette partie française de Domremy, en guerre en ce premier quart de XVème. Le bétail de Greux et Domremy fut enlevé en 1425, date coïncidant avec les évènements merveilleux survenus à Domremy. “ En juillet 1428, le village et l’église furent incendiés ”, dit la veuve Estellin au procès en 1456, témoignant que “ la Jeannette allait entendre la messe au village de Greux les jours de fête ” Trop petite, la paroisse de Domremy avait été unie à celle de Greux, et desservie par un unique curé résidant semble-t-il à Greux qui est la “majeure” paroisse. L’église de Greux alors située à mi-pente vers le nord en montant “ la chalade ”, fut détruite au XVIIème siècle par les suédois, puis reconstruite à son emplacement actuel en 1733. A l’époque de Jeanne comme aujourd’hui, “Greux ne fait qu’un avec Domremy”, une avenue d’arbres reste le trait d’union entre les deux grands’rues.
En juin 1818, le conseil général des Vosges acheta la maison de Jeanne d’Arc, et transforma totalement le site en rasant les maisons environnantes. Puis on s’attaqua à l’église voisine jugée insuffisante pour une population de 340 individus. Une subvention de 2000 francs fut accordée par le Roi en 1821, que le conseil municipal employa en partie à l’achat d’un terrain pour y transporter le cimetière, sans aller toutefois jusqu’à détruire l’église, une crainte exprimée au directeur des Cultes par lettre du 19 novembre 1821 de Grille de Beuzelin, archéologue futur secrétaire de la Commission des Monuments historiques ...Mais l’édifice fut profondément modifié, son orientation changée. Pour établir l’entrée du côté de la place aménagée devant la maison (1825) on supprima la sacristie pour pratiquer une porte au pied de la tour ; puis on construisit un transept, et un chœur se terminant par une abside à trois pans flanquée d’une sacristie. On refit la partie haute de la tour lézardée et on l’éleva à 12,90 m au lieu des 14,40 m antérieurs, et Charles X fit don d’une cloche (remplacée en 1868.) En supprimant le cimetière qui conférait une certaine poésie rustique, on supprima aussi le recueillement qu’imposent les vieilles tombes jouxtant “ le jardin de son père où Jeanne entendit ses voix ”
En 1847, on construisit le pont actuel qui permet au voyageur de contempler depuis le haut d’un vaste terre-plein, à la fois la demeure de Jeanne et l’église romane qui a entendu ses prières, et fut agrémenté sur la gauche, d’une statue d’Eugène Paul, inaugurée en 1860
En 1905, la façade fut peinte d’une grande fresque murale due au talent de M. Balze de Paris : Jeanne, entourée de ses brebis au bois chenu est absorbée par la vision d’un archange, à côté de Ste Catherine et Ste Marguerite retenant le léopard anglais enchaîné, sur fond de carte de France avec la couronne royale en berne. Bien que protégée par un petit avant toit, la fresque s’effaça au fil des années, devenant noire, puis blanche, jusqu’à disparaître avec l’avant toit.
Janvier 1956 : sous l’impulsion de P. Marot et M. Bodin qui préparent les fêtes du 5ème centenaire, le décor de Domremy s’anime en janvier 1956. En décrépissant l’église, on découvre deux fenêtres ogivales qui s’ouvriront sur l’autel de la Vierge et sur l’autel St Nicolas ; l’autel consacré à Jeanne d’Arc et le monument aux morts seront démontés, le monument Mercier émigrera du parc de la maison natale à l’entrée du pont, la statue d’Eugène Paul entre deux tilleuls sur la place… L’église abrite toujours le bénitier cylindrique roman, la statue de Ste Marguerite, les fonds baptismaux contemporains de Jeanne (XIVème) ainsi que la pierre tombale des Thiesselin (XVème), une fresque murale du martyre de St Sébastien de 1586 (découverte en 1904), une statue de la Vierge et de Ste Anne, les autels et retables latéraux du XVIIème, des statues de St Elophe (1709), de St Remi(XVIIIème), une réplique de la statue de Winchester représentant Jeanne en armure (offerte en 1924 par les anglais et les américains) et le “ Dernier Soupir ” de Real del Sarte(1929)
Depuis cette époque, la petite église s’était maintenue tant bien que mal, vieillissant pourtant, bien que l’objet des soins attentifs de Sœur Solange, fidèle sacristine de 1941 à 1999, et la municipalité décida une restauration amplement méritée, voire urgente en raison de l’état de délabrement de la toiture, dont une poutre faîtière notamment s’était rompue, provoquant un affaissement du toit côté sud.
Après une dizaine d’années d’études, un cahier des charges bien rempli, une restauration d’un montant de 900 000€ a été entreprise en 2005, qui s’est soldée par des travaux conséquents. Répartis sur trois ans, ils comprenaient la réfection extérieure (toiture de tuiles canales, pavés…etc) et intérieure : boiseries, éclairage, chauffage sous moquette, murs, voûtes, niches… Rien n’a échappé au badigeon des restaurateurs, conférant désormais au lieu une luminosité et un charme qui a l’agrément de tous les visiteurs.
L’inauguration officielle s’est faite en novembre 2008 au cours d’une messe solennelle célébrée par Mgr Mathieu et l’abbé Lambert, curé de la paroisse, en présence du Président du Conseil Général - Sénateur Poncelet, des Préfet, sous-Préfet, conseillers régionaux, généraux, députés, présidents d’associations, nombreuses personnalités et autres… accueillis par le maire de Domremy et son conseil municipal, maîtres d’ouvrage de ce projet rondement mené à bon terme. DMC