Après un silence de 18 ans, le Pape Benoit XVI a publier une lettre circulaire aux chrétiens sur la mondialisation et les problèmes sociaux (encyclique sociale). Lire cette encyclique. Depuis 1891, on en compte seulement 10. Au milieu de la révolution industrielle, qui conduit à des situations de vie désastreuses pour les ouvriers, et face aux évolutions sociales, L'Église invite les catholiques à agir pour trouver des solutions. C'est la première encyclique sociale : Rerum Novarum « Des choses nouvelles » sur a condition des ouvriers. Nous vous proposons trois encycliques qui ont jalonné ces 118 années. Une sélection et des commentaires proposés par “Relations 88”.
1891 - Rentrée en scène d'un grand acteur de l'histoire
« Rerum novarum » ou « Des choses nouvelles »
1931 - Crise, chômage, bruit de bottes
« Quadragesimo Anno » ou « Quarante ans après »
1965 - Souffle d'espérance en pleine Guerre Froide
« Gaudium et spes » ou « Joie et espérance »
1891 - Rentrée en scène d'un grand acteur de l'histoire
A la une des journaux, quelques jours auparavant, on avait lu : « A Fourmies, la manifestation du 1er mai tourne au drame. La troupe tire sur la foule : 14 morts, 22 blessés ».
On était en 1891, fin d'un siècle où la révolution industrielle avait bouleversé les conditions de travail. L'artisanat s'était vu grignoté puis refoulé par l'industrie appuyée par les chemins de fer et la machine à vapeur. Autour des usines s'entassait un prolétariat qui vivait misérablement. Pas de lois sociales, pas de sécurité. Le syndicalisme venait à peine de retrouver droit de cité.
Dans les Vosges, Arsène D., charpentier à Épinal, touchait 5 francs par jour pour 12 heures de travail. François T., tailleur de pierre à Rambervillers travaillait 12 heures par jour et gagnait 4 francs. Des salaires de 3Fr., de 2Fr., par jour n'étaient pas rares. Pour pouvoir payer un kilogramme de pain, il fallait 2h10 de travail à un manoeuvre et 55 minutes à notre charpentier.
Dans l'usine de la verrerie de Portieux, 220 enfants servaient d'aides aux souffleurs et aux tailleurs.
Le 15 mai 1891 tombe un grand cri de protestation : une encyclique du Pape Léon XIII « Rerum novarum ». On n'attendait pas cela de l'Église qui semblait en marge. Le gouvernement italien venait d'enlever au Pape ses États pontificaux. Les catholiques en France n'avaient pas encore digéré la Révolution et, nostalgiques de la monarchie, étaient en général conservateurs. Depuis 1880, des lois avaient instauré la laïcisation. Il y avait bien des catholiques sociaux, peu nombreux, considérés comme des gens d'oeuvres. L'Église semble hors course.
Et voilà que haut et fort le Pape affirme : « droit de propriété pour tous ; refus du socialisme radical ; droit à un salaire décent ; dignité de l'ouvrier ; pas de journée de travail épuisante ; devoir de l'État de protéger les pauvres et les ouvriers par les lois ; droit de former des syndicats et encouragement à en former ».
Cette prise de position fit grand bruit à travers le monde. Un contemporain écrivait : « nous assistons à la rentrée en scène d'un des grands acteurs de l'histoire dans son rôle de défenseur des petits et des humbles ».
1931 - Crise, chômage, bruit de bottes
La T.S.F est encore à ses débuts, les journaux vosgiens soulignent en effet, en janvier 1931, une causerie de M. Barbier, député de Neufchâteau, sur le « tourisme dans les Vosges ». Prononcé au poste radiophonique des PTT, elle avait été retransmise de la tour Eiffel et des stations du réseau d'Etat. Le 12 mars, M. Amet, député de Remiremont, plaide au Parlement pour les percées ferroviaires des Vosges : Saint Maurice – Wesserling et Cornimont-Metzeral. Mais, 1931 est aussi une année noire pour les 242 usines textiles des Vosges. Les prix des produits fabriqués s'effondrent. A partir de mai, les horaires de travail sont réduits d'un tiers.
Malgré tout, les journaux présentent l'inauguration de l'exposition coloniale
à Paris le 7 mai comme une « vision inoubliable... une apothéose ! ».
Le problème des réparations de guerre de 1914 n'est pas encore réglé, que la crise économique déclenche un autre cataclysme : le chômage se répand à travers le monde comme un raz de marée. En janvier 1931 : 4 millions de chômeurs en Allemagne, 2 millions et demi en Angleterre.
Le national-socialisme gangrène l'Allemagne. Hitler arrivera au pouvoir en Le Pape Pie XI : en 1931, analyse les bouleversements de la société et alerte en 1937 sur le danger du nazisme et du communisme 1933. Le fascisme a pris possession de l'Italie. Malgré les accords de Latran de 1929, Pie XI réagit contre l'embrigadement de toute la société sous le fascisme. Mais il porte aussi le souci de la situation économique et sociale qui s'aggrave à travers le monde.
Il envoie le 15 mai 1931 aux évêques et aux fidèles l'encyclique : « Quadragesimo anno » (ce sont les premiers mots de ce texte en latin, quarante ans après Rerum Novarum)
En fonction des grave problèmes de l'heure, il rappelle les directions indiquées par Léon XIII et les confirme, entre autres le juste salaire, le principe de subsidiarité et la liberté syndicale. Il met en garde contre la concentration des ressources entre les mains d'un petit nombre d'hommes. L'État doit intervenir pour mettre une régulation dans le fonctionnement économique, mais sans devenir totalitaire ou dirigiste. Il souligne le rôle des syndicats, il rappelle le caractère individuel et social de la propriété privée et dénonce le danger de la lutte des classes qui inspire le socialisme.
Ce document fut accueilli favorablement à travers le monde, notamment par Franklin Roosevelt et Albert Thomas, directeur du Bureau International du Travail. En 1937, Pie XI mettra solennellement en garde contre le communisme athée, par une encyclique publiée le 19 mars et contre le nazisme, par une autre encyclique, qui fut lue en chaire dans les églises catholiques d'Allemagne le 21 mars 1937, dimanche des Rameaux.
1965 - Souffle d'espérance en pleine Guerre Froide
« Sortira ? Sortira pas ? ». Cette question était sur les lèvres des Français au sujet du général de Gaulle pour les élections présidentielles en cette fin d’année 1965. Elle agitait aussi les esprits des 2 300 évêques réunis à Rome, pour la quatrième et dernière session du concile Vatican II, à propos de la Constitution pastorale « Gaudium et spes », document sur « L'Église dans le monde de ce temps. »
Depuis 4 ans, les 2 300 évêques, venant du monde entier, s’étaient réunis à Rome, à raison de trois mois chaque année, pour « donner une nouvelle vigueur à la foi » avait dit le Pape Jean XXIII dans sa convocation.
En arrière-fond, les évènements font tanguer la planète. L’économie en croissance produit toujours plus de richesses, très inégalement réparties. Depuis Bandoeng, les pays non alignés du Tiers-Monde revendiquent leur part. Le marxisme a gagné une partie de l’opinion mondiale. Les tensions internationales créent de ’inquiétude. Le mur de Berlin, édifié en 1961, symbolise une coupure que le rideau de fer complète en Europe. La guerre froide a failli s’enflammer en 1962 à cause de rumeurs d’installations de missiles atomiques à Cuba. Chinois et Russes ont rompu leurs relations pour divergences idéologiques et territoriales. J.F. Kennedy, qui vient d’engager les États-Unis dans la guerre au Viet-nam, est assassiné en novembre 1963. Brejnev remet la Russie sur la ligne dure en 1964.
Voilà le contexte dans lequel s’est élaboré le document « L'Église dans le monde de ce temps ». Il n’était pas au programme quand débute le concile. Sous l’inspiration de l’Esprit Saint, la prise de conscience provoquée par les réflexions de 2 300 hommes venant de toutes les régions du monde le fait surgir et mûrir. Résultant de 4 rédactions successives, à la fin du Concile, le 7 décembre 1965, il est voté par 2 301 voix favorables, 75 défavorables et 7 bulletins nuls. C’est dire qu’il reflète bien les vues des évêques du monde entier et du Pape ; il est un des documents majeurs du Concile.
Ce texte présente le dialogue de l'Église avec l’humanité. L'Église révèle dans le mystère du Christ la dignité de l’homme, sa vocation sociale et le sens du gigantesque effort de l’activité humaine. L’humanité, malgré fautes et maux, marche à la rencontre de Dieu, à la découverte de son amour, appelée à construire avec son secours un monde de plus en plus humain. Sous cet éclairage, la deuxième partie de Gaudium et spes approfondit de manière détaillée diverses questions sociales urgentes de ce temps : famille, culture, vie économico-sociale, société politique, problème de la paix, communauté internationale.
Comme le souligne le pape Paul VI dans le discours de clôture du 7 décembre 1965 : « Le Concile donne un enseignement simple, neuf et solennel pour apprendre à aimer l’homme afin d’aimer Dieu ».