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Il est l’instigateur des journées mondiales de la Jeunesse qui auront lieu cette année à Madrid du 16 au 21 août. Dès l’ouverture de son pontificat, en 1984, Jean-Paul II a lancé aux jeunes “Vous êtes l’espérance de l’Église et du monde”. Qu’attendent ces jeunes aujourd’hui ? Les résultats du sondage de la JOC sont aussi surprenants que le succès des JMJ. 77% se déclarent optimistes, soit 5% de plus qu’en 2006. Et cela malgré les difficultés à trouver un emploi, un logement pas cher, une projection dans l’avenir. Rencontres dans ce numéro.
Le mouvement catholique JOC (Jeunesse Ouvrière Chrétienne) a mené une grande enquête auprès de 6 028 jeunes de 15 à 30 ans sur le thème “Liberté de choix et dignité des jeunes”. Tous les domaines ont été passés au crible : école, emploi, logement, vie sociale et familiale, accès aux soins, qualité de vie. Plus des deux tiers des jeunes interrogés déclarent qu’une vie digne signifie être respecté par les autres et entendu par la société.
En outre, seulement 40 % d’entre eux ont une idée précise de ce que sera leur vie familiale dans 5 ans alors qu’on en compte 55 % en ce qui concerne la vie professionnelle. Et, malgré le contexte socio-économique actuel, 77 % des jeunes restent optimistes pour leur avenir. A contrario, 65% sont pessimistes pour l’avenir des jeunes en France et 66% le sont pour l’avenir de la France.
Points de vue et témoignages dans ce débat.
Campagne pour les ruraux
Cindy Chevillot a décidé de se mettre au service des jeunes ruraux après avoir œuvré pour les jeunes des quartiers défavorisés. Elle explique son engagement au MRJC.
Église dans les Vosges (EDV) : Qu’est-ce que le MRJC ?
Cindy Chevillot (CC) : Cela veut dire Mouvement Rural de Jeunesse Chrétienne. Ce sont des jeunes qui se retrouvent entre eux pour monter des animations locales sur leur territoire. Des animations qui viennent de l’envie des jeunes quand rien ne se passe dans leur village.
EDV : Des exemples ?
CC : Le 28 mai, l’équipe des jeunes de Saulxures invite les jeunes à un ciné-débat sur l’alimentation mondiale. Du 17 au 24 juillet, on organise un “camp chantier” pour les 16-18 ans à Ramonchamp pour réparer et aménager la voie verte, avec visites, activités de plein air et soirée festive. Pour les 13-15 ans, on propose un séjour “les pieds dans l’eau” du 7 au 21 juillet à l’île d’Oléron : découverte de l’agriculture, du territoire, d’expériences, activités nautiques…
EDV: Comment êtes-vous venue à vous engager au MRJC ?
CC : J’ai d’abord été éducatrice spécialisée à Charmes. Cela me plaisait, mais je me suis engagée au MRJC, car le projet m’intéressait. J’avais envie de découvrir les territoires ruraux et d’en devenir plus proche.
EDV: Pourquoi ?
CC : Dans les quartiers urbains, plein de choses existent déjà. Ils ont plus d’aides financières, d’installations sportives, d’associations. On s’en préoccupe plus que les territoires ruraux qui ne sont pas assez nombreux pour revendiquer quelque chose, ou le proposer. Dans le rural, les foyers ruraux et le MRJC sont les seules instances spécialisées.
EDV: 77% des jeunes sont optimistes selon le sondage de la JOC. Cela vous surprend-il ?
CC : Je le comprends mieux s’ils précisent être confiants pour eux-mêmes et non pour l’ensemble. Les jeunes ne sont pas inquiets pour eux-mêmes, car ils savent de quoi ils sont capables. Chez les adolescents, le taux de suicides est quand même énorme. On fait croire aux jeunes que le bonheur, c’est l’argent. Or, il est ailleurs, dans des rencontres très riches, la vie en association. Au MRJC, on dénonce pas mal la société de consommation. Moi, je crois en la décroissance : je peux vivre avec moins d’argent si je m’en tiens à mes vrais besoins.
Un mouvement dans l’air du temps
Le rassemblement national du MRJC aura lieu du 8 au 10 juillet à Argenton- sur-Creuse. Le thème 2011 ? La mobilité. Au programme : forum, barbecue géant, spectacles de rue, éco-kart, ateliers-débat.
EDV : Pourquoi la mobilité ?
CC : Comment fait-on pour accéder aux loisirs et à la culture quand on est dépendant de ses parents et qu’on n’a rien sur place ? Par exemple, pour aller en bus de Rambervillers à Épinal, c’est la galère car il y a peu de dessertes. Et, pour leurs études, les jeunes vont à Nancy et ne vont jamais revenir sur les territoires ruraux…
EDV : Pourquoi cette action du MRJC ?
CC : On veut donner envie aux jeunes de venir sur leur territoire rural et de s’y investir. Il s’agit de mettre en place des actions collectives, des projets de tous ordres. Il y a beaucoup d’anciens au MRJC. Beaucoup sont des responsables de la vie économique. Ils peuvent donner aux jeunes l’envie de vivre sur leur territoire. Ils constituent un réseau qui permet de se former à la prise de responsabilités et d’agir. En 2009, à l’occasion du festival “le rural s’emballe”, il y a eu foule pour les 80 ans du MRJC à Moriville.
Pour joindre Cindy : O6 59 41 87 97
Un optimisme iconoclaste
Comment expliquer l’optimisme des jeunes ? Réactions à la suite du sondage de la JOC
Sidonie, 27 ans, professeur
“En ce qui me concerne, je suis optimiste pour ma vie privée, car je sais que je vais la mener comme je le souhaite. Pour les élèves de quinze-seize ans que je côtoie, la plupart ne savent pas ce qu’ils veulent ni quel métier ils vont faire. La majorité - 60% peut-être - n’arrive pas à se projeter dans l’avenir : tant que papa et maman sont là, c’est bon !
Ils choisissent une série de première et de Terminale en fonction de leurs résultats scolaires. Beaucoup croient en la débrouille, au chacun pour soi. Dans le lycée plutôt privilégié de centre-ville où j’enseigne, certains font preuve de naïveté. Ils croient qu’ils arriveront à s’en sortir en passant à la télé dans une émission de découverte de jeunes talents, ou en créant un buzz sur Internet.
S’ils se raccrochent à des exemples de réussite matérielle, c’est que la notion de famille a souvent disparu. Il y a deux fois plus de parents divorcés que de parents ensemble. Quand la famille est éclatée, il n’y a plus vraiment de repère, le seul repère, c’est l’école.
Les parents de milieu favorisé – cadres supérieurs, professions libérales – se laissent fréquemment absorber par leur travail au détriment du dialogue avec leurs enfants. Sans doute compensent-ils en leur donnant beaucoup d’argent de poche : en classe, c’est un vrai défilé de mode !
Et même s’ils essaient de s’occuper de leurs enfants, de suivre leur cursus scolaire, ils sont surpris quand on les informe du comportement de leur progéniture au lycée. Lorsque je rapporte par exemple les insultes qui me sont adressées par leur fille ou gamin, les parents tombent des nues, voire prennent leur défense.
Mes élèves cherchent à la fois à se sentir protégés et à être considérés comme des adultes”.
Élise, 33 ans, professeur
Il faut relever que si les jeunes sont optimistes pour eux-mêmes, ils sont pessimistes pour l’avenir de l’ensemble de leur génération ! S’ils gardent le moral, c’est qu’ils pensent qu’ils s’en tireront avec le système D.
Ils n’emploient pas l’expression “conflit de génération”, plutôt utilisée par des économistes lors de la dernière grève. Ils appartiennent à une génération qui connaît des parcours heurtés, avec des salaires figés, et doivent cotiser pour un système de retraite conçu pendant une période de pleine croissance, avec des emplois et des salaires stables, en vue d’une retraite à taux plein dès l’âge de 60 ans.
Ils ont intégré les nouvelles données et sont plus moralistes que la génération 68. Ils sont préoccupés par la défense de l’environnement, sont beaucoup plus égalitaristes. Ils ont du mal à admettre qu’un élève de prépa sur deux est fils de cadre supérieur. Cette statistique ne signifie pas que mes élèves, la plupart issus du milieu ouvrier, soient moins intelligents que d’autres !
Thibaud, 31 ans, cuisinier
“Que l’on soit aussi optimiste m’étonne. Il faut voir plus loin que le bout de son nez, se garder de croire que l’on va pouvoir mener la même vie que nos parents ! Il ne faut pas croire qu’on ne sera pas touché et qu’on est invulnérable ! On ne sera pas épargné par les difficultés de la vie, la baisse du pouvoir d’achat, les prix qui montent, la précarité !
Je trouve qu’en France, on oublie les jeunes et les personnes âgées. Et les adultes oublient souvent qu’ils ont été jeunes. Beaucoup de jeunes sont tentés par l’argent facile, ils rêvent de gros gains aux jeux télévisés ou en participant à des émissions de téléréalité. J’ai été scout à la Vierge à Épinal et je me demande, comme Dominique de Villepin, s’il ne faudrait pas rétablir le service militaire.
Personnellement, j’ai trouvé un esprit d’entraide et de partage à l’armée de l’Air. En chambrée, on sent qu’on doit aider l’autre, et on se sent obligé de le faire. On est encadré, c’est strict, on peut se remettre en question et trouver un autre chemin, son vrai chemin, autre que la violence.
Depuis la suppression du service militaire, il y a peut-être moins de valeurs, de notion de service de la collectivité chez les jeunes. En plus, cela donne un réseau, on se fait des copains à vie, et c’est un “plus” pour la parité entre hommes et femmes.”
Mathieu, 26 ans, étudiant
Si les jeunes sont optimistes, c’est qu’ils sont persuadés qu’ils vont réussir à changer le monde ! Mais il ne faut pas généraliser : il y aussi les blasés !
Sondage de la JOC : point de vue de Pierre, diacre et Marie-Anne Henry
Église dans les Vosges (EDV) : 77% de 6028 jeunes de 15 à 30 ans interrogés par la JOC et le CSA se déclarent optimistes pour leur avenir, contre 71% il y a cinq ans. Comment expliquez-vous cet optimisme croissant ?
Pierre Henry (PH) : Les jeunes sont certainement persuadés qu’ils trouveront toujours une solution, cela fait partie de l’individualisme que nous vivons aujourd’hui.
Marie-Anne Henry (MAH) : Les jeunes pensent qu’ils ont ou auront la force, les appuis pour s’en sortir. N’est-ce pas le propre de la jeunesse de croire en soi ? Ils ont confiance en eux et heureusement !
EDV : N’y a-t-il pas un paradoxe entre cet optimisme et les difficultés dont font état les jeunes : 25% disent avoir été mal orientés dans leur scolarité, beaucoup peinent à trouver un logement et ils n’arrivent pas à se projeter dans l’avenir...
PH : Les jeunes s’accommodent de la situation actuelle, même s’ils ont conscience qu’elle est difficile. Ils sont certains que tout s’arrangera pour eux.
MAH : Les difficultés ne manquent pas en effet aux jeunes qui démarrent dans la vie professionnelle, dans une vie de couple.... Ils sont lucides quand ils les pointent et en souffrent. C’est leur présent. L’avenir, ils l’espèrent forcément meilleur.
EDV : A travers votre expérience, avez-vous le sentiment que les jeunes de 2011 appartiennent à une génération sacrifiée, ou au contraire de nantis ?
PH : Les responsables politiques, syndicaux, religieux sont souvent très âgés et pas assez tournés vers les jeunes. Ces responsables restent “bloqués” sur leur passé et les valeurs qu’ils ont acquises, c’est donc très difficile pour les jeunes d’être reconnus. Ils sont considérés comme “nantis” au plan matériel par les aînés qui ont vécu une vie difficile mais ils sont très fragiles face à la vie : difficultés pour nouer des relations, démission face aux obstacles.
MAH : C’est l’un comme l’autre un jugement d’adultes qui regardent les jeunes à distance ! Nantis, certainement pas... pas tous en tout cas ! S’ils n’ont pas un solide réseau familial et amical qui les soutient, ce n’est pas le monde politique ou économique qui va les traiter en véritables partenaires, je crois plus aux associations où certains jeunes s’engagent.
EDV : Des économistes évoquent le risque de tensions sociales accrues pouvant déboucher à l’avenir sur un conflit de générations. Qu’en pensez-vous ?
PH : Il y a toujours eu des conflits de génération, mais actuellement le fossé se creuse par suite d’un grand décalage entre la vie des jeunes et celle des adultes.
MAH : Les tensions viennent d’un déficit d’échanges, de la défiance des uns envers les autres, voire de la peur. Dans une récente rencontre syndicale, un adulte parlait du “risque” d’avoir à accueillir un jeune stagiaire. Un jeune présent a réagi en demandant pourquoi ce ne serait pas une “chance”.
EDV : Que pensez-vous de la liberté de choix des jeunes ? Quelles actions peu-on mener et que peuvent faire la société et l’Église ?
MAH : Prendre conscience de ce qui entrave la liberté, c’est une étape pour être plus libre. S’interroger sur soi, réfléchir à sa vie et à ce que l’on en fait ne me semble pas tellement porté dans notre quotidien. Trop souvent on pense à notre place et c’est une première action que de penser. Passer de l’individuel au collectif est une deuxième étape. Il me semble que l’Évangile n’invite pas à vouloir une belle vie pour soi seul mais élargit notre regard et invite à l’engagement pour les autres.
Un événement mondial
Des centaines de milliers de participants sont attendus : les prochaines JMJ auront lieu du 16 au 21 août à Madrid. Cette année, le thème est : “Enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi”.
Benoît XVI célébrera la messe finale devant les pèlerins venus du monde entier. Également au programme : catéchèse les matins par des évêques, festival, concerts, expos les après-midis, chemin de croix, marche des pèlerins, veillée de prières et nuit à la belle étoile.
Parfois dénigrées au départ, les journées mondiales de la jeunesse ont connu un succès retentissant. Les éditions de Paris (1997) et de Cologne (2005) ont réuni 1 200 000 personnes, celui de Manille (1995) a mobilisé 5 millions de fidèles.
Ce qui en a peut-être fait le plus grand rassemblement de l’histoire de l’humanité, devant les obsèques de Gandhi. Les JMJ ont suscité un regain de dynamisme chez les jeunes catholiques, qui se sont investis dans différents mouvements de paroisse et de diocèse.
Elles ont permis aux préparateurs de l’événement de mieux se connaître et s’apprécier, au-delà de leurs sensibilités propres. Dans les Vosges, l’équipe de préparation est sur le pont avec Madrid en ligne de mire.
Des weekends de préparations ont déjà eu lieu...
Contacts locaux :
Plaine / Mirecourt : Marilyne Marulier : xxx@xxx.xx
Neufchâteau : Allan Marquez : xxx@xxx.xx
Montagne / Remiremont : Vincent Kieffer : xxx@xxx.xx
Anne Dieste : xxx@xxx.xx
Centre / Épinal : Delphine Souvay : xxx@xxx.xx
Bruyères : Lucie Berriaud : xxx@xxx.xx
Meurthe / Saint-Dié : Marilyne Rouhier : xxx@xxx.xx
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