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À la découverte des trois abbayes

— Étival (7)
— Moyenmoutier (9)
— Senones (12)

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Cette histoire commence au pied du Donon, au fil du Rabodeau jusqu'à la Meurthe.

Cette région est occupée par l'homme depuis bien longtemps comme en témoigne le menhir de Raon l'Étape.

Puis nos ancêtres les Gaulois s'installent ici et construisent des camps fortifiés comme la Pierre d‘Appel ou la Bure respectivement au-dessus d'Étival et de Saint Dié, et un grand centre commercial et religieux au carrefour de trois tribus : le Donon. Là se rencontrent les Leuques de Toul, les Médiomatriques de Metz et les Triboques de Strasbourg.


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C'est dans cette région désertée, loin des villes de l'époque que sont Toul, Metz et Verdun ou encore Strasbourg, que viennent s'installer à la fin du VIIe siècle des religieux désireux de se couper du monde.

/1-le_diocese/12-une-histoire/12-01trois_abbayes/img/04.jpgIls s'appellent Gondelbert, Déodat, Hydulphe et sont tous devenus saints. Rejoints par des disciples, ils fondent un ensemble de monastères en forme de croix.

Ce sont les abbayes de Senones à l'est, fondée par Saint Gondelbert vers 640, Étival et Bonmoutier fondées par Saint Bodon vers 660 - 665 respectivement à l'ouest et au nord puis Galilée devenue St Dié par Saint Déodat vers 669 au sud et enfin, en 671, Moyenmoutier au centre par Saint Hydulphe

C'est ainsi que naît la Croix sacrée de Lorraine.

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La plus ancienne des trois est Senones fondée par un archevêque de Sens dit la légende, plus certainement un moine irlandais venu dans le sillage de Saint Colomban, du nom de Gondelbert. Il obtient en 661 un acte de confirmation de ses terres signé du roi Childéric et qui donne les limites du territoire de l'abbaye qui correspondront quelques siècles plus tard à peu près à celle de la Principauté de Salm.

Il est rejoint dans cette contrée par Déodat et Bodon. Ce deuxième va créer les deux abbayes de Bonmoutier (transférée à Saint Sauveur, près de Badonviller, 54) et Étival entre 660 et 665. Bodon ou Leudin est originaire de la région et très certainement de Toul dont il est évêque.

Le dernier à venir s'installer dans la vallée du Rabodeau est Hydulphe. Originaire de Ratisbonne où il fait des études religieuses, il devient évêque auxiliaire de Trèves (la légende le fera archevêque de cette cité).

Les trois établissements sont placés à l'origine sous la règle de Saint Benoît et se développent au fil du temps malgré des périodes sombres.

En 881, Richarde, l'ex-épouse du roi Charles III le Gros, devenue abbesse d'Andlau, obtient l'abbaye d'Étival et y place treize chanoines réguliers et un prévôt. Le monastère ne retrouvera son indépendance qu'au XIIe siècle.

En 958, l'abbé Almann ouvre à Moyenmoutier une des premières écoles de grammaire d'Europe.

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Au XIIe siècle, Herman II de Salm devient l'avoué, c'est à dire le protecteur, de l'abbaye de Senones. Il s'installe au château de Pierre-Percée qui appartient à sa femme Agnès de Langstein. En 1571, les deux cousins, Jean IX et Frédéric de Salm s'emparent par la force des terres de l'abbaye de Senones qu'ils sont sensés défendre. Ils créent alors le comté de Salm.

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En 1603, Dom Didier de La Cour, moine de l'abbaye Saint Vanne de Verdun, vient à Moyenmoutier pour redonner à ce monastère une vie religieuse normale après une période de décadence. Cette réforme est adoptée à Moyenmoutier et les deux abbayes s'unissent pour devenir les têtes d'une nouvelle congrégation la congrégation Saint Vanne - Saint Hydulphe, pendant lorrain de la congrégation française de Saint Maur. Cette congrégation comptera plus d'une centaine de monastères en Lorraine, Champagne Ardennes, Bourgogne et France.

Moyenmoutier devient le centre intellectuel où se rassemble pour une Académie , l'élite bénédictine. Parmi les moines qui étudient puis enseignent dans les Vosges se trouve Dom Augustin Calmet qui deviendra en 1728 abbé de Senones. Il écrit à Moyenmoutier ses Commentaires sur l'Ancien et le Nouveau Testament. Ce sont les moines archéologues de l'académie médiani-monastérienne qui fouillent les premiers le sommet du Donon. Pour satisfaire à ces savants, l'abbaye se dote d'une bibliothèque prestigieuse dont une petite partie et les boiseries subsistent à la bibliothèque municipale d'Épinal.

La bibliothèque de Senones sera utilisée par Voltaire qui passe trois semaines avec Dom Calmet. Il lui écrira d'ailleurs en 1757 que les livres de Senones ont fait plus de bien à son esprit que les eaux de Plombières à son corps.

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En 1738, la Lorraine est donnée en viager à Stanislas Leszczynski, beau-père du roi de France Louis XV. Le comté de Salm qui appartient en indivision au comte de Salm et au duc de Lorraine est alors partagé. C'est la rivière Plaine qui sert de frontière comme elle marque encore aujourd'hui la limite entre les Vosges et la Meurthe et Moselle. Toute la partie vosgienne devient indépendante en 1751 et l'autre partie, rattachée au duché de Lorraine. C'est ainsi que naît la principauté de Salm.

La création en 1777 de l'évêché de Saint Dié va priver Étival de ses terres.

Enfin, la Révolution française par la suppression des ordres religieux et la vente des monastères comme biens nationaux met fin à plus de mille ans d'histoire. La principauté de Salm demande son rattachement à la France en 1793 après 42 ans d'existence.

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Étival

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De l'abbaye d'Étival subsistent quelques bâtiments beaucoup remaniés depuis et l'église abbatiale, petite sœur de la cathédrale de Saint Dié et qui marque la période de transition entre roman et gothique.

Une nef romane typique de Lorraine du sud et un chœur gothique de style toulois se cachent derrière une façade inachevée du XVIIIe siècle. Néanmoins cette façade a été remaniée après la dernière guerre mondiale car la tour a alors été détruite. Une nouvelle tour a été rebâtie avec un étage de moins et de l'autre côté de la façade. Elle a été achevée en 1978.

La nef est construite de la fin du XIIe au deuxième quart du XIIIe siècle. Elle présente une alternance typique de piles fortes et de piles faibles marquant la différence entre la nef et les bas-côtés, deux travées de bas-côté pour une travée de nef. Elle est voûtée d'ogives. Le transept s'ouvre sur des chapelles cisterciennes, deux côte à côte de chaque côté du chœur. Le chœur lui-même présente une abside du XVIe siècle. Il faut y regarder les chapiteaux historiés.

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Sur le bas-côté sud s'ouvre une chapelle latérale avec une splendide voûte due à Jean Féal. Elle contient des reliques de Sainte Richarde.

Le mobilier de l'église est en grande partie neuf sauf les stalles du XVIIIe siècle. Elles cachent un oculus et des piscines liturgiques.


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L'orgue enfin remplace un instrument dont le buffet datait du XVIIe siècle et qui a été détruit en 1944.

Il date de 1969 et a été construit par la manufacture Haerpfer-Erman de Boulay (57). Il compte 26 jeux répartis sur trois claviers et pédalier.

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Moyenmoutier

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L'abbaye de Moyenmoutier a été bien conservée jusqu'à nos jours à l'exception de son cloître détruit vers 1810.

Les bâtiments datent de la fin du XVIIIe siècle, l'église ayant été consacrée en 1776. Il s'agit d'un des plus beaux exemples de baroque en Lorraine.

Au moment de la Révolution, l'église est donnée à la commune pour servir d'église paroissiale mais le reste des bâtiments est vendu.

L'abbaye transformée en usine textile, sa grande façade est devenue aujourd'hui invisible car les bâtiments industriels s'emboîtent dans les édifices historiques.

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Elle a conservé son très riche mobilier dont des stalles datant de la fin du XVIIe siècle. Au nombre de trente-six, elles présentent autant de visages sur leurs sièges. Des bas-reliefs religieux ou musicaux, à motifs végétaux ou de cloître forment un mur à l'arrière de l'ensemble.

Deux grands panneaux représentent deux épisodes de la vie de Saint Hydulphe. Le premier montre le saint fondateur exorcisant un possédé et le second le baptême de Sainte Odile. En effet, la patronne de l'Alsace, fondatrice du couvent sur le mont qui porte son nom a été baptisée par Hydulphe. C'est au cours de ce baptême qu'elle a recouvré la vue.

Aux portes des stalles sont représentées quatre vertus : force, prudence, justice et tempérance. Enfin, montent la garde à ces mêmes portes deux lions vénitiens de style Louis XIII.

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Parmi, le mobilier conservé, se trouvent également plusieurs reliquaires et crédences en bois doré et sculpté et des tableaux dont un représente le baptême de Sainte Odile et un deuxième la Cène. Dans son cadre en chêne sculpté et doré, il est daté d'environ 1740.

Il convient de citer également Notre Dame de Malfosse, Cette statue du XVIe siècle veillait sur l'abbaye et la cité depuis un ermitage en forêt.

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Pour terminer, le buffet d'orgue est la reproduction de celui des moines transférés en 1810 à Saint Dié où il disparaît dans le dynamitage de la cathédrale en 1944. De style Louis XV et s'accordant parfaitement à l'édifice, il renferme un instrument de 1880 dû à Charles Didier et comptant 26 jeux répartis sur deux claviers et pédalier.


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Cette visite ne serait pas complète s'il n'était fait mention du monte-charge toujours en place dans la charpente de l'église.

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Senones

Capitale des princes de Salm, la cité est dotée d'un riche patrimoine civil et religieux.

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L'abbaye date en grande partie du début du XVIIIe siècle comme c'est le cas pour le cloître, le palais abbatial et le bâtiment de la bibliothèque.

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Le clocher date lui du XIIe siècle. A l'époque toute l'abbaye avait été reconstruite par l'abbé Antoine de Pavie.

L'église a été réaménagée dans une aile du cloître à la fin du XIXe siècle car l'église des moines a été détruite pendant la Révolution française, à l'exception donc de son clocher.

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Les princes de Salm se sont fait construire un ensemble de bâtiments pour les accueillir avec leur administration. Ainsi l'autre moitié de la ville est composée d'un ensemble de palais et châteaux.

Le premier d'entre eux, voulu par le premier prince régnant Nicolas-Léopold date de 1754 et a été détruit par un incendie en 1994. Aujourd’hui ses ruines attendent un avenir meilleur.

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Le second palais construit par Louis-Charles-Othon de Salm Salm (régnant de 1770 à 1778) abritait sa collection de peintures dont certaines sont visibles au Musée départemental d'Art ancien et contemporain à Épinal et d'autres chez les actuels princes de Salm qui vivent dans le château de la Wasserburg à Anholt (Allemagne).

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Bien sûr, ce ne sont là que quelques mots sur ces lieux chargés d’histoire. Il vous reste encore beaucoup à y découvrir.

Bon voyage sur la route des trois abbayes.

Textes et photos de Claude Faltrauer, guide interprète régional