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Vie diocesaine du 13 septembre 07

IL Y A CENT ANS.... LA CONGREGATION DES SŒURS DU PAUVRE ENFANT JESUS fêtait ses Noces d’Or à REMIREMONT

C’était une institution à Remiremont. Qui ne s’y souvient des « Sœurs de l’Orphelinat » et de leur troupeau de pupilles, éduquées patiemment dans le but de les armer pour la vie, non seulement sur le socle d’une Foi solide, mais aussi en leur inculquant les connaissances qui leur permettraient plus tard d’assurer matériellement leur subsistance. Les Sœurs – et il y avait parmi elles des artistes ! – faisaient tout pour transmettre leur science avec leur foi, en respectant les aptitudes de chacun des enfants qui leur étaient confiées.

LA FONDATION Fondée le 21 novembre 1857 à Charmois-L’Orgueilleux par celle qui devait être leur première Supérieure, la vénérable Mère Justine de Bonnay, et Monsieur l’abbé Joseph Micard, alors curé de la Paroisse, la Congrégation fêtait donc ses Noces d’Or à Remiremont le 28 novembre 1907, sous la présidence de Mgr Foucault. Cinquante ans auparavant, dix jeunes filles se prosternaient sur les dalles du petit oratoire qui serait le « berceau » de la Congrégation à Charmois, couronnées d’épines selon le cérémonial de ce temps-là, et promettaient de vivre dans la pauvreté, la chasteté, et l’obéissance religieuse, pour se faire les servantes et les mères des pauvres orphelines que la Providence leur enverrait. Deux d’entre elles étaient encore là pour les Noces d’Or : Sœur Marie Noël, Supérieure à Charmois, et Sœur Sophie Husson, infirmière à l’hospice de Belval ; une troisième, qui prenait l’habit au jour de la Profession de ses compagnes, Sœur Anne-Marie Kruss, exerçait encore les fonctions de sacristine à la Chapelle de Remiremont.

DEVELOPPEMENT DE L’INSTITUTION Prévoyant – comme ne le sont pas toujours les fondateurs ! – M. l’abbé Micard s’était entendu avec un confrère, M. l’abbé Nicolas Parmentier, alors curé d’Uzemain, pour constituer une société civile avec l’aide de deux autres prêtres, Messieurs les abbés Lambert Viry, curé de la Chapelle-aux-Bois, et François Jacquin, curé des Voivres (heureux temps où la moindre paroisse avait encore son prêtre !). Par leurs soins, la société ainsi constituée put acquérir ou prendre à bail les immeubles nécessaires au fonctionnement de l’œuvre nouvelle. Elle commença par agrandir la maison de Mère Justine, en l’aménageant et la dotant d’une chapelle, et cette maison put accueillir aussitôt les nombreuses jeunes filles laissées orphelines par l’épidémie de choléra de 1854. Avec l’aide de la Providence, le travail inlassable des religieuses, joint aux petits revenus de la bonne Mère Justine, aux quêtes dans les villages et aussi à quelques dons généreux pourvoyait à l’entretien de la petite colonie. D’autre part, la haute sagesse du bon Père Micard, et la réputation de sainteté de la Supérieure attiraient au noviciat les jeunes filles éprises de sacrifice et de dénuement. Aussi les progrès de l’Institut furent rapides et permirent bientôt à la petite Communauté d’essaimer autour d’elle, si bien que quatre ans après les premières professions religieuses, en 1861, elles étaient assez nombreuses pour diriger cinq établissements. « Le grain de Sénevé commence à devenir un arbre ! », s’enthousiasmait alors Mgr Caverot, septième évêque de Saint-Dié et premier Supérieur canonique de l’Institut naissant. C’étaient ces cinquante ans de dévouement que le dixième évêque avait tenu à présider. Au fil des années, la Maison de Remiremont était devenue la résidence de la Supérieure générale de la congrégation, mais l’évêque en restait le Supérieur de droit. Mgr Foucault visitait régulièrement l’Institution, dès sa première visite, il avait voulu que son premier geste de Supérieur soit d’aller s’asseoir à la table des enfants pour partager leur modeste déjeuner. Mais cette fois, il resta deux jours, et demanda que ce soient des orphelines qui préparent et lui servent son repas de fête. « Ce fut touchant, écrit le chroniqueur de la « Semaine religieuse », de voir avec quelle bonté paternelle il encouragea leur bonne volonté encore inexpérimentée et timide, et leur donna, autant que ses courts instants le permirent, tous les conseils nécessaires pour s’acquitter plus tard d’un service sans reproche ! ». Arrivé la veille au soir pour les Premières Vêpres du cinquantenaire de l’Institut, Mgr Foucault reçut le lendemain les vœux perpétuels de nouvelles Professes, et célébra la Messe d’Action de grâces, au cours de laquelle il commenta leur nom : « Religieuses du Pauvre Enfant Jésus, donc pauvres, comme l’Enfant Jésus, simples, comme Jésus enfant, sauveuses d’âmes, comme Jésus ». Puis il voulut inspecter « l’organisation de tous les services de la Maison, exprimant paternellement ses désirs, signalant les améliorations souhaitables, encourageant le zèle de tous, et donnant partout et sans compter des conseils dictés toujours par une très grande charité doublée d’une très grande expérience ». Des conseils, ajoute le chroniqueur, « Mgr passa aux actes. Prévoyant l’établissement honnête de ses chères pupilles, il reprit l’idée d’une « Caisse dotale » dont les premiers essais – bien timides, hélas ! – étaient restés stationnaires... pour n’avoir pas fait appel au dévouement de dames patronesses, à défaut d’un Saint Nicolas capable de jeter dans la caisse vide des bourses pleines d’or ! Puis, comme le vieux Patriarche distribuant tour à tour à ses enfants les bénédictions d’En-Haut et celles de la terre, il voulut laisser à toutes ses chères protégées un souvenir de son passage, et son nom restera inscrit – en lettres d’or – sur leurs livrets de Caisse d’Epargne... et dans leurs cœurs ! » Tel était Mgr Foucault , pauvre lui-même, jeté hors de son « palais » épiscopal par les tristement fameuses « lois scélérates », mais sachant avoir, jusque dans son dénuement, des gestes de grand seigneur.

L’INSTITUTION , CENT ANS APRES Cent ans après, la page est tournée à Remiremont, où il n’y a plus de Communauté de Sœurs du Pauvre Enfant Jésus. Des cinq maisons que comptait encore l’Institut il y a 35 ans (à Remiremont, Charmois-L’Orgueilleux, Dogneville, Monthureux-sur-Saône et Saint-Genest) , deux seulement subsistent, qui sont deux Maisons de retraite : à Saint-Genest, où réside l’actuelle Supérieure générale, Sœur Georges Marie Vautrin, et Charmois. Les effectifs sont réduits à 15 sœurs, dont plusieurs sont très âgées. Et pourtant... Dieu appelle toujours ! Ce sont nos oreilles qui ne savent plus entendre, parce qu’elles sont assourdies par le tapage tonitruant d’un environnement qui ne connaît plus le Silence où Dieu parle. En terminant, qu’il soit permis à la signataire de ces lignes de dire tout ce que le présent article doit au « chroniqueur » d’il y a cent ans, M. le chanoine Georgel, alors aumônier du Couvent de Remiremont, et aussi d’évoquer avec émotion la mémoire vénérée de son successeur des années soixante, M. le chanoine Marcel Schwob (+ le 4 juin 1970), de qui je garde un souvenir reconnaissant – il sait pourquoi ! Originaire de la paroisse, j’ai connu les heures fastes de « l’Orphelinat » de Remiremont : il m’en reste de chers souvenirs... tel celui de la courageuse troupe de pensionnaires venant sous la conduite des religieuses en juillet 1944 bénir la dépouille mortelle de papa dans notre ferme éloignée : cinq kilomètres accomplis à pied sous un soleil de plomb, et autant pour le retour ! Ce n’est qu’un exemple de la délicatesse proverbiale des sœurs d’alors – et de toujours – fidèles aux exhortations de Mgr Foucault, « douces et humbles de cœur » à l’exemple de leur divin modèle, le « Pauvre Enfant Jésus ». Pour leurs cent-cinquante ans de dévouement, et tout le bien qu’elles ont accompli dans l’ombre, bénissons le Seigneur !

Marie-Ange PETITGENET

Publié le 28/09/2007 par .