Natif de Nancy, Raphaël Thomassin se définit comme : « un pur produit du privé ». C’est vrai qu’il est tombé tout petit dans le chaudron. Un début de scolarité à La Malgrange, puis à Saint-Joseph à Laxou, il avoue sans peine ne pas avoir toujours obtenu des résultats brillants. Il rassurait cependant ses parents en se penchant sur le Génie électrique et en s'engageant dans l'enseignement. Des remplacements le conduisirent vers Saint-Joseph à Remiremont, la Providence à Thionville, Sainte-Marie à Saint-Dié, Notre-Dame à Épinal.
« Raide dingue ! »
Raphaël Thomassin croit en la providence. La Providence, c’est aussi le nom de l’école où il sera nommé en 1999 comme prof de techno à Saint-Dié. « Beaucoup d’élèves y étaient en difficultés. Il nous fallait accueillir toutes les pauvretés. Aider les gamins... Leur redonner le goût d’apprendre en les aidant à enlever cette boule au ventre qu’ils ont parfois en entrant en classe... » Le directeur, Gérard-Antoine Massoni épaulera cet enseignant travailleur et suffisamment honnête pour lui affirmer sa volonté farouche de devenir chef d’établissement.
En 2005, M. Massoni finira par faire de Raphaël Thomassin, son adjoint de direction. « Des orientations, l’expérimentation de la découverte professionnelle... nous recherchions des solutions sur toutes les latitudes dans le cadre admis par le rectorat. » Raphaël Thomassin ne dénigre pas l’enseignement public. Mais, son truc à lui, c’est le privé et son caractère propre. Donner de sa personne, établir une relation privilégiée avec les familles, utiliser à fond ce « besoin d’aider », qui vous grignote parfois tout votre temps… Raphaël Thomassin puisse aussi ses forces dans une foi inébranlable. La proposition tombée un vendredi matin pour un poste de directeur à Saint Clément, avec réponse demandée pour le lundi aurait pu le désarçonner. Que nenni ! Le jeune homme file dare-dare vers Martigny. Le résultat ne s’est pas fait attendre. « À peine dans la cour de cette école, j’en suis tombé raide dingue ! »
« Dur, mais sympa »
Le chaudron, c’est aussi un stade à l’intérieur duquel la combativité fait loi. « Ma mission était là, je n’ai jamais perdu confiance ! » Sous son impulsion, entre collège et primaire, l’effectif réduit à la portion congrue reprenait du tonus. 182 filles et garçons sont inscrits pour 09-10. Une soixantaine de pensionnaires occuperont l'internat. Onze enseignants, dont lui-même puisqu’il garde son attribution de professeur, le directeur sait pouvoir s’appuyer sur sa hiérarchie. Avec 23 reçus sur 26 présentés au brevet, Saint-Clément surfe sur une bonne vague scolaire. Célibataire, Raphaël Thomassin vit son métier à plein temps. Il envisage de fonder un foyer. Plus tard. Le directeur de Saint- Clément, c’est aussi cet homme qui sort son portefeuille lorsqu’un enfant n’a pas de moyens financiers pour partir en Espagne avec ses camarades. Toujours ce souci de vérité. « Le gosse est au courant, l’argent ne tombe pas du ciel... Il faut aider, mais ne pas assister, et mettre face aux réalités... » Les gamins estiment leur directeur « dur, mais sympa ! » Raphaël Thomassin mange tous les soirs avec ses pensionnaires, mais n’hésite pas à renvoyer un garçon désespérément trop violent. « La pastorale, on la vit tous les jours... Forcément, on s’implique émotionnellement. Mais, nous ne sommes pas une famille de substitution... » Et pourtant, un noyau fort existe. Raphaël Thomassin rend hommage à ses parents qui ont su lui transmettre des valeurs précieuses.
Le téléphone sonne. Un problème se pose avec un dépanneur en cuisine. Le directeur écoute et gère. Non, le poste qu’il occupe à Saint Clément n’est pas une sinécure. Une galère non plus. Raphaël Thomassin fait front avec autant de foi que de passion. Au mur de son bureau, une croix. Sur un meuble, la photo d’un être cher qui aidé à se propulser en avant. Les difficultés, mais aussi la reconnaissance grandissent les hommes. Parmi de petits objets qu'il conserve un tee-shirt dédicacé par d'anciens élèves, une boule de neige rapportée d’Espagne par un enfant... Le chef d’établissement croit en la providence, celle qui vient vous surprendre, qui vous bouscule un peu. Éduquer, passion d’Espérance, donner la confiance, Saint-Clément est aussi terre de providence.
Josée Tomasi-Houillon Article publié dans Eglise dans les Vosges