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11/07 /11 Sainte Gébétrude (Témoins vosgiens)
Sainte Gébétrude, chronologiquement la quatrième, est la seule abbesse du Saint-Mont à figurer à notre Propre diocésain actuel. Lors de la rédaction, une leçon pour le bréviaire avait été rédigée, qui finalement n'eut pas de suite, puisque la Commission romaine ne nous a concédé qu'une simple mémoire de Sainte Gébétrude au 8 novembre. Cette restriction tient sans doute au fait que notre Sainte n'est pas inscrite au Martyrologe romain. Le peu que la critique historique en a retenu provient d'une biographie, très valable, de Saint Adelphe, écrite par un moine de Luxeuil qui l'avait bien connu. Et il est normal qu'à travers cet ouvrage nous voyions apparaître ici ou là Sainte Gébétrude, puisque c'est elle-même, humble autant qu'avisée, qui, en qualité d'abbesse du Saint-Mont, eut l'initiative de cette biographie, « le plus ancien texte recevable que nous possédions sur les origines de la fondation ».

D'après ce texte, il est certain, contrairement à ce qu'on a cru longtemps, que Sainte Gébétrude n'est pas la sœur de Saint Adelphe ; à plus forte raison n'est-elle pas la petite-fille de Saint Romary, comme l'affirment froidement les chroniqueurs du XIe siècle. Cédant à la manie que nous avons souvent dénoncée, ceux-ci ont, en effet, prêté à Saint Romary une descendance qui lui aurait succédé à la tête du double monastère qu'il avait fondé au Saint-Mont et qui devenait ainsi une entreprise familiale !
Ce qui situe historiquement Sainte Gébétrude, c'est qu'elle figure au quatrième rang dans la liste des abbesses du Saint-Mont. Sur la fin du siècle dernier, en effet, l'érudit curé de Thiéfosse, l'abbé Didierlaurent, découvrait un manuscrit du plus haut intérêt à la Bibliothèque de l'Angelica de Rome. Le commentaire qu'il en donna aussitôt, avec la liste de toutes les abbesses, dans les « Mémoires de la Société d'Archéologie Lorraine » (1897), a projeté un jour nouveau sur les cinq premiers siècles du célèbre monastère. Très précieux pour la chronologie des abbesses, le manuscrit, par contre, ne donne pas de détail sur leur vie.

Pour notre Sainte nous ne savons donc que peu de choses. Relevons seulement quelques traits épars, et d'abord les différents noms qu'on lui attribue. Baptisée sous le nom latin de Tecta, elle entra au monastère des religieuses au temps où Saint Adelphe était abbé de l'autre monastère. Élue abbesse fort jeune encore, elle prit le nom de Gébétrude ou Gébertrude. Par la suite, ce nom à consonance mérovingienne fut souvent confondu avec celui de Gertrude qu'on trouve dans les textes.
C'est sous son abbatiat que se place l'épisode des funérailles solennelles de Saint Adelphe, qu'elle avait en grande vénération. Avec toutes ses religieuses, elle descendit de la montagne en procession jusqu'au gué de la Moselle pour y accueillir le corps qu'on ramenait de Luxeuil. Suivie d'une foule immense qui remontait les pentes avec des cierges et des fleurs, elle le fit inhumer en l'église Notre-Dame, où reposaient déjà Saint Romary et Saint Amé, n'imaginant pas que la postérité la paierait d'étonnante façon de sa pieuse sollicitude pour ces grands moines de la première heure. On ne sait plus rien d'elle que sa mort, survenue le 7 novembre 672 d'après l'obituaire du Chapitre de Remiremont. Elle fut enterrée dans l'église Saint-Pierre des Religieuses du Saint-Mont.

On sait que le monastère des Religieuses s'est transféré dans la vallée, là où devait s'ériger Remiremont, vers 870. Comme bien on pense, les reliques des fondateurs avaient suivi dans cette migration. Or moins de cinquante ans après, les religieuses furent contraintes de remonter au Saint-Mont pour y chercher refuge devant l'invasion des Hongrois en 917. C'est en souvenir de cette fuite précipitée que le Chapitre, jusqu'à la Révolution, célébrait, chaque année le 13 août, une messe basse commémorative, dite « la messe piteuse », mentionnée au Rituel.

L'alerte passée, on redescendit dans la vallée pour s'y installer de façon définitive. Mais il se trouva que, lors de ce bref séjour sur la montagne, on avait exhumé les restes de l'abbesse contemporaine de Saint Adelphe, qui vinrent ainsi renforcer le trésor des « Corps Saints », comme le dit Sébastien Valdenaire : « Le corps de Madame Sainte Gébétrude fut translaté du Saint-Mont en l'église Saint-Pierre de Remiremont ».
Associée de la sorte aux glorieux fondateurs, Sainte Gébétrude bénéficia de leur « canonisation » collective qui suivit de peu la consécration de l'église Saint-Pierre par le Pape Saint Léon IX, le 14 novembre 1049. En effet, l'abbesse Oda de Luxembourg avait demandé au Pape de procéder à la translation des corps des Saints Romary, Amé, Adelphe et de Sainte Gébétrude. Saint Léon IX y consentit volontiers, mais il en confia le soin, à titre de légat, à Hugues, archevêque de Besançon et à Udon, primicier de Toul. La cérémonie, précédée d'une enquête canonique et d'un inventaire des ossements, eut lieu vraisemblablement le 13 novembre 1050, en présence d'une foule immense. L'Église par-là reconnaissait officiellement le culte de nos quatre Saints.

Sainte Gébétrude aura dû, en somme, à l'aventure hongroise d'être désormais en grande vénération. En feuilletant le Rituel du Chapitre, on constate que Sainte Gébétrude est la seule abbesse du Saint-Mont mentionnée à la suite des Saints Romary, Amé et Adelphe, dans l'antienne qu'on récitait chaque jour au chœur à la fin des Laudes ; elle avait par ailleurs son hymne propre aux Vêpres. « Le 7 novembre, fête de Sainte Gébétrude : il y a l'offrande et on dit la Grand-messe à l'autel de Saint Romary ».

Comme ses célestes compagnons, elle eut sa châsse particulière, qu'on portait en procession, devant laquelle une lampe brûlait en permanence. A cet égard, les allusions ne manquent pas dans le cérémonial du Chapitre ou le Mémorial de la Doyenne.
Cette châsse, qui était en argent, fut réparée et enrichie en 1547 par Léon Finet, orfèvre à Mirecourt. Elle figurait sur l'autel de Saint-Romary, comme l'attestent deux inventaires de 1690 et de 1727.

Mais elle disparut, hélas ! à la Révolution, à l'exception toutefois des reliques, qui furent sauvées par les fidèles, comme les autres « Corps Saints ». Lorsque l'antique Collégiale Saint-Pierre, désaffectée, souillée même sous la Terreur, devint église paroissiale à la faveur du Concordat, les reliques furent pieusement recueillies dans de nouvelles châsses, lesquelles périrent elles-mêmes lors de l'incendie des 28, 29 janvier 1871. On les reconstitua de nouveau et Mgr de Briey, évêque de Saint-Dié, les replaça solennellement le 28 août 1887 dans les cinq alvéoles du retable monumental demeuré intact. La châsse de Sainte Gébétrude, avec ce qu'on a pu sauver de ses reliques, fut offerte par Paul Boulanger de Remiremont ; on la voit aujourd'hui, symétrique de celle de Sainte Claire, au-dessus des portiques latéraux du maître-autel.

En fait d'iconographie, il n'existe plus, à notre connaissance, de statue à Jussarupt, pierre XVIIe siècle, ou de tableau représentant notre Sainte. Et pas davantage de chapelle ou d'oratoire, qui assurerait la permanence de son culte. Mais on en trouvait encore trace dans la coutume de donner son nom au baptême, comme il apparaît en feuilletant les registres des paroisses environnantes, au début de ce siècle.

A signaler enfin que Sainte Gébétrude est titulaire de deux églises du diocèse : Charmois-le-Roulier, au canton de Bruyères, et Jussarupt, au canton de Corcieux, ici à titre secondaire, après Saint-Léger. Mais la confusion, signalée plus haut, qui résulte des variantes, se vérifie pour nos deux paroisses. Certains recueils ou pouillés, voire même le savant « Dictionnaire topographique des Vosges » de Paul Maréchal, 1941, leur attribuent Sainte Gertrude comme patronne. Or, en dépit de l'équivoque, il s'agit bien de notre abbesse du Saint-Mont, comme le spécifie Dom Baudot dans son « Dictionnaire d'hagiographie ».

11/07 /11 Sainte Salaberge (Témoins vosgiens)

Sainte du Saint-Mont

Dans le groupe des moniales qui ont contribué à la gloire du Saint-Mont, Sainte Salaberge vient ici à la suite de Sainte Modeste, non par raison de chronologie, mais parce qu'elles ont en commun deux traits. Toutes deux n'ont fait que passer au Saint-Mont ; l'une et l'autre, et ce sont les seules, ont les honneurs du martyrologe romain. Sainte Salaberge est incontestablement un personnage historique, d'une histoire mouvementée, tout à fait insolite, comparée à celle des abbesses précédentes.

Sainte Salaberge, en effet, est très représentative de son époque (VIIe siècle), de cette ère mérovingienne, dont les mœurs, même s'agissant de Saints, contrastent si étrangement avec les nôtres. Voilà une Sainte qui figure au martyrologe et dans les bréviaires avec le titre de veuve, ayant été successivement novice, mariée deux fois et finalement abbesse. Ces différents états de vie, les nombreux déplacements qui s'en sont suivis, ont bien servi sa marche vers une authentique sainteté, exalté même sa mémoire, alors que ses compagnes, demeurées en leur monastère du Saint-Mont, ont assez peu attiré l'attention des historiens.

Sa « Vie » n'est pas du type légendaire du XIe siècle, comme pour tant d'autres personnages. Elle fut écrite par un moine de Luxeuil, son contemporain et, croit-on, peu de temps après sa mort, vers la fin du VIIe siècle. Cet ouvrage, retraçant les faits et gestes d'une grande dame austrasienne, a fait autorité, au point qu'on devait s'en inspirer par la suite pour la vie de Sainte Odile. On prête à celle-ci, fondatrice elle-même du célèbre monastère alsacien, de nombreux épisodes propres à Sainte Salaberge. Il n'en reste pas moins vrai que cette « Vie » présente pour nous tous les défauts de son temps. Les dates, les noms de personnes et de lieux sont indiqués de façon souvent obscure ; sans compter les fautes des copistes qui, au long d'un millénaire, nous ont transmis « l'édition originale ». Le savant Mabillon, les Bollandistes en témoignent bien, comme le colonel Larose, dans son érudit « Essai généalogique sur la famille de Sainte Salaberge », paru à Epinal en 1956.

Celle-ci serait donc originaire du pays de l'Ornain (Meuse), faisant alors partie du royaume d'Austrasie et du diocèse de Toul. On s'accorde à situer à Gondrecourt le château de son père Gondoin. Ce descendant des rois de Cologne, du temps de Clovis, possédait de nombreux domaines sur les confins de l'Austrasie et de la Burgondie, dans les vallées naissantes de la Meuse, de la Marne et de la Saône. Sa mère était Saretrude et trois enfants naquirent à ce foyer dont le plus jeune devait être Saint Bodon, évêque de Toul.

Pour renforcer les liens, d'ailleurs tenus, comme nous verrons, que Sainte Salaberge eut avec le Saint-Mont, signalons qu'elle était la petite-cousine de Saint Arnould, évêque de Metz, venu finir ses jours à proximité de la montagne, où elle-même allait être novice. Vivant à la campagne, loin de la cour de Metz où le leude Gondoin jouissait d'un réel prestige, le foyer menait une vie digne et la mère donnait tous ses soins à l'éducation chrétienne de ses enfants. Elle profitait pour ce des relations d'affaires qu'avait son mari avec Saint Eustaise, abbé de Luxeuil, obtenant même un jour du saint moine la guérison miraculeuse de sa fille, devenue accidentellement aveugle. Il semble que, la sollicitude maternelle aidant, le passage d'Eustaise soit à l'origine de la vocation religieuse qui devait marquer si profondément, à travers de curieuses vicissitudes, la vie de Sainte Salaberge.

Pour l'instant, la Providence lui ménageait une autre voie. Par obéissance et bien qu'à contre-cœur, la jeune fille doit épouser un fier chevalier, lequel vint à mourir, la laissant veuve au bout de deux mois. Cette mort subite allait-elle enfin permettre la réalisation de la vraie vocation entrevue ? Point encore. Car le roi Dagobert 1er, qui s'intéressait à la famille, fit valoir aux yeux de Gondoin les avantages d'une nouvelle alliance pour sa fille et lui proposa un de ses meilleurs officiers nommé Blandin qui, au sein même de la vie de cour, avait ressenti lui aussi l'attrait du cloître. Les deux conjoints s'unissaient donc avec une singulière affinité de frustration et, sans trop le savoir, s'orientaient vers le but où les attendait le Seigneur.

Bientôt leur foyer exemplaire s'enrichit de cinq enfants. L'éducation aimante et ferme à laquelle Salaberge s'adonna à l'exemple de sa mère, lui fit comprendre le mystérieux dessein de Dieu. Il n'est pas rare de nos jours encore, nous pourrions citer des cas précis, qu'une jeune fille pourtant marquée par la vie religieuse, entre dans le mariage et voie de ses enfants devenir prêtre ou religieuse, le Seigneur y gagnant en fin de compte. Pour Sainte Salaberge, en effet, deux enfants devaient accéder à la sainteté : Sainte Anstrude, la seconde de ses filles, lui succèdera à l'abbaye de Laon et son plus jeune fils, Saint Baudoin, archidiacre de la même ville, sera martyrisé par les sicaires d'Ebroïn.

Les deux époux cependant entretenaient, à la chaleur de leur foyer, l'étincelle première de leur vocation monastique, si bien que, le temps venu, ils décidèrent d'un commun accord de se séparer pour entrer enfin en religion. C'est ici que Sainte Salaberge s'insère dans notre hagiographie vosgienne encore que nous ne sachions pas la date exacte, ni la durée de son séjour au Saint-Mont. A la différence de Sainte Modeste, venue toute jeune du pays messin, c'est donc dans sa pleine maturité que Sainte Salaberge vint, chez nous, s'initier à la vie monastique. Une vraie vocation tardive vers la quarantaine !

L'épisode, absolument incontestable pour Georges Durand (« L'église Saint-Pierre de Remiremont », 1, p.18) n'est pas autrement détaillé par le premier biographe de la Sainte, laquelle partage à cet égard, nous l'avons vu, le sort de la plupart de nos abbesses. Sans qu'on puisse affirmer si c'était avant ou après son séjour au Saint-Mont, Sainte Salaberge avait fondé, en gage d'attachement monastique, un important couvent, capable de recevoir une centaine de moniales. On lit bien, dans sa « Vie », que ce couvent s'érigeait dans la « région suburbaine de Langres », sur une terre du patrimoine familial. Mais les historiens discutent pour savoir s'il s'agit de Poulangy en Bassigny ou de Meuse près de Montigny-le-Roi.

Ce que nul ne conteste, c'est la fondation par Sainte Salaberge elle-même de l'abbaye Saint-Jean-Baptiste de Laon, dont par la suite elle allait prendre la tête. C'est là que devait s'épanouir sa vocation avec sa sainteté. On le voit aux traits édifiants et nombreux que rapporte son biographe et sur lesquels nous n'insisterons pas. Il semble plus intéressant de relever deux particularités spécifiquement vosgiennes. En souvenir de son passage au Saint-Mont, Sainte Salaberge prit soin d'instaurer dans son abbaye la pratique de la « laus perennis », qu'elle avait tant appréciée chez nous. Un de ses biographes nous énumère les vocables des sept chapelles appropriées, aujourd'hui disparues : Sainte-Marie, Saint-Michel, Saint-Jean-Baptiste, Saint-Pierre, Sainte-Croix, Saint-Epvre, Sainte-Marie-Madeleine.

Autre détail de moindre importance : jusqu'à la Révolution, Vittel comportait deux paroisses. Celle de Saint-Privat relevait, on ne sait trop par suite de quelle donation, de l'abbaye Saint-Jean-Baptiste de Laon. Sainte Salaberge mourut en son abbaye, où l'avait rejointe sa fille Sainte Anstrude. Quant à la date de cette mort, que ne précise pas le biographe, ce pourrait être 656 selon Mabilllon ou 665 selon les Bollandistes.

Ses reliques furent en grande vénération dans la fière cité jusqu'à la Révolution. On les conservait avec celles de sa fille dans une magnifique châsse en argent, qui prit le chemin de la Monnaie en 1790. A côté, deux autres châsses contenaient les restes de son mari et de ses enfants canonisés. Des reliques dispersées, il subsiste encore des ossements de Sainte Salaberge à Gondrecourt et à Moyenvic. Nous n'avons pas trouvé trace de son culte dans notre diocèse. Seul un vitrail, au transept sud de l'église des Dames de Remiremont, rappelle la mémoire de cette insigne et passagère novice du Saint-Mont, qui en suivant le bon vouloir de Dieu est devenue épouse et mère de plusieurs Saints.

11/07 /11 Sainte Claire (Témoins vosgiens)

Sainte du Saint-Mont

Avec Sainte Claire, nous abordons une physionomie originale. Mystérieuse et sympathique, elle n'a cessé d'intéresser les historiens de Remiremont, les intriguant souvent, les déroutant parfois, dans la confusion de ses multiples noms, des différentes dates où se célébrait sa fête.
Depuis la découverte de l'abbé Didierlaurent, nul ne conteste plus que Sainte Claire soit un personnage historique. Sur la liste de l'Angelica, elle figure bel et bien comme la troisième abbesse du Saint-Mont, précédant immédiatement Sainte Gébétrude.

Comme pour cette dernière, on se trouve, suivant les textes, en présence de plusieurs noms qui la désignent tout à tour. Sigoberge, son nom, bien mérovingien, de baptême, apparaît comme le plus ancien, dans la liste de l'Angelica. Par la suite on trouve Cécile et Claire, double nom présentant par antithèse une curieuse affinité. Ce jeu de mots se réfère à ses miracles, et à son culte : nous l'expliquerons plus loin.
Si l'existence de Sainte Claire est parfaitement admise, on ne sait pratiquement rien de ses origines ni de sa vie, le manuscrit de l'Angelica ne comportant ni date, ni référence aucune à la chronologie reçue pour Saint Romary et Saint Amé.

Toutefois par déduction tirée de ladite liste, on pense que Sainte Claire fut élue abbesse, jeune encore, aux environs de la trentaine, succédant à Erkentrude, deuxième abbesse, et qu'elle mourut en 653. Nous estimons inutile et vain d'en dire davantage. Les pieux auteurs, qui se sont mis en devoir de nous conter sa vie, n'ont fait que compiler légendes impersonnelles et lieux-communs édifiants. A cet égard, Sainte Claire n'aura même pas eu la mince chance de Sainte Gebétrude d'être citée épisodiquement par un témoin sérieux.

Ce contraste entre la certitude qu'un personnage a existé et l'ignorance absolue de ses faits et gestes risque de nous dérouter un peu, lorsqu'il s'agit des Saints. Mais n'est-ce pas cela précisément qui nous les rend sympathiques et les fait si proches du commun des mortels ? Par contre la survie, l'activité posthume de Sainte Claire sont amplement établies grâce aux miracles de bienfaisance qui n'ont cessé de fleurir sur sa tombe. C'est en somme la voix du peuple qui la situe dans l'Histoire et qui, dans une certaine mesure, l'a tirée de l'oubli et introduite dans le Sanctoral.

Sans doute ne figure-t-elle pas, avons-nous dit, au catalogue officiel qu'est le Martyrologe romain. Mais elle est mentionnée en plusieurs autres, à des dates d'ailleurs différentes ; le 12 août dans le Martyrologe de France des Petits Bollandistes : « A Remiremont, la bienheureuse Cécile, appelée aussi Claire, abbesse du monastère de ce lieu, VIIe siècle ». De même dans Chastelain : le 28 janvier, dans le Ménologe bénédictin, le 29 mars dans Artus du Moustier, etc. Le propre du Chapitre de Remiremont, imprimé en 1647 avec approbation épiscopale, annonce ainsi la fête de Sainte Claire : « Mense Augusto, 12. Sanctæ Cæciliae, seu Claræ, seu Claræ Habendensis, Virginis. — Duplex secundæ classis ; commemoratio de Sancta Clara Assisiensi Virgine. »

Ce texte latin, aisément intelligible, appelle deux remarques permettant de faire le point à la fois sur le double nom et sur la coïncidence avec Sainte Claire d'Assise ; autrement dit, nous sommes ici en présence de deux noms pour qualifier une seule Sainte et d'une seule fête pour célébrer deux Saintes bien différentes.

« Sainte Cécile ou Claire du Mont Habend (Saint-Mont). » Il convient d'observer d'abord que le nom d'origine, d'état civil, dirions-nous, Sigoberge, a disparu et que Cécile et Claire sont des noms posthumes, constamment employés dans les textes qui ont trait au culte de notre Sainte et à ses nombreux miracles.

Cécile, plus ancien évoque étymologiquement l'idée de cécité. Ce nom lui fut en effet donné en vertu d'une tradition purement légendaire. Étant abbesse, elle aimait se retirer dans la chapelle de la Sainte Croix, une des sept élevées autour du monastère du Saint-Mont pour la célébration de la « laus perennis ». A force de méditer et de pleurer, parfois des nuits entières, sur la Passion de Notre-Seigneur, elle en vint à perdre la vue.

Par la suite, et nous citons ici « La Vie de Sainte Claire » publiée à Remiremont en 1749, « on donna à Cécile le nom de Claire par allusion, en raison du grand pouvoir que Dieu lui avait accordé d'éclairer les aveugles et de guérir les maux d'yeux ; c'est sous ce nom qu'elle est particulièrement connue et invoquée ».

L'abbé Didierlaurent, traitant de ces deux vocables successifs, note avec justesse : « Le pouvoir spécial et éclatant de cette Sainte sur les maladies ophtalmiques et en faveur des « malvoyants » aura induit les témoins de ces merveilles à l'ingénieuse antithèse présentée par les termes de Cécile et Claire.»

Nous ne serions pas étonné que cette substitution se fût effectuée très tard (plusieurs siècles après la mort de Sigoberge), mais avant la canonisation de Sainte Claire d'Assise, qui eut lieu en 1255. Et l'on n'aurait trouvé rien de mieux, à défaut de documents plus précis, que de placer la fête de Sainte Claire du Saint-Mont le jour même où l'Église honore, le 12 août, l'illustre compatriote de Saint François d'Assise.

Ainsi donc, en bonne et due forme, rappelons-le, notre Sainte prit le pas sur celle dont elle portait déjà le nom, ce qui, dans la liturgie du Chapitre, réduisit la fête de celle-ci à une simple commémoraison. Outre que Sainte Claire du Saint-Mont avait eu en l'occurrence une sorte de droit d'aînesse, il ne déplaisait point à ces Dames, toujours fières de leurs origines, de renouer les liens qui les rattachaient au Saint-Mont, en fêtant leur troisième abbesse la veille du jour où elles assistaient à la traditionnelle « Messe piteuse ».

Qu'on ne s'étonne pas de ce genre « surenchère » liturgique, parfaitement admise de nos jours encore. Dans notre propre diocésain, par exemple, Saint Romary, le 10 décembre, prend le pas sur le Pape Saint Melchiade, pourtant de trois siècles son aîné.

Autre date curieuse : la fête de Sainte Claire se faisait également au Saint-Mont, mais le 28 janvier, à la diligence des Bénédictins, qui au XIe siècle y avaient succédé aux Colombanistes des premiers temps. Il semble que ces savants religieux, disposant alors de documents que nous n'avons plus, tenaient ce 28 janvier pour le jour de la mort, « dies natalis », de Sainte-Claire. Toujours est-il qu'ils évitaient ainsi la coïncidence, dans leur calendrier, de Sainte Claire d'Assise, qui allait intervenir au XIIIe siècle.

Ayant tenté de faire la lumière sur cette affaire complexe des noms et des fêtes de Sainte Claire, remontons dans le temps et gravissons les pentes du Saint-Mont pour y retrouver sa tombe. Car ne sachant rien de sa vie, c'est à présent que nous allons trouver du nouveau, presque du merveilleux.

Inhumé dans l'église du sommet, comme pour toutes abbesses, son corps était resté à la garde des Religieux, qui avaient pris là-haut la relève de la louange divine, après l'installation des Religieuses dans la vallée. Alors que les « Corps Saints » étaient en grande vénération en l'église de Remiremont, celui de Sainte Claire, apparemment laissé pour compte lors de la translation en 917 des restes de Sainte Gébétrude sa cadette, demeurait comme en faction au sommet de la montagne. Ce témoignage de présence silencieuse et bienfaisante que Sainte Claire devait ainsi donner dans l'histoire du Saint-Mont jusqu'en 1790, n'est pas le moindre des attraits qui s'attachent à sa mémoire. Et ne serait-on pas tenté de voir en elle, par excellence, la Sainte du Saint-Mont ?

En gage de leur vénération, et peut-être aussi en gens avisés, les Religieux relevèrent les restes de Saint-Claire, aux environs de l'an mil pour les déposer dans une chapelle spécialement édifiée en son honneur. Elle s'élevait en contrebas du sommet, à proximité d'une source. Les précieux ossements furent placés dans un sarcophage en pierre, entouré d'une grille de protection, car nous assistons ici à l'extension du pèlerinage curatif, déjà signalé et qui allait faire, pour des siècles, la gloire de Sainte Claire. Depuis sa mort, en effet, aveugles et malades souffrant des yeux fréquentaient sa tombe et leur dévotion n'allait pas sans troubler la vie du monastère.

Avec l'érection de cette nouvelle chapelle, qu'on devra du reste agrandir au XIIe siècle, le mouvement incessant des pèlerins se développe désormais plus à l'aise sur les pentes de la montagne, auprès de la fontaine, le Puits Sainte-Claire, où ils se baignaient les yeux. Il n'y avait pas alors de Bureau des constatations, comme à Lourdes aujourd'hui ; nous savons cependant par des chroniques que le pèlerinage fut très fréquenté et les miracles nombreux, tout au long du Moyen Age.

Grâce à ce ministère de charité, Sainte Claire trouva, surtout auprès des humbles fidèles, une large compensation à la « mésaventure » qui aurait pu porter préjudice à sa mémoire. En effet, il ne fut point question d'elle dans la requête adressée en 1049, par l'abbesse Oda de Remiremont à Saint Léon IX et qui, nous le savons, devait aboutir à la « canonisation » de Sainte Gébétrude.

Tandis que les Corps Saints étaient, en l'église de Remiremont, l'objet d'une grande vénération, le pèlerinage sur la tombe de Sainte Claire au Saint-Mont gardait, de son côté, toute la faveur populaire, en raison surtout de ses vertus curatives.

Sans prendre le moindre ombrage de ce dualisme, le Chapitre ne demeurait pas étranger au culte de Sainte Claire, semblant même regretter ce délaissement officiel, pratiqué à l'égard d'une sainte qui jouissait d'un tel crédit auprès de Dieu.

C'est ce qui allait déterminer la décision de Catherine de Lorraine.

Parmi toutes les entreprises de cette maîtresse femme, la plus grande peut-être des abbesses de Remiremont, il nous plaît de retenir son intervention en faveur de Sainte Claire.

Lors d'une visite à Remiremont de l'évêque de Toul, Mgr Jean des Porcelets de Maillane (1607-1624), Catherine de Lorraine le pria de bien vouloir procéder canoniquement au relèvement des reliques de Sainte Claire. Outre qu'il avait l'Abbesse en grande estime, l'évêque de Toul accepta volontiers d'obliger ainsi la fille de son souverain, Charles III de Lorraine. La date de l'événement n'est pas connue avec exactitude ; la relation, par contre, est prolixe de détails sur l'ampleur de la cérémonie.

Au milieu d'un concours immense de fidèles, l'Évêque gravit les pentes du Saint-Mont, fit ouvrir le sarcophage de pierre et, relevant les ossements, les plaça dans une double châsse ; coffret recouvert de lames d'argent et enfermé dans un reliquaire en bois doré. Celui-ci fut ensuite conduit solennellement de la chapelle Sainte-Claire à l'église du sommet pour y être placé, cette fois, sur un autel.

Craignant d'être à l'avenir dépossédés, les Religieux revendiquèrent aussitôt le droit de garder ce trésor et obtinrent « une excommunication » majeure contre ceux ou celles qui entreprendraient d'enlever les saintes reliques ». Grâce à quoi, Sainte Claire ne devait pas quitter le Saint-Mont jusqu'en 1790. Une exception toutefois.

Lors de l'entrée en Lorraine des troupes françaises en 1672, les religieux crurent prudent de mettre la châsse à l'abri et la transportèrent à l'abbaye bénédictine de Munster, en Alsace. Le retour donna lieu à une procession triomphale « en grande pompe, avec un convoi merveilleux de MM. les curés et des peuples de Gérardmer, La Bresse, Saulxures et Vagney et autres lieux circonvoisins.

L'initiative de Catherine ayant eu pour effet d'authentifier ces reliques et de rendre public le culte de Sainte Claire, le pèlerinage prit un nouvel essor. Les miracles, désormais datés et circonstanciés avec soin, firent tant de bruit, notamment en 1630 celui de Mme de Couvonge, chanoinesse de Remiremont, qu'il y eut une enquête pour les vérifier.

Dans le même temps, le Chapitre, à son tour, voulut avoir des reliques de Sainte Claire. Avec l'accord des religieux, on en préleva au Saint-Mont et la Doyenne, Mme de Stainville, offrit le 20 octobre 1642 « une châsse en argent fort bien travaillée, à la moderne » .

La fête annuelle, avons-nous dit, se faisait au Saint-Mont le 28 janvier, échéance qui, à cette époque de l'année, n'allait pas sans graves inconvénients. Aussi les Religieux entreprirent-ils des démarches pour obtenir de transférer la fête au premier dimanche d'août. La requête était motivée : « Pour faciliter la dévotion que les peuples ont à cette Sainte et qu'ils ne peuvent satisfaire à cause des neiges qui couvrent la montagne au mois de janvier ».

Pour marquer cette heureuse innovation, Dom Jérôme Gillet, le prieur, fit composer un office de Sainte Claire et le chapitre général des Bénédictins, tenu à Saint Mihiel, le 9 mars 1737, en autorisa l'usage au Saint-Mont.

Pour faciliter la vénération, lors des pèlerinages, les Religieux firent sculpter un reliquaire portatif en bois doré. Traditionnel à cette époque, il a la forme d'un bras et contient une relique derrière un cabochon de verre. L'abbé Didelot (1737-1825) le mentionne dans son ouvrage sur Remiremont. Cet intéressant objet échappa à la destruction et on peut toujours le voir. C'est une des plus sûres reliques, que nous possédions aujourd'hui de la Sainte Abbesse.

Un simple épisode de l'histoire monumentale du Saint-Mont montre à quel point le culte de Sainte Claire restait populaire aux approches de la Révolution. A l'occasion d'un pèlerinage, en 1767, une bande de garnements s'est glissée parmi la foule et livrée à des désordres, dans les chapelles désaffectées qui entouraient le monastère. A la suite d'une enquête, Mgr Bégon, Evêque de Toul, constatant « les abominations qui s'y étaient commises, ordonnait la démolition de ces chapelles, écueils de la vertu, de l'honneur et des mœurs » à l'exception de la chapelle où Sainte Claire avait reposé pendant sept siècles.

Vinrent les sinistres journées, qui devaient détruire de fond en comble tous les bâtiments du Saint-Mont, ce dont l'abbé Didelot fut le témoin affligé. La chapelle Sainte-Claire disparut comme tout le reste. Seule la source survécut au désastre ; elle coule toujours dans la forêt, témoin silencieux de l'action bienfaisante de notre Sainte.

On y revient encore s'y laver les yeux au cours du XIXe siècle et une chapelle fut alors reconstruite, au bas de la pente, près de la ferme dite de Saint Romary. Modeste édicule sans caractère, où l'on a recueilli la statue décrite plus loin et au pied de laquelle le pèlerinage se maintient fidèlement le 12 août.

Quant aux reliques, la piété des fidèles réussit, tant bien que mal, à les sauvegarder en partie, lors de la réquisition de la châsse, recherchée par les patriotes pour ses garnitures en argent. Les restes qu'on a pu sauver ont été rassemblés, pour être exposés, après la tourmente, sur l'autel majeur de Remiremont, aux côtés de ceux des Saints Romary, Amé, Adelphe et de Sainte Gebétrude. Tous les Saints du Saint-Mont enfin regroupés, subirent ensemble les tribulations dues à l'incendie de 1886. Mais une fois de plus, on refit de nouvelles châsses en bois doré et celle de Sainte Claire fut offerte par deux Romarimontains, Charles de Bruyères et sa sœur Alexandrine. Elle figure aujourd'hui dans l'alvéole surmontant le portique de gauche.

On connaît un certain nombre de lieux de culte, dédiés à Sainte Claire à des dates parfois imprécises, dans l'orbite du Saint-Mont. Ainsi Rupt-sur-Moselle eut sa chapelle, sur ce ban de Longchamp qui dépendait du Chapitre. Elle a disparu comme tant d'autres, dont on retrouve des allusions à Saint-Amé, Saulxures et Ventron.

Il est intéressant de relever une extension dans le val de Galilée. En 1770, Nicolas Noël édifie à Québrux, près de Ban-de-Laveline, une chapelle à Sainte Claire, en vertu d'une promesse qu'il avait faite, s'il recouvrait la vue. L'oratoire existe toujours, bien qu'ayant changé de vocable : Notre-Dame de Pitié, invoquée en faveur des agonisants ; le petit cimetière avoisinant reçut les corps des chasseurs alpins, tombés en 1914-1918 sur la crête du Violu. A la chapelle Sainte-Claire de Charémont, à Frapelle, se fait le pèlerinage traditionnel du 12 août. — Une fontaine à Vioménil porte le nom de Sainte-Claire. Fut-elle jadis considérée comme une succursale, une résurgence miraculeuse du célèbre puits du Saint-Mont ?

Lorsqu'en 1867 fut érigée la nouvelle paroisse de Julienrupt, les habitants, avec l'accord de Mgr Caverot, furent unanimes à choisir Sainte Claire pour leur patronne. L'église qu'ils lui édifièrent se trouve être la seule du diocèse à l'avoir comme titulaire, ce que constitue le plus récent témoignage officiel d'une sainteté que d'aucuns avaient parfois mise en doute.

Voici qui est le plus surprenant. Sur un domaine donné au Saint-Mont par Charlemagne, à Marloux, près de Châlon-sur-Saône, les Dames de Remiremont avaient créé au XIIe siècle un hôtel-Dieu, dont la chapelle avait Saint Claire comme titulaire et le pèlerinage s'y faisait fidèlement le 12 août. En reconnaissance de quoi, Mgr Caverot offrit des reliques à Notre-Dame de Marloux, le 22 juillet 1872.

Le gage de ce culte séculaire voué à Sainte Claire se retrouve particulièrement expressif dans son iconographie.

Alors que Sainte Gébétrude ne figure que dans des oeuvres récentes (vitrail de Saint-Etienne et de Remiremont) ou sous le nom de Gertrude dans la fresque de Monchablon (1885) à la chapelle d'Hennezel, Sainte Claire compte à son actif de multiples et intéressantes représentations. Citons d'abord, pour mémoire, celles qui ont hélas ! disparu. Dom Gesnel, dernier prieur du Saint-Mont, décrit la belle statue exécutée en 1643, en argent massif, tenant de la gauche la crosse abbatiale et de la droite un œil. L'abbé L'Hôte en 1897 signale, dans la plupart des églises et chapelles du ban de Remiremont, des statuettes d'art populaire, dont on ne trouve plus guère de traces aujourd'hui.

Les différentes représentations subsistant encore ont été naguère étudiées par M. Bernard Puton, notamment celles de sa collection.

La plus belle statue est incontestablement celle de la chapelle de Saint-Etienne, au pied du Saint-Mont, en pierre polychromée du XVIIe siècle (1,14m). La Sainte en Bénedictine tient d'une main le livre sur lequel est gravé un œil, de l'autre une sorte de flacon, allusion à la source miraculeuse. A Dommartin, deux pièces du XVIIIe : au presbytère, statue de bois peint ; Sainte Claire est en religieuse, avec croix appendue à un ruban ; le buste repose sur un coffret contenant une relique donnée avant la Révolution, dans une élégante cassette ornée d'un médaillon de Saint Laurent, patron de la paroisse.

L'église de Rupt-sur-Moselle, possède une fort belle statue en pierre (1,03 m), classée M.H. du XVIIe siècle. C'est une abbesse portant la crosse et le livre. La tradition locale en fait une « Sainte Walda », personnage inconnu, dont nous n'avons trouvé la mention nulle part. Il y a de fortes chances que ce soit une Sainte Claire provenant de l'ancienne chapelle.

Une remarquable pièce qui a son histoire, c'est le bras-reliquaire de l'Hôpital Sainte-Béatrice de Remiremont. On le dirait imité directement de la statue d'argent, décrite par Dom Gesnel : il s'agit d'un bras dont la main droite présente un globe oculaire avec l'œil ouvert.

On connaît de Sainte Claire plusieurs gravures anciennes, qui reflètent curieusement les légendes ou confusions déjà signalées. L'une figure dans un calendrier bénédictin, imprimé à Augsbourg (Bavière) en 1675 : en abbesse agenouillée avec la crosse ; à ses pieds, la couronne des leudes austrasiens, puisqu'on la croyait alors fille de Saint Romary. A noter que la même légende persiste dans un tableau de la collection Puton représentant la Sainte agenouillée avec son père devant la Vierge. Une autre gravure illustre les Kyriolés qui se chantaient au XVIIe siècle aux fêtes de Remiremont. La crosse et l'œil y figurent, mais on lui voit aussi la cordelière franciscaine et l'ostensoir, qui est, depuis le XIIIe siècle, l'attribut de Sainte Claire d'Assise.

Signalons enfin que Sainte Claire figure dans trois vitraux récents : à Remiremont (transept sud), à Saint-Etienne, à Dommartin, ici encore en Clarisse ; au chœur de Julienrupt, très belle composition d'après-guerre de Max Ingrand.

Toutes ces localisations géographiques citées à propos du culte et de l'iconographie de Sainte Claire semblent confirmer très bien ce qu'écrivait en 1630 le prieur Dom Ignace Philbert dans la poétique biographie intitulée « La sacrée Colombe bénédictine ». Douce colombe, en effet, qui n'a cessé de planer au-dessus du Saint-Mont !

11/07 /11 Sainte Perpétue (Témoins vosgiens)

Sainte du Saint-Mont

A propos de cette abbesse du Saint-Mont, se vérifie très spécialement le dilemme souvent posé en matière d'hagiographie de l'époque mérovingienne. « Les écrits fixent et certifient les traditions mais parfois aussi les traditions naissent des écrits ou en reçoivent un crédit qui dépasse la réalité historique. »
Les écrits attestent clairement l'existence de Sainte Perpétue : ainsi le manuscrit de l'Angelica la mentionne comme huitième abbesse du Saint-Mont. Le Martyrologe de France lui reconnaît le caractère de sainteté : on y lit au 12 septembre : « A Remiremont, au diocèse de Saint-Dié, Sainte Perpétue, abbesse du monastère de ce lieu fondé par Saint Romary en 620 ».
Quant aux traditions, on les trouve amplement assorties de légendes, dans un curieux ouvrage de Loys Bailly, chanoine de Remiremont (1656). Selon notre conteur, le père de Perpètue était un leude illustre de la cour d'Austrasie, où les mœurs demeuraient encore barbares. Exaspéré de n'avoir que des filles, il menace sa femme de la tuer, si l'enfant qu'elle attend doit être encore une fille. Lisons la suite :
« Dieu qui ne fait rien que pour le meilleur, permit que cette pauvre dame ne réussit pas au contentement de son mary ; et touste affligée d'avoir encore donné la vie à une fille qui devoit bientôt lui causer la mort, elle se laissa troubler par une précipitation si aveugle, qu'elle commanda subitement à la sage-femme de la mettre plutôt au tombeau qu'au berceau. La malheureuse, trop obéissante, tordit le col à cette petite nouvellement née.

« Pendant que ceste femme travaillait à ceste mauvaise action, un ange eut le soin d'en faire une bonne et d'apparoistre à ce seigneur, pour lors éloigné de son palais, auquel il ordonna de s'en retourner promptement vers son épouse et de faire élever soigneusement la fille que Dieu luy avoit envoyée. Ce mary sévère, tout adoucy par ceste vision, se rendit en diligence chez luy, où, après plusieurs contestations négatives du fait, la dolente mère advoua son crime.
« Le pauvre père, surpris d'un coup si désespéré, se porta subitement au lieu où l'on croyoit que ceste petite fust morte et déjà demie pourrie. Mais Dieu, qui fait sortir tout frais du tombeau les corps puants et corrompus, avait conservé pour sa gloire celuy de ceste innocente. Il la trouva donc pleine de vie, et par une nouveauté inoüye, elle avoit le petit doigt dans la bouche, où sans doubte son bon ange l'avoit mis pour le sucer et luy servir en quelque façon d'entretien pendant quatre ou cinq jours qu'elle fut en ce pitoyable état. »
Bouleversé par ce miracle, le père fit grâce à la mère et à l'enfant, qu'il appela Perpètue, en gage de « souvenance continuelle » et c'est lui-même qui plus tard la présentera comme novice au Saint-Mont.

Si nous nous sommes permis de transcrire ce passage savoureux, ce n'est certes pas pour documenter le lecteur sur la naissance de cette enfant prédestinée, mais seulement, pour une fois, à titre d'échantillon de cette pieuse littérature qui a fleuri, aux fins de doter d'une histoire des saints personnages, dont précisément on ne savait rien !
Reprenons pied maintenant sur le terrain historique avec l'abbé Didierlaurent. Il a pu établir que Sainte Perpétue, élevée au Saint-Mont par Sainte Gébétrude qui l'avait en grande affection, accédera à l'abbatiat à un âge assez avancé, puisque, dans la liste, trois noms s'insèrent entre la quatrième abbesse et sa pupille, qui sera la huitième. On estime que celle-ci mourut entre les années 680 et 690.
Fières de leurs fondateurs du Saint-Mont et très attachées au culte des « Corps saints » en leur grande église, les Dames de Remiremont se sont donc contentées, nous l'avons vu, de « récupérer » deux de leurs saintes abbesses, laissant dans l'ombre toutes les autres.
On ne connaît, en effet, de Sainte Perpétue ni reliques, ni aucune manifestation de culte. Et son iconographie, de fraîche date, se réduit à la stèle du Jardin paroissial de Saint-Amé.
Du moins cette modeste évocation, comme l'ouvrage de Mme Dussaux, comme les présentes notices, semble-t-elle esquisser le regain de faveur et d'intérêt que porte notre temps aux personnages qui, du haut de leur « Monastère de la louange », ont marqué de leur sainteté ce coin privilégié des Vosges méridionales.

07/06 /11 Laure Desforges, avocate sans frontières (Témoins vosgiens)
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Aux murs et sur son bureau d’avocate, Laure Desforges a posé des sourires de gosses. Mariée, elle est quatre fois maman. Saisis au hasard des clichés du bout du monde, des visages lumineux d’enfants vous parlent eux aussi, sans nécessité de mots.

De son Auvergne natale, où sommeillent des volcans, Laure aura très certainement puisé cette puissance tranquille qui rassure. De l’Afrique, des Antilles... où elle vécut au rythme des déplacements outre-mer de son père employé par l’Agence Française de Développement, Laure a gardé la spontanéité, la joie de vivre, le soleil au cœur, mais encore ce besoin inné de porter son regard profond au-delà des océans.
Là-bas,plus loin. “Vivre dans des pays différents oblige à se remettre en cause... Il existe des systèmes de pensées tellement différents...” Une justice qui tend vers un certain idéal. Installée en Lorraine depuis une vingtaine d’années, 5 ans à Nancy et depuis 15 ans à Mirecourt, Maître Desforges aurait très certainement pu utiliser son savoir pour seulement défendre les causes autour d’elle.

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“C’est un métier passionnant, très riche humainement et intellectuellement... Chaque fois, ce sont des gens, parfois en situation très diffi cile, qui s’en remettent à vous en toute confi ance... À connaître leur histoire, on voyage avec les gens...” Savoir donner, sans épuiser ses ressources. “Il faut aussi parfois prendre un peu de recul, conseiller. Défendre les victimes c’est aussi évaluer leur préjudice, le point de départ d’une affaire demeure toujours dans l’humain... Trouver un terrain d’entente, une médiation... il est plus subtil de mettre les gens d’accord que d’aller en procès souvent douloureux...” L’écoute de l’autre, toujours, encore, surtout, partout... Le génocide du Rwanda, la révolution du jasmin en Tunisie et bien des situations sur la planète ont profondément ému Mme Desforges.

Une main bénévole tendue

L’association “Avocats sans frontières” dont elle est devenue membre depuis le drame rwandais apporte cette possibilité de tendre bénévolement une main fraternelle à ceux qui n’ont personne pour les soutenir. Aider son semblable à retrouver la sérénité grâce à l’action de la justice “jamais parfaite, mais qui tend vers un certain idéal...” Laure Desforges est également inscrite au barreau du Cambodge où elle a prêté serment. “Là bas, on travaille avec des avocats cambodgiens...

Des dossiers sont lourds, compliqués, il s’agit de défendre les victimes des Khmers rouges. Il faut faire la lumière sur des culpabilités à propos de crimes de sang...” La langue du pays, l’Anglais, le Français sont utilisés. Les traducteurs conduisent leur tâche. Pas simple non plus, lorsque l’on sait par exemple qu’en khmer il est besoin de plus du double de mots pour exprimer une même chose.
Les missions des “Avocats sans frontières” s’étalent sur trois à cinq semaines. “On essaye d’être présents aux côtés de ceux qui sont en diffi culté...De les accompagner dans leurs démarches, aux rendez-vous médicaux...” La tâche s’avère plus ou moins compliquée. En observateur, dans des conditions liberticides, il faut parfois dénoncer.

Loin de l’héroïsme

Laure Desforges n’aime pas se mettre en avant, “Ce serait déplacé et prétentieux !” L’avocate n’a pas le sentiment de réaliser quelque chose d’exceptionnel. Ne la prenez pas pour une sorte de héros. “Les systèmes sont autres, mais ici ou ailleurs, le travail de l’avocat est exactement le même !” Bien dans sa tête, Laure Desforges aborde la foi chrétienne avec le souvenir de ses parents “Une famille très catholique ! On ne ratait jamais la messe du dimanche !”
Mais, s’autorise une approche personnelle, sincère, libérée de clichés désuets. Laure sait s’aménager du temps pour lire des ouvrages traitant du sujet de la religion et participer à des groupes de réflexion menés avec des prêtres. Tolérance et amour s’associent à passion de recherche de vérité... “On ne peut bien aider les gens que lorsqu’on est bien dans sa tête et il est tellement intéressant d’aller voir ce qu’il se passe ailleurs ! J’adore ce que je fais, j’ai la chance de pouvoir exercer. J’en parle beaucoup aux jeunes lors d’interventions dans les lycées comme à l’IUT d’Épinal...”

Une sœur vivant à Londres, un frère, très impliqué dans la religion catholique, installé au Cambodge, Laure Desforges croit profondément à la fraternité sans frontières. “La vie serait plus simple avec davantage de tolérance, d’ouverture aux autres...” Ici ou ailleurs, l’appréhension de l’inconnu, la barrière de la langue ? “Le meilleur passeport, souriez, vous serez récompensés !”

Josée Tomasi-Houillon

19/05 /11 Sœur Angela, nouvelles du Mexique (Témoins vosgiens)
Merci pour votre lettre. Vous m'avez même envoyé une crèche avec des sapins des Vosges ! Cela fait plaisir. J'ai apprécié les bonnes nouvelles de l'Église des Vosges qui bourdonne.
Une autre bonne nouvelle pour moi, c'est la présence de prêtres africains dans le diocèse, qui provoque l'ouverture de "fenêtres" sur d'autres réalités humaines et spirituelles, enracinées dans la Foi...

Notre Ordre en France souffre aussi de la pénurie des vocations religieuses. Si vous recevez la chronique d'Ubexy vous avez pu constater que nos sœurs sont acculées à la nécessité d'abandonner leur monastère, pour se joindre aux moniales de trois autres qui sont dans le même cas. Situation jamais imaginée quand, selon les Constitutions nous faisions vœu de stabilité en ce lieu. J'ai connu le temps où nous étions 84...

La situation se dégrade en beaucoup de pays. Le pauvre Mexique passe par une période bien mauvaise. Des milliers et des milliers d'assassinats. Aidez-nous aussi à prier pour lui. Je me recommande aussi à vos prières, en ce mois de mai je vais fêter mes 90 ans d'existence!

Moi aussi je prie pour vous. Que Jésus vous comble de son amour et bénisse tout ce que vous faites pour Lui.

Sœur Angela, dans un monastère fondé au Mexique par les sœurs d’Ubexy