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S'écouter ...pour s'entendre

Ils ont "des oreilles et n'entendent pas,
des yeux et ne voient pas,
un cœur et ne s'émeuvent pas,
des entrailles et ne souffrent pas,
une intelligence et ne comprennent pas,
une volonté et ne s'en servent pas".

Autrement dit, il semble bien que ce problème ne soit pas nouveau.

On n'aime pas entendre; on refuse d'entendre ce qui nous gène, ce qui nous remet en cause, ce qui nous dérange. Et, en cette période électorale, chacun se sent agressé par les discours, les affirmations, les invectives de l'autre, celui qui n'est pas comme nous, qui ne pense pas comme nous.

ÉCOUTER

"C'est bien la chose qui paraît la plus simple et qui, pourtant, est la plus difficile.
L'antipathie, chacun connaît: celui ou celle que l'on n'aime pas, la tête "qui ne revient pas"
.
L'écoute demande des dispositions, un entraînement. Eh oui! comme beaucoup de choses, cela s'apprend.
Écouter, c'est d'abord faire abstraction (se retirer, s'oublier) soi-même: dépasser ses préjugés, son histoire, ses soucis, ses ambitions, ses intérêts, ses répulsions, ses dégoûts, etc. pour être totalement à l'écoute de l'autre, des autres.
Facile à dire ou à écrire, beaucoup plus difficile à faire.

ÉCOUTER, C'EST FAIRE DE LA PLACE EN SOI... POUR L'AUTRE

Et ce n'est pas si facile dans un monde ou, au contraire, tout nous incite, nous exhorte à être, à
paraître, à dominer, à imposer son point de vue, ses idées, ses actions. Bref, à prendre toute la place... et tant pis pour les autres !!...
Chacune, chacun a besoin de se dire. Encore faut-il (ou faut-elle) que quelqu'un (ou une) veuille bien l'écouter, reconnaître qu'il ou elle existe dans ses pensées, ses paroles et ses actes.
Il nous faut donc assumer cette contradiction:
Dire ce que nous sommes, Écouter l'autre nous dire ce qu'il est.

ENTENDRE

Être attentif à ce que l'autre veut me dire dans un langage qui, quelquefois, lui est propre, un langage "codé". "Il faut toucher avec ses yeux et voir avec ses mains" disait mon père. En fait, cela peut se traduire par un éveil de tous les sens à l'écoute de l'autre, à l'expression de l'autre. Une "moue" en dit quelquefois plus qu'un long discours... un sourire aussi !
Il y a mille et une manières de se faire entendre ou, pour le moins, traduire ses sentiments.

COMPRENDRE

(se prendre "avec", prendre en charge.)

Comprendre ce que l'autre veut me dire, c'est assimiler (ou essayer de le faire) ce que sont ses propres moyens d'expressions aussi bien à travers son langage, sa culture ou sa propre histoire. Et ce qu'il me dit, ce n'est pas forcément ce qu'il veut me faire "entendre" : ce n'est pas toujours évident de dire ce que l'on ressent.
(Par exemple, dans ma vie militante, j'ai rencontré des ouvriers qui se plaignaient de leur chef parce qu'ils ne savaient pas dire que le travail était mal organisé ou que "ça sentait mauvais" plutôt que de dire qu'il y avait un problème de ventilation. Je crois qu'en cherchant bien, chacun d'entre nous trouvera des exemples semblables.)

Bien sûr, cela est d'autant plus facile que l'on est plus proche dans son mode de vie, son parler, son héritage culturel.

St Paul le traduisait très bien lui qui était: " juif avec les juifs, grec avec les grecs, romain avec les romains ", mais aussi, dans les larmes avec ceux qui pleurent, joyeux avec ceux qui se réjouissent.
Mais là aussi, il faut savoir accepter ses propres limites. Personne n'est universel si ce n'est par l'Église, communauté de personnes vivant des situations différentes. Chacun et chacune y a une place et un rôle irremplaçable certes, mais différent et complémentaire.

COMMUNIER (vivre, agir comme UN)

Cela suppose que ce que l'on a reçu de l'autre par l'écoute, ce vide qui s'est fait en lui, soit comblé par notre propre "parole" même si, oh paradoxe, elle doit être "silence".

Et cela, c'est encore plus difficile.

Que faut-il que je lui dise de "moi" pour que l'autre vive ? mon temps, ma patience, mon confort, ma sécurité, mes habitudes de vie, mes certitudes, mes suffisances, mes pauvretés, ma médiocrité, mes doutes, mes joies, mes peines, mes soucis ? Et qu'ai-je en moi qui vaille la peine d'être donné ? Et d'être reçu et accepté, non comme une morale mais comme un partage, une part donnée ?

Que faut-il qui meure et qui s'épanouisse en moi pour que l'autre existe ?... C'est une affaire. de conscience pour chacun, chacune d'entre nous.

Accepter de se "perdre" pour que l'autre s'épanouisse, c'est une expérience d'amoureux. Mais, l'Amour, chacun sait que cela fait "voir et entendre" autre chose que ce que voient et entendent ceux qui nous entourent.

(Grâce à Dieu, la nature a fait l'homme et la femme suffisamment désirables l'un pour l'autre, pour que l'aveuglement de l'éclair et le tonnerre de la foudre fassent le reste... et, pour peu que l'orage dure...)

Mais, autre paradoxe pour ceux qui en font l'expérience, se perdre dans l'autre, c'est se retrouver plus "riche" de l'autre. Être deux et ne faire plus qu'un pour affronter les vicissitudes de la vie, quel merveilleux cheminement (signe, mystère ou sacrement, cela traduit la même chose).

Ce qui est vrai pour le couple ne le serait-il pas pour la relation entre d'autres personnes ?

IDÉALISME, FOLIE, dites-vous?

Pourquoi pas ?

"Ce qui est folie aux yeux des hommes est sagesse aux yeux de Dieu" dit l'écriture. Mais voilà, jusqu'à être parfaitement entraîné aux bons réflexes, que d'efforts d'attention de tous les instants, que de remises en cause de nos comportements!
"Malheureux homme que je suis" nous dit Saint Paul: "Je ne fais pas le bien que je voudrais faire et je fais le mal que je ne voudrais pas faire". .
Quelle humilité mais aussi, quelle lucidité.
Être conscient que le combat est permanent pour rester éveillé, attentif à la quête de l'autre et sans rien attendre en échange... même pas un bon réflexe. En son temps, le peuple a choisi entre Jésus et Barrabas!

FAUT-IL CONCLURE ?

J'admire toujours les personnes capables d'accueillir, d'écouter, de comprendre... sans prendre la fuite devant la misère humaine. Travailleurs sociaux, personnels de santé, visiteurs de malades ou de prisonniers mouvements caritatifs et/ou de secours, bref, tous ceux et celles, je ne voudrais oublier personne, qui se "frottent" à la détresse humaine, qu'elles soient rémunérées ou le fassent gratuitement... Que de patience, de dévouement, d'abnégation; que de courage aussi!
Qu'elles soient ici remerciées de faire ce que je ne me sens pas toujours capable de faire.

D H

Publié le 01/12/2006 par Admin.