Prison : la difficulté du sujet et la gravité de l’actualité doivent-elles faire renoncer au débat ? Début novembre s'est tenu à Épinal la rencontre des aumôniers de Prison du Grand Est de la France dont le thème national est « La citoyenneté ne s’arrête pas aux portes des prisons ». Attention pastorale forte du diocèse, Église dans les Vosges propose des regards croisés sur l’Institution et la fonction de la prison.
Un journaliste vosgien apporte son éclairage sur l’actualité, une Juge d’Application des Peines décrypte sa fonction, l’aumônier d'Épinal témoigne de sa réalité et l’aumônier du Grand Est dresse des perspectives. Des éclairages pour nourrir le débat.
Editorial de Mgr Mathieu "J’étais en prison : vous m’avez visité" (Mt 25)
La prison fait penser à ceux qui ont souffert des méfaits de ceux qui y demeurent ; il faut que justice se fasse pour que les victimes puissent se reconstruire.
Souvent surpeuplée, la prison n’aide pas assez les personnes emprisonnées à se relever, malgré tout le travail des auxiliaires de justice, professionnels et bénévoles. Le respect de la dignité des victimes n’appelle pas la vengeance : il appelle au respect de la dignité de ceux-là même que la justice a reconnus coupables. Les prisonniers ont aussi besoin de raisons de vivre et d’espérer.
Les chrétiens sont attentifs à l’accompagnement des détenus. Les aumôniers rencontrent les prisonniers qui le désirent et organisent avec eux des célébrations. Les chrétiens participent aussi à l’accueil et au réconfort des familles qui viennent pour les parloirs.
Les équipes d’aumônerie de prison de la province vont se retrouver à Épinal les 6 et 7 novembre prochains. Et le Secours catholique réunira à Épinal, le 3 décembre, des personnes concernées par ceux qui sortent de prison : comment préparer leur réinsertion ? Comment les aider, après qu’ils aient payé leur dette, à reprendre place dans la société ? Jésus n’oublie pas les victimes, auxquelles le bon Samaritain consacre tout son soin. “J’étais en prison”, dit aussi Jésus, s’identifiant à ceux que la justice a reconnus coupables. Sous peine d’être inhumaine, la justice doit s’ouvrir à la miséricorde.
+ Jean-Paul Mathieu,
Évêque de Saint-Dié
La colonie pénitentiaire
Bien sûr, les vagues d’annonces de suicides dans les prisons ont interpelé, avant d’être recouvertes par la vague suivante d’annonces de suicides à France Telecom. Au-delà du nivellement de ces remous éphémères, ponctués de la visite de ministres, se pose un problème de fond.
En France, la population carcérale augmente et les prisons françaises sont surpeuplées. Comment y remédier ? Techniquement, c’est facile quoique coûteux : en construisant de nouvelles maisons d’arrêt. Elles permettraient de loger les détenus dans des cellules individuelles, conformément à la volonté exprimée le 12 octobre année ? par le Parlement. Une volonté contraire au vœu de deux ministres successifs qui ne s’éloignaient sans doute guère de la recommandation présidentielle. Il est vrai que le film « Le prophète » illustre à point l’enfer de la promiscuité entre détenus de toutes conditions dans les prisons. Loin de favoriser la réinsertion des prisonniers, ce mélange contre nature constitue un bouillon de culture, un précipité pour la délinquance et les crimes de demain.
Tout cela, les juges le savent bien. Qui fréquente les tribunaux est amené à le constater : la justice s’attache souvent à laisser sa chance à chaque prévenu. Les avocats sont écoutés, surtout s’ils défendent des délinquants primaires assujettis à la « fatalité sociale » dénoncée, il y a longtemps déjà, par Stendhal.
Les limites du bracelet
Seule la procédure expéditive des « comparutions immédiates » fausse le jeu, en raison du manque de recul et des moyens de la défense. Il s’agit de réduire des listes d’attente, de désencombrer des rôles surchargés. Car les salles d’audience ne désemplissent pas et la situation sociale ne fait rien pour arranger les choses. Dans la pratique, mettre en œuvre ces solutions alternatives à la prison est affaire compliquée.
Le système du bracelet électronique balbutie en France. Les travaux d’intérêt général impliquent des moyens de formation dont sont souvent dépourvues les collectivités. Reste la formation au sein même des prisons, qui implique des moyens humains et matériels importants. Le jeu en vaut la chandelle. Humaniser la vie dans les établissements pénitentiaires ne relève pas de l’impossible.
La volonté conjuguée de certains directeurs, surveillants et animateurs permet de réaliser un travail d’insertion remarquable, des initiatives au quotidien, modestes et porteuses d’espoir. Il suffit, pour s’en convaincre, de voir l’enthousiasme de jeunes détenus s’affrontant dans des tournois de football organisés derrière les murs de la maison d’arrêt d'Épinal.
Les visiteurs de prison
La prison n’est-elle que le cul de basse-fosse de la société ? Les visiteurs de prison refusent de s’y résigner. Leur bénévolat tenace tend à répondre à un appel toujours actuel en faveur des plus défavorisés, des plus oubliés. Au-delà des conditions matérielles, on voit bien que le sort des détenus se joue dans le regard que l’on porte sur eux et sur l’espérance dont ils restent porteurs.
A l’occasion d’une messe de minuit à la prison d'Épinal, un ancien responsable de la rue Jeanmaire confiait à quel point des murs humides et vétustes pouvaient parfois abriter une communauté plus humaine que les établissements modernes. Connaissance et reconnaissance de chacun, symbolisée par le fait qu’un détenu était régulièrement chargé de porter les poubelles à l’extérieur, et que tout projet de cavale était désamorcé. Humilité des gardiens aussi, qui ne manquaient pas de rappeler que « lui-même, vous-même » étaient exposés à se retrouver peut-être embastillé un jour…
Le boulet du matérialisme
Peut-on connaître le bonheur en prison ? On se souvient de Fabrice del Dongo heureux comme jamais d’être reclus dans sa tour d’où il pouvait voir la belle Clélia. L’idéalisme de l’auteur de « la Chartreuse de Parme » recouvre une réalité : derrière les murs de pierre, l’homme peut rester libre. On songe à tous les opposants des dictatures, aux chrétiens persécutés. Enfermé dans l’archipel du Goulag, Soljenitsyne continue d’écrire ses romans dans les lobes de sa mémoire ou sur des bouts de papier cachés et de défier le totalitarisme communiste. De sa prison, Saint Paul ne cesse d’envoyer des messages provocateurs d’espérance. Pas de doute : trop souvent, l’homme construit lui-même sa prison, sans lumière, sans perspective. Il demeure plus sûrement enfermé derrière les remparts du matérialisme que dans la geôle la plus abjecte.
Kafka a vu dans « la colonie pénitentiaire » un reflet de la condition humaine. Pascal ne décrit pas autre chose quand il évoque une humanité recluse dans une cage. Avec insouciance, les survivants voient disparaître leurs congénères, enfermés dans la certitude qu’ils échapperont à la destinée commune. C’est un peu comme si, dans une société, on s’attachait à occulter non seulement la mort, mais la nécessité de mettre sa vie au service d’une cause qui vous dépasse, celle de la défense des plus humbles. Des prisonniers, par exemple.
Jean-Paul VANNSON
Juge d’application des Peines : un rôle capital
Écoute, dialogue et autorité, trois qualités nécessaires pour une fonction peu connue en dehors des murs d’enceinte. Christine Lefevre-Ganhal, juge d’application des peines en Lorraine éclaire et pose son regard sans concession sur un métier où l’accompagnement est essentiel. Décryptage avec exemples à l’appui. .Église dans les Vosges (EDV) : Juge d'application des peines, quel est votre rôle ?
Christine Lefevre-Ganhal (CLG) : La mission du juge de l’application des peines (JAP) est triple :
1. Mettre à exécution les peines de façon effective et dans les meilleurs délais
2. Favoriser l’insertion ou la réinsertion des condamnés et la prévention de la récidive
3. Permettre le retour progressif des condamnés à la liberté et éviter une remise en liberté sans aucune forme de suivi judiciaire
EDV : JAP, un métier souvent méconnu quand il n'est pas pointé du doigt. Comment se répartissent vos activités ?
CLG : Le travail du JAP au quotidien se divise en 2 grandes parties :
1. Le milieu ouvert, c'est-à-dire le traitement des peines restrictives de liberté (comme par exemple le travail d’intérêt général ou les peines d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve)
2. Le milieu fermé qui vise toutes les mesures d’individualisation des peines privatives de liberté (c'est-à-dire emprisonnement et réclusion criminelle)
A côté de ces attributions, le JAP donne des orientations, des avis, rédige un certain nombre de rapports (par exemple tous les ans, le JAP doit adresser au ministre de la justice un rapport relatif à ses activités dans le ressort du tribunal où il exerce ses fonctions) et est destinataire d’informations. L’administration pénitentiaire doit en effet informer le JAP d’un certain nombre d’éléments (les incidents disciplinaires, l’état des effectifs, les décisions de mise à l’isolement d’un détenu … )
Exercer les fonctions de JAP, c’est également faire un travail de médiation avec l’extérieur. En effet le JAP, par son action, s’inscrit dans la politique de prévention de la délinquance. Il entretient des liens avec les organismes et associations qui ont pour tâche de favoriser la réinsertion socioprofessionnelle (structures d’hébergement par exemple) mais aussi avec les structures de soins (centres d’alcoologie, centres de lutte contre la dépendance aux produits stupéfiants …)
EDV : Permissions de sortir, placements à l'extérieur, semi-liberté, libération conditionnelle, bracelet électronique, votre choix est-il suffisant pour permettre un cheminement des détenus ?
CLG : A mon sens, le dispositif législatif actuel est suffisant pour permettre au JAP de prononcer la mesure d’individualisation de la peine qui sera la plus adaptée à la personnalité du condamné.
Il peut par exemple combiner différentes mesures d’aménagement de peine pour permettre une progressivité dans la remise en liberté du condamné si cela s’avère nécessaire (comme cela est fréquemment le cas pour les personnes condamnées à de longues peines) .
Ainsi, il peut par exemple prévoir qu’avant de placer un condamné sous le régime de la libération conditionnelle celui-ci sera soumis préalablement à une mesure probatoire (de type semi-liberté, placement à l’extérieur ou bracelet électronique). La pratique démontre qu’il est largement préférable - pour prévenir la récidive - de préparer la libération d’un détenu et de favoriser les mesures d’accompagnement socio-éducatif plutôt que permettre une libération dite « sèche », sans suivi judiciaire.
EDV : Pour vous, quelle pourrait-être la priorité budgétaire pour faciliter votre travail d'accompagnement et de suivi ?
CLG : La priorité, lorsqu’une nouvelle attribution est dévolue au JAP, est de prévoir les moyens suffisants en termes d’effectifs pour la mettre en œuvre.
Ainsi, par exemple, depuis la loi du 10 août 2007, les soins en détention se sont largement généralisés. Le JAP, pour les infractions les plus graves, doit inciter les condamnés à recevoir des soins en détention puis à les poursuivre à l’extérieur, dans le cadre des mesures d’aménagement de peine qu’il accorde .
Or, les moyens sont très insuffisants en termes d’offre de soins. Parfois les personnes détenues peuvent attendre 1 an avant de pouvoir bénéficier d’une véritable prise en charge psychothérapique en détention, alors même que des experts auront reconnu la nécessité d’un tel suivi .
Par ailleurs , le développement des mesures d’aménagement de peine doit aller de pair avec l’augmentation du nombre de travailleurs sociaux chargés d’assurer le suivi des personnes qui vont être placées sous main de justice.
Enfin, le JAP travaille avec des greffiers et là encore les effectifs doivent être suffisants, ce qui n’est pas toujours le cas.
EDV : Vous êtes appelées à travailler avec des acteurs bénévoles issus des associations ou des aumôneries. Comment percevez-vous leur rôle et leur responsabilité ?
CLG : Leur rôle est essentiel. Je pense notamment à toutes les associations qui acceptent d’accueillir des personnes condamnées à un Travail d’Intérêt Général. Sans leur concours et leur action bénévole, les JAP ne pourraient pas mettre en œuvre la totalité des peines de Travail d’Intérêt Général qui sont prononcées par un Tribunal Correctionnel ou de Police.
En milieu fermé, l’action de ses acteurs bénévoles mérite également d’être soulignée. En effet, les visiteurs de prison effectuent bien souvent un travail remarquable et bon nombre de locaux destinés à accueillir les familles (et enfants) des personnes incarcérées n’existeraient pas sans la présence et le travail de ces associations.
Marc Helfer : A quoi sert la prison ?
Marc Helfer est aumônier régional catholique pour les aumôneries d’Alsace, de Franche Comté et de Lorraine. Il témoigne de son engagement au quotidien et nous livre son analyse sur la situation carcérale. Plus personnellement, il partage également son cheminement spirituel.
L’opinion publique est sensibilisée à la surpopulation des prisons françaises. Cette réalité vous semble-t-elle suffisante pour dresser l’état des besoins touchant au respect de la dignité humaine en milieu carcéral ?
Tout d’abord la surpopulation concerne essentiellement les maisons d’arrêt et non les maisons pour peines (centres de détention et maisons centrales). Comme la longueur des sanctions augmente, il faut attendre davantage de temps pour qu’une place se libère dans une prison pour personnes condamnées. Du coup les maisons d’arrêt explosent. Il ne suffit pas d’incarcérer les personnes pour assurer une sécurité illusoire dans notre pays. L’insécurité me semble gagner davantage les personnes qui sortent de prison sans projet réaliste de réinsertion qui passe par le travail, un logement décent, un cercle de relations renouvelé.
L’équilibre est difficile à trouver avec un taux de chômage qui augmente et une vie économique bien perturbée. Par ailleurs, il y a d’autres aspects qui touchent au respect de la dignité des personnes en prison. Le manque de travail croissant, l’augmentation de l’indigence, la marginalisation des étrangers, la difficulté de concrétiser un projet de sortie empêchent la responsabilisation des personnes.
Une question, qui s’impose et qui a du mal à être prise en compte, concerne le temps de la peine. Qu’est-ce qui est fait pour utiliser judicieusement ce temps de la sanction et permettre aux personnes, non seulement de se remettre en question, mais aussi de se reconstruire ? Si la prison est un temps mort, à quoi sert-elle ? C’est un élément clé pour entrevoir une perspective de réinsertion et prendre en compte la dignité des personnes qui devraient continuer à être considérées comme des citoyens à part entière.
Si nous misons à valoriser les personnes durant le temps de leur incarcération et à humaniser les relations, il est à parier que la récidive ne sera plus une fatalité. Il est nécessaire de donner un autre sens à la peine et à l’enfermement. Si les personnes sont respectées dans leur dignité, elles sont en mesure de mieux respecter la société et ses règles de vie collective.
Dans cette situation, comment envisagez-vous le rôle des aumôniers, des visiteurs de prison et plus globalement du réseau associatif ?
A l’instar des visiteurs et des associations, les aumôniers participent à faire du lien entre le « dedans » et le « dehors » de la prison. Nous apportons une bouffée d’oxygène, mais surtout, par notre regard et notre manière d’être, nous travaillons sur la relation humaine, par-delà les actes délinquants et criminels : je suis un humain qui rencontre un autre humain. A partir de là tout devient possible. Un regard de respect, une attention à l’autre qui ne juge pas peuvent déclencher chez une personne la capacité d’une remise en question, l’envie de se remettre debout, le goût à retrouver sa propre humanité.
Être aumônier veut dire aussi être envoyé par l'Église dans cet univers pour y témoigner que toute personne est plus grande que son acte et que la miséricorde de Dieu peut ouvrir en chaque être humain des horizons insoupçonnés de vie et de pardon.
L’annonce et le chemin de l'Évangile passent par une relation véritablement fraternelle qui n’élude en rien les actes commis mais permet à quelqu’un de retrouver sa dignité, d’avoir envie de « réparer », de se dépasser aussi et de devenir libre face à ses « enfermements ».
Comment est né votre engagement pour l’aumônerie des prisons et comment nourrit-il votre foi et votre ministère de prêtre ?
L’engagement dans les prisons est une longue histoire pour moi. Il est lié à mon désir de devenir prêtre. Depuis mon enfance, passant quotidiennement devant les murs de la prison de ma ville pour me rendre à l’école, puis au lycée, j’ai été troublé au plus profond de moi-même par les sinistres murs de la prison, rehaussés de rangées de barbelés, et par une question lancinante qu’ils me renvoyaient : comment vivent les gens derrière ces murs ? Petit à petit la question s’est déplacée : que fait l'Église pour ces gens-là ?
L’appel s’est clarifié et j’ai signalé à mon évêque que j’étais disponible pour servir dans ce milieu de vie au moment de devenir prêtre. Je ne pouvais concevoir mon ministère de prêtre qu’au service de plus pauvres et de démunis, ce qui est le cœur de la mission de l'Église. Il a pris le visage concret des jeunes, des femmes et des hommes incarcérés que je rencontre sans aucune lassitude depuis de nombreuses années, tout simplement pour les aimer.
C’est une semence d’espérance plantée dans une vie d’homme qui a été perturbée, défigurée, mal aimée et qui, je le crois profondément, germera un jour ou l’autre et portera des fruits d’humanité, de justice et de fraternité. C’est ma conviction, ma foi et ma joie de prêtre, même si certains accompagnements sont plus lourds à porter que d’autres.
Zoom sur la Maison d’Arrêt d'Épinal et son aumônerie
Quelques 140 personnes travaillent en son sein (direction, surveillants, personnel soignant, administratif, technique, enseignants, etc …).
Au 15 octobre 2009, la maison d’arrêt compte 244 détenus hommes, 5 mineurs, et 21 femmes.
L’aumônerie est assurée par Jean-Marie THOMAS, aumônier titulaire et diacre permanent, avec Georges FROITIER, aumônier laïque et Claudine PERRIN, stagiaire.
L’équipe d’aumônerie est appelée à intervenir dans le cadre d’une institution laïque et républicaine dont elle respecte la spécificité. Elle y témoigne auprès de tous de l'Évangile. L’aumônerie fait le trait d’union entre le monde carcéral et l'Église.
Outre leur mission spécifique auprès des personnes détenues, les membres d’une équipe d’aumônerie sont des femmes et des hommes à l’écoute, qui ont, en restant à leur juste place, à s’insérer dans le réseau des partenaires de la réinsertion.
Témoignage de Jean-Marie THOMAS, aumônier à la Maison d’arrêt d'Épinal
Ordonné diacre permanent depuis mai 2003, Jean-Marie Thomas s’est vu confier une mission auprès des détenus de la maison d’arrêt. Rencontre.
Église dans les Vosges : Pas trop dur d’être envoyé en mission en milieu carcéral ?
JMT : A la prison, j’ai vite appris à laisser mes a priori à la porte. On se trouve au milieu d’hommes et de femmes avec une réalité d’une humanité souffrante.
Comme diacre, lorsque l’annonce du salut et la révélation de la foi se frayent un chemin, la rencontre est immense. J’ai découvert ce que cela voulait dire être sauvé.
L'Évangile est une ossature qui accompagne la croissance, permet la liberté d’action, la vie, le mouvement et l’être … Avec l'Évangile vécu, on vit, on respire, on ressent, on aime, on souffre, on pleure, on est joyeux, en paix : tout un panel de sentiments nobles et purs, nouveaux et inspirés du cœur même de Dieu.
EDV : Est-ce bien la place d’un diacre permanent ? Et quel est votre rôle ?
JMT : Je ne me sens jamais autant diacre qu’avec les plus pauvres pour lesquels je suis un signe de la miséricorde de Dieu. Je suis présent au nom de l'Évangile, avant de citer cette parole de Jésus « j’étais en prison, vous êtes venus me voir »
Reconstruire sa vie après un séjour en prison est un vrai défi. Certains se définissent comme « inutiles » ou comme « nuls ». La société leur renvoie cette image. Avec l’aide de l’Esprit saint, il m’appartient de clamer qu’il existe en eux une autre part moins sombre, cette part impossible à nier que la vie est belle et que la bonté de Dieu est infinie.
Quelle satisfaction lorsque nous leur révélons qu’ils peuvent retrouver un sens à leur vie.