L'enfance
C'est dans notre petit village de Domremy que naquît le 6 janvier 1412 celle qui deviendrait, après bien des vicissitudes, la « Sainte de la Patrie. »
Son père, Jacques est un paysan aisé et probe, doyen du village. Sa Mère, Isabelle Romée, est originaire de Vouthon, autre petit village guère éloigné de Domremy. Elle est une pieuse femme dont la vie montrera la vertu. La peine ne lui fut pas épargnée : elle vit mourir sa fille Catherine, son fils Jacquemin, son mari, sans compter, bien sûr toutes ses douleurs liées à la vie de sa Jeannette. Celle-ci connut d'abord l'enfance de toutes les filles de son âge. Elle travaillait surtout à la maison à filer et à coudre. Elle dit n'avoir pas souvenir si elle gardait ou non les bêtes, dans les prés. Des témoins l'y ont vu, ainsi qu'au champ.
Ceux qui l'ont connue durant son enfance la dépeignent comme une bonne fille, semblable aux autres mais plus pieuse. Elle était chaste, simple et réservée. On la voyait souvent à l'église. Elle y entendait la messe et l'office des complies. Souvent aussi, elle se confessait.
Presque tous les samedis après-midi elle partait brûler des cierges et prier aux pieds de Notre-Dame en la chapelle de Bermont.
Le dimanche de Laetare (mi-carême) on la voyait avec les autres enfants se promener, jouer et danser auprès d'un bel arbre, dit 'arbres des dames' ou 'arbre des fées'.
C'est vers l'âge de treize ans, que dans le jardin de son père, elle entendit pour la première fois une voix de Dieu « pour l'aider à se gouverner. » Cette voix -c'était Saint Michel- lui dit la grande pitié qui était au royaume de France.
Saint Michel, à qui vont bientôt se joindre sainte Catherine et sainte Marguerite, va devenir un compagnon régulier de Jeanne. Tous les trois vont « l'éduquer » afin de la préparer à une mission extraordinaire, unique depuis le Nouveau Testament : libérer son pays injustement occupé. C'est donc sous la gouvernance de ses amis célestes que Jeanne va grandir en taille, en grâce et en sagesse.
La mission
C’est en février 1428 que Jeanne quitte Domremy pour Vaucouleurs afin d’y rencontrer le capitaine de la place, Robert de Baudricourt. >
" Le royaume n’est pas au dauphin, dit-elle, il est à mon Seigneur. Mais mon Seigneur veut que le dauphin devienne roi, et qu’il soit son lieutenant en son royaume. Je le conduirai moi-même recevoir son sacre. "
Il est aisé de comprendre la réaction de Baudricourt qui la renvoie chez son père. Mais, pressée par ses voix, elle revient en janvier 1429. Cette fois Baudricourt l’écoute mais paraît indifférent. Jeanne reste pourtant à Vaucouleurs : elle y cherche des appuis, elle rencontre plusieurs fois Baudricourt et tente de le convaincre. La ville s’intéresse énormément à elle. Les habitants se mettent à l’aimer…et à croire en elle. Des chevaliers suivent cet exemple : certains se proposent pour la conduire auprès du roi. L’accord de Baudricourt est finalement obtenu.
Le 13 février, passant sous la porte de France, Jeanne quitte définitivement la région de son enfance. Elle se met en route vers Chinon où elle espère rencontrer le Dauphin Charles. Celui-ci accepta de la recevoir mais se dissimula parmi ses courtisans. Grâce à ses voix, Jeanne put le reconnaître et lui annoncer qu’il serait bientôt sacré à Reims et qu’il deviendrait lieutenant du Roi du Ciel, qui est vrai Roi de France.
Jeanne dut alors subir son premier " procès. " En effet, le Dauphin ne voulut pas prendre le risque d’être le jouet d’une illuminée. Il la fit donc examiner et surveiller pendant trois semaines à Poitiers. Les maîtres et docteurs ne trouvèrent en elle que " bien, humilité, virginité, dévotion, honnêteté, simplicité. " Le Dauphin Charles décide alors de se fier à elle.
Elle reçoit son armement, dont son fameux étendard, et la voilà à la tête de l’armée du Dauphin ! Elle entre en campagne. Son premier objectif : libérer la ville d’Orléans assiégée par les Anglais et dont la chute signifierait la défaite complète de la France. Le 29 avril voit Jeanne entrer dans Orléans. Le 8 mai 1429 voit les Anglais partir. La France redécouvre l’espérance.
Le deuxième objectif : faire sacrer le Dauphin à Reims. Pour cela il faut libérer toutes les places situées sur la route. Elles tombent l’une après l’autre : Jargeau, Beaugency, Gien, Auxerre, Troyes, Châlons-en-Champagne. Le 16 juillet, Charles rentre triomphalement dans Reims. Le lendemain, 17 juillet, le Dauphin devient enfin le Roi Charles VII.
Les grandes peines commencent alors pour Jeanne qui voudrait rendre au roi Paris, sa capitale. Celui-ci ne songe plus qu’à négocier la paix avec les Bourguignons. Jeanne sait bien que ce n’est pas là une bonne paix.
Début septembre elle donne l’assaut contre Paris. Il est particulièrement dur et long. Jeanne est blessée. Le roi ordonne la retraite. L’armée est dissoute le 21 septembre. Jeanne se traîne à Bourges.
Finalement, en novembre, il la renvoie au combat, comme pour l’occuper. Inquiète pour Compiègne assiégé par les Bourguignons, elle y entre secrètement. C’est en effectuant une sortie le lendemain, 24 mai, que Jeanne sera prise.
La passion
Commence alors pour Jeanne ce que nous pouvons appeler sa Passion. Il y a plus d’un point commun entre la vie de Notre-Seigneur et celle de sa servante : la vie " cachée " de Nazareth et de Domremy. La vie publique de courte durée, la trahison contre écus sonnants, le procès inique, la mort. De même que la Passion du Christ est le moment central de son existence terrestre, de même celle de Jeanne sera l’accomplissement de toute sa vie, l’expression sublime de sa sainteté. Ce sont d’ailleurs les minutes du procès qui nous permettent de connaître vraiment sa personnalité.
La voilà aux mains du duc de Bourgogne, plus exactement de son vassal Jean de Luxembourg. Il la vendra aux Anglais pour dix mille livres tournois, le prix d’un roi !
Pour les Anglais, il s’agit de montrer que Jeanne, étant une hérétique, ne peut-être une envoyée de Dieu, que Charles VII a été conduit sur le trône de France par une sorcière et qu’il n’est donc pas le légitime roi de France. La couronne doit alors revenir au roi d’Angleterre, le jeune Henri VI.
C’est l’évêque Cauchon, vendu aux anglais lui aussi-mais d’une autre manière- qui se charge d’organiser son procès. Celui-ci sera illégal du début à la fin, puisqu’il n’y avait même pas les éléments nécessaires à son ouverture.
Enfermée en prison anglaise contrairement à la loi, elle souffrira le harcèlement, les moqueries, les mauvais traitements de ces geôliers. Jamais elle n’aura d’avocat. Son appel au Pape, qui aurait du provoquer immédiatement la suspension du procès, ne fut pas respecté…
De ce procès naîtra ce que R.Brasillach appelle ’le plus émouvant et le plus pur chef-d’œuvre de la langue française.’ Les dialogues nous montrent une sainte. Pleine de bon sens, d’humour aussi. Sachant répondre avec courage et habileté. Confondant ses juges par sa foi et la pureté de son cœur. Nous la voyons aussi souffrante et troublée, déstabilisée même jusqu’à l’abjuration dans des circonstances mal connues. (Dieu savait bien que sans cela nous l’aurions prise pour un ange.)
Vient enfin la délivrance promise par ses voix. Mais elle vient sous la forme d’une condamnation au bûcher.
— " ah, j’aimerais mieux être décapité sept fois que d’être ainsi brûlée. "
— " Maître Pierre, où serai-je ce soir ? "
— " N’avez-vous pas bonne espérance en le Seigneur ? "
— " Oui, et Dieu aidant, je serai en paradis. " Le 30 mai 1431, Jeanne est brûlée à Rouen, sur la place du vieux marché. Elle meurt en criant d’une voix forte le Nom de JESUS. Un soldat anglais affirme avoir vu alors une colombe s’élever vers le ciel. Son cœur résista à toutes les tentatives du bourreau pour le réduire en cendre. Il partit à la Seine.
" Nous avons brûlé une sainte " disaient les Anglais. En cela ils ne se trompaient pas.
En 1455, Charles VII lança une procédure en réhabilitation. Ce fut le troisième procès de Jeanne, légal celui-là. Le 7 juillet 1456 Jeanne est officiellement réhabilitée.
Enfin, dernier procès, celui visant à établir sa sainteté. Elle sera béatifiée le 18 avril 1909 et canonisée le 16 mai 1920. le 2 mars 1922, elle devient patronne secondaire de la France. Charge qu’elle assume encore aujourd’hui…
Bibliographie : Mgr Touchet , la Sainte de la Patrie, DMM. Régine Pernoud, Jeanne d’Arc, Perrin. R.Brasillach, Le Procès de J.d’Arc, éditions de Paris.